En invitant le préfet de Mayotte à visiter sa commune, ses réussites, et ses difficultés, Anchya Bamana, maire de Sada, reprenait ce 11 décembre ce qu’avait initié le préfet Seymour Morsy, qui avait peu à peu bouclé son tour communal du territoire.
Mais surtout, l’édile se conforme à la hiérarchie des responsabilités : solliciter la représentativité de l’Etat à Mayotte plutôt que d’aller systématiquement frapper aux portes des ministères… « On en a marre des maires de Mayotte qui nous sollicitent pour une MJC », murmure-t-on dans les couloirs feutrés de la rue Oudinot. Et pour les hanter, les élus, donc les communes, doivent aligner les chèques à Air Austral.
A Sada comme ailleurs sur le territoire, l’application des normes de droit commun se heurte à sa sous-structuration, qui implique que l’Etat ne lâche pas son engagement, avant même de rêver à le contraignante utilisation des fonds européens. C’est ce que Anchya Bamana a fait ressortir de son discours, en évoquant « les retards historiques et structurels au regard des standards français ».
Une mairie sous condition
La commune s’est donc dotée d’un plan stratégique « pour définir les priorités qui concilient le présent et le futur».
Le projet central est l’érection d’un nouvel hôtel de ville, « les locaux de la mairie sont fermés en raison de leur dangerosité », et les services sont éparpillés sur 5 sites différents : « Est-il nécessaire de rappeler que l’Etat a accompagné au cours de ces 20 dernières années les communes à se doter d’une mairie à l’exception de Sada ? », interpellait-elle.
Le projet d’une mairie chiffré en 2015 à 9 millions d’euros a été revu à la baisse « sans que cela remette en cause sa qualité », à 5,7 millions d’euros. Le financement serait tripartite, l’Agence française de développement étant susceptible de revoir son prêt de 1 million d’euros à la hausse, en raison d’une gestion assainie des comptes, mais « sous réserve d’une participation de l’Etat ». Le préfet est donc un peu attendu comme un Père Noël, sans vouloir faire de mauvais parallèle avec la tirade du président Macron en Guyane.
Des fonds consommés
Parmi les autres points sensibles, « les occupations illégales du domaine public maritime, l’exposition aux risques naturels des populations, souvent en situation irrégulière, qui s’y installent avec un habitat précaire, et nos manques de moyens et d’expertise criants pour faire respecter les codes de l’environnement et de l’urbanisme.
L’objectif de la maire était aussi de prouver au préfet que la commune sait utiliser les moyens que l’Etat lui donne « dans des durées extrêmement courtes pour réaliser les travaux conformes aux projets subventionnés. Oui, l’Etat fait des efforts et les Ecoles de Sada I Mtsangani nous prouvent une chose : Ensemble nous réussirons à améliorer les conditions de vie de nos concitoyens. »
La maire a donc misée sur l’implication du préfet Frédéric Veau, et de son succès pourrait inciter les autres maires à entamer la même démarche plutôt que de partir courir les aéroports.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com