Pour gérer les crises, et les visites ministérielles, c’est une gouvernance totalement reconfigurée qui s’est retroussée les manches : Catherine Barbezieux a succédé à Etienne Morel à la direction de l’établissement, Sophie Olivier à Mohamed Ahmed à la Commission Médicale d’établissement et Issa Issa Abdou à Thani Mohamed Soilihi, à la présidence du Conseil de surveillance. Et avec un directeur territorial de l’ARS, Xavier Montserrat, « ancien » d’à peine un an.
Vu de l’extérieur, le CHM ressemble à une zone plutôt hermétique, où un tas de personnes travaillent comme des forcenés. L’activité, globale, bien qu’ « en hausse plus faible » que les année précédente, semble le confirmer, surtout dans le secteur des naissances, avec les 9. 674 enregistrées, soit 160 de plus que l’année dernière.
L’hôpital investit pour vous ! Sur le plan des aménagements, l’établissement s’est doté de locaux de consultation de médecine légale, une salle d’endoscopie supplémentaire, d’une salle Mélanie qui permet un témoignage filmé unique d’une victime d’agression sexuelle, un transfert du service des grands brûlés, la proche inauguration du Centre médico-psychologique de Chirongui, la mise aux normes du dispensaire de Koungou, les travaux d’assainissement de l’hôpital de Dzoumogné, et la poursuite des travaux de l’hôpital de Petite Terre, qui devrait être livré en septembre 2018.
Reconnaissance de qualité
L’extension des salles et ses services à la mesure des activités du CHM repose sur un projet qui nous amènerait presque dans les étoiles, COPERMO, pour Comité interministériel de performance et de la modernisation de l’offre de soins, qui s’oriente non pas vers la construction d’un nouveau bâtiment, mais vers une « restructuration sur place », grâce à un financement de 172 millions d’euros de l’Etat, s’est engagée la ministre de la Santé. Il sera abouti dans 7 ou 8 ans. Ce qui impose de trouver des solutions intermédiaires.
Important pour la reconnaissance de la qualité des soins, souvent critiquée à Mayotte, deux centres de référence et de recherche ont été labellisés : la drépanocytose et les maladies du globules rouges. Par contre, le laboratoire a dû bénéficier d’une dérogation avant d’obtenir son accréditation COFRAC. On le sait, le CHM est sorti du Groupement Hospitalier de Territoire, « ce qui ne remet pas en cause les partenariats privilégiés avec le CHU de La Réunion ». Pour le grand public, le séisme est venu plutôt de le reconnaissance d’un territoire largement sous-doté par l’ARS OI en matière de santé.
L’année à venir verra la mise en œuvre de l’orientation stratégique d’établissement, avec 5 axes qui découlent pour la plupart de ce qui a été mis en place cette année. Le premier porte sur la restructuration de l’établissement, mais en attendant son effectivité dans 7 ans, 3 salles de bloc intermédiaires seront construites et une capacité accrue pour le service de réanimation, notamment.
Contrôle de la gratuité des soins
Très attendu le 2ème axe porte sur l’accessibilité des soins. Les délais d’obtention des rendez-vous devrait être réduits par des mesures pour « augmenter les consultations programmées », la politique de distribution des médicaments sera modifiée, la gratuité des soins sera davantage contrôlée, ainsi que les modalités d’obtention des certificats médicaux. Un enjeu « majeur pour la population et la paix sociale ».
Le 3ème axe porte sur la qualité, notamment de vie au travail, la qualité et la sécurité. La sécurité des agents bien sûr, mais aussi du circuit du médicament, l’indentito vigilance « pour s’assurer que le patient vient sous sa bonne identité », et l’informatisation de la plateforme de régulation du SAMU.
Pour le 4ème axe, l’hôpital confirme qu’il s’ouvre aux autres, « nous ne sommes pas une bulle étanche », dont des partenariats avec les médecins et infirmiers libéraux, le Service d’Incendie et Secours, les associations de l’île ou la coopération régionale.
« Des mots malheureux »
C’est enfin l’attractivité qui fait l’objet d’un groupe de travail, même si « l’ensemble des postes médicaux était occupé en 2017 », le turn over reste important », et la pénurie demeure sur les infirmiers de Bloc opératoire, qui a contraint à « réduire nos activités », donc sur les interventions chirurgicales.
Si Catherine Barbezieux n’a pas évoqué explicitement les journées de grève dures durant lesquelles dispensaires ou urgences furent épisodiquement fermés, elle utilisait les mots de « union et solidarité », pour que les revendications s’expriment « dans la volonté de construire ».
Issa Abdou sera plus concret. Evoquant les tensions communautaristes et les propos racistes qui ont fusé lors des grèves, des mots « malheureux », « issus d’un combat que l’on pensait d’arrière garde », l’élu utilisait les mots de « vivre ensemble » et de « tolérance » pour l’année à venir. Revenant sur sa nouvelle fonction, il se réjouissait de cette « double casquette » de vice-président en charge du social et de la Santé, et de président du Conseil de surveillance, notamment pour « le suivi de la chaîne des naissances ».
Certification en vue
Comme il l’a déjà expliqué, il est favorable à la proposition d’un CHM « en zone internationale », que nous avions repris à la suite de la proposition d’Emmanuel Macron en Guyane qui avait incité à « aucun tabou ».
Sophie Olivier se réjouissait des nombreuses visites qui ont émaillé 2017, le président de la fédération hospitalière de France, le directeur général de la Santé, la ministre herself, ainsi que plusieurs missions de l’IGAS, « des visites qui permettent de faire prendre conscience de la réalité de notre quotidien ». Et se félicitait de la nouvelle plateforme de régulation, qui permet de « prioriser les appels et d’avoir une traçabilité totale, qui nous met au même niveau que les autres départements. »
A noter une refonte de l’indemnité des praticiens à long terme, et plus prochainement, la visite de certification de l’établissement à la fin du 1er semestre 2018.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
* Exploration de l’intérieur d’un organe ou d’une cavité du corps par un procédé de fibres optiques