L’affaire avait défrayé la chronique en octobre. Un jeune braqueur de restaurant « libéré par le parquet » avait fait scandale. Le bureau du procureur avait expliqué avoir libéré « un simple guetteur » pour serrer toute la bande. En tout, cinq auteurs présumés, trois identifiés dont un majeur. C’est ce dernier qui comparaissait ce vendredi en comparution immédiate. Un des mineurs avait comparu la veille devant le juge des enfants, et le troisième, le fameux mineur qui avait été libéré à l’issue de sa garde à vue et qui était convoqué… ne s’est pas présenté.
Mais revenons-en au majeur. Le tribunal correctionnel lui reprochait plusieurs faits. Le « braquage » d’abord. Le 12 octobre, le jeune homme et ses quatre potes viennent dé dérober de l’argent dans un taxi et d’acheter de l’alcool. En chemin, ils passent devant ce petit restaurant de Cavani. L’un des jeunes se souvient y avoir déjà volé de l’alcool. Le propriétaire n’ayant jamais déposé plainte, ils entrent pour réitérer le larcin. Mais la scène dérape.
Dans le salon, la gérante voit entrer les cinq voleurs et pousse un cri. Immédiatement l’un d’eux lui porte un coup de poing. Alors en cuisine, son époux se précipite pour voir ce qui se passe. Trois des jeunes se ruent sur lui et le tabassent, notamment à l’aide d’un tabouret. Pendant ce temps, deux autres emportent des bouteilles d’alcool rangées derrière le bar. Le majeur poursuivi affirme être de ceux qui ont pris les bouteilles, dit n’avoir pas vu les violences, ni y avoir participé. « C’est l’alcool qui nous contrôlait » se défend le prévenu, comme pour expliquer son amnésie partielle.
Il nie aussi les autres faits qui lui étaient reprochés. Notamment d’avoir, le soir-même, agressé le vigile d’un lotissement SIM à Cavani Sud. Ce dernier a reçu un coup de bouteille de rhum sur la tête. Bouteille qui a explosé sous la force du coup.
La victime a formellement identifié « Kaled », le prévenu, comme étant l’auteur du coup. Ce dernier explique être intervenu au contraire pour protéger le vigile en s’interposant d’avec ses agresseurs parmi lesquels, figurent ses complices du matin.
« Le message, c’est : pour ça, on va en prison, sinon l’institution n’est pas crédible »
Cette agression qui a valu 9 jours d’ITT à la victime est la dernière d’une journée que le parquet décrit comme « un périple d’infractions » qui aura duré toute la journée. Le substitut Rieu évoque « un sentiment de toute puissance, on ne recule devant rien pour se satisfaire, et étonnement, les gens qui disent s’interposer, n’ont rien vu. Il faut arrêter de prendre les gens de l’institution judiciaire pour des lapins de six semaines. Ce monsieur est intelligent, mais celle intelligence il n’en a pas fait grans-chose, il fait partie d’une bande qui sème la terreur dans le quartier, poursuit-il ».
Considérant la violence des faits, leurs conséquences dans le quartier, malgré le casier vierge du prévenu, il réclame à son encontre deux ans de prison, dont six mois avec sursis, et mandat de dépôt. « Le message, c’est : pour ça, on va en prison, sinon l’institution n’est pas crédible et son action n’est pas soutenue par la population » clame le procureur en référence à la polémique d’octobre.
Un réquisitoire attaqué de front par Me Andjilani, avocat de la défense. « Ce qui apparaît dans la presse n’est pas la faute de ce garçon. On respectera l’institution si on rend une décision adaptée » plaide-t-il.
Un appel à la clémence largement entendu par les trois magistrats. Ces derniers ont relaxé le prévenu du coup de bouteille sur la tête, le président Xavier Lameyre expliquant manquer « d’éléments à charge sur ces faits ». Pour le vol dans le restaurant, la demande de mandat de dépôt du procureur n’a quant à elle pas trouvé d’écho. Le jeune homme a finalement été condamné à 140 heures de travail d’intérêt général, qui, s’ils ne sont pas effectués, lui vaudront deux mois de prison.
« Pas du tout d’accord » sur le quantum de la peine prononcée, le parquet a annoncé le jour-même faire appel de cette décision.
Y.D.