Cinq ans ferme pour des attouchements sur une fillette

Accusé par une fillette d'agressions sexuelles en 2016, un jeune homme a écopé de 5 ans de prison ferme au tribunal correctionnel. Une peine qui n'est pas loin du maximum prévu par la loi.

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Au tribunal de Mamoudzou

L’affaire aurait dû, initialement, être jugée en Cour d’assises pour viol. Mais « tout le monde a été d’accord pour correctionnaliser l’affaire afin qu’elle soit jugée plus vite » précise le président Banizette au commencement de cette audience qui allait durer plusieurs heures. Le chef d’agression sexuelle a donc été retenu.

Les faits ont deux ans tout juste. Le 24 mars 2016, la police est appelée par une maman qui évoque des attouchements sur sa fille de neuf ans par un certain Ali, qu’elle hébergeait chez elle. La maman raconte que ce jour-là, elle est rentrée à la maison et a vu le jeune homme de 22 ans sortir des toilettes dans lesquelles la fillette était tétanisée, jupe baissée. Interrogée par la police, la petite explique avec des gestes et ses mots, que l’homme est entré alors qu’elle était assise sur les toilettes, qu’il lui a saisi le bras et maintenu la bouche fermée avec l’autre main, avant de  la lâcher et de lui introduire un doigt entre les cuisses en lui faisant « des bisous sur la bouche ». C’est là que la maman est arrivée.
Commence dès lors une longue enquête faite de témoignages, d’expertises psychologiques et médico-légales. Malgré le témoignage de la maman, le prévenu a toujours nié s’être déjà trouvé seul avec la gamine, il a toujours nié toute agression sexuelle. Il a toutefois été placé en détention provisoire dès le début de l’instruction.

C’est donc après deux ans de prison qu’il comparaissait devant le tribunal correctionnel pour agression sexuelle sur mineure de 15 ans, des faits passibles de 7 ans de prison.
Une audience lors de laquelle ses dénégations ont été mise à l’épreuve des éléments de procédure. Certains accablants, comme le témoignage de la mère. Un témoignage que l’homme met sur le compte d’une volonté de lui soutirer de l’argent. Le témoignage de la fillette ? « Elle a été manipulée par sa mère, c’est une manipulatrice ».
La jeune victime a pourtant été expertisée par un psychologue qui a jugé son discours cohérent, sans trace de mensonge ou de trouble psychique, si ce n’est un traumatisme lié aux faits qu’elle raconte. Faits au pluriel, car au fil de l’enquête, elle explique avoir déjà eu « plusieurs fois » affaire à Ali. Notamment sur le balcon ou  » sur le canapé. Il me fait des bisous, me met un doigt quand je dors et ça me réveille » témoigne-t-elle. Pour l’inciter à ne rien dire, il lui donne à chaque fois « des centimes ou un euro ». Plus tard, devant le médecin, la petite évoque aussi des attouchements sur sa poitrine, précise la procédure.
« Tout ce que vous avez dit est totalement faux » s’insurge le prévenu, tiré à quatre épingles à la barre, et entouré de son escorte de gendarmerie. « Je ne comprends pas que ça tombe sur moi ».

« C’est que les témoignages vous désignent », rétorque le président d’audience.

« Quelque-chose s’est passé »

« Quand c’est parole contre parole, la justice essaye de chercher ailleurs », lui explique le président Banizette, désireux de prouver que la justice ne se base pas que sur la parole des enfants. Il évoque le témoignage de la maman, le « traumatisme » décelé par la psychologue. « Quelque-chose s’est passé », en déduit-il. Mais surtout, l’examen gynécologique qui note « une défloration latérale partielle » compatible avec l’insertion de quelque-chose de la taille d’un doigt.

Le président Banizette a annoncé une peine de cinq ans, conforme aux réquisitions du procureur

A sa décharge, le prévenu bénéficie de témoignages de proches qui affirment tous qu’il n’a « jamais eu de geste déplacé envers un enfant ».

Un gros élément de doute provient d’un courrier envoyé depuis le centre pénitentiaire de Majicavo à la mère de la victime, dans lequel le jeune homme la supplie de l’aider, de la sortir de là. Il y évoque sa « tristesse » et son mal-être en détention. Mais surtout, il y demande « une seconde chance ».
« Une seconde chance c’est quand on a fait quelque-chose » note le magistrat, cherchant à comprendre de quoi le prévenu voulait se faire pardonner. Comprendre aussi pourquoi quelqu’un demanderait de l’aide à une personne qui l’aurait manipulé et envoyé en prison pour de l’argent.

« Je ne maîtrise pas bien la langue française » répond l’homme à la barre, laissant entendre que ce n’est pas ce qu’il voulait dire.
Peine perdue, il ne sera pas parvenu à convaincre. Le procureur Camille Miansoni a requis 5 ans de prison ferme à son encontre. Une réquisition suivie par le tribunal qui a donc renvoyé l’homme pour trois ans derrière les barreaux. Il devra en outre verser 4500€ de dommages et intérêts à la victime.
Le détenu a 10 jours pour faire appel auprès du greffe de la maison d’arrêt, il reste présumé innocent tant qu’il n’est pas définitivement condamné.

Y.D.