Les amateurs d’appli obtiennent des données quasiment en temps réel sur les séismes quotidiens à Mayotte. Magnitude, épicentre, profondeur… quasiment plus rien n’échappe aux internautes. Mais les données divergent parfois.
Ce fut le cas ce mardi 22 mai, où une nouvelle secousse s’est fait sentir à 15h37. La préfecture rapporte ainsi que « le bureau des Recherches géologiques (BRGM) a enregistré à 15h37 une nouvelle secousse ressentie par la population d’une magnitude de 5.0 avec un épicentre situé à 50km à l’Est de Mamoudzou. »
Sur les téléphones, l’application « séisme » affichait à cette heure là une magnitude comparable, de 5,1, mais pour un épicentre à 35km à l’est de Mayotte, donc beaucoup plus proche de notre île. Des données issues de l’USGS, l’Institut d’études géologiques des Etats-Unis.
Les divergences s’affichent en rouge et bleu sur une carte de sismicité publiée par le BRGM sur son site : en gris, les principaux séismes entre le 10 et le 22 mai avec une localisation BRGM, en rouge les principaux séismes entre le 19 et le 22 mai avec une localisation BRGM (9 séismes), en bleu les principaux séismes entre le 19 et le 22 mai avec une localisation USGS (7 séismes).
Au plus prés de l’info
On remarque que les données du BRGM forment un tir groupé, une grappe autour d’un point situé à 50km à l’est de Mayotte, « sans qu’on constate de migration de la sismicité ni d’extension de la zone d’active », précisent les scientifiques de l’antenne mahoraise. Le premier séisme a été détecté le jeudi 10 mai vers 8h14 heure locale et depuis il y en a eu plusieurs centaines enregistrées dont 20 de magnitude* supérieure à 4, et 4 supérieure à 5, (5 en réalité en rajoutant celui de ce mardi 22 mai à 15h37).
Sur la même période de temps, l’USGS a localisé 7 séismes. On le voit, les points bleus symbolisant les épicentres sont beaucoup plus dispersés que ceux du BRGM, qui l’explique : « L’USGS utilise des stations sismiques éloignées dont la plus proche se trouve à 700 km de Mayotte et jusqu’à 5.000 km de distance. Sur ces stations éloignées, les phases sismiques sont difficilement visibles pour les magnitudes inférieures à 4.5. Il en résulte des incertitudes plus importantes qu’on voit avec la dispersion des épicentres sur la carte ».
De son côté, le BRGM réalise des localisations avec 4 stations : celles de Kawéni et Iloni à 50 km de distance des épicentres, et celles de Madagascar et du Kenya. La faible distance des stations de Mayotte accroit la précision des localisations (points gris et rouges sur la carte), « mais nous sommes limités par la visualisation des signaux sur les stations éloignées (KIBK au Kenya à 1200 km). Nous ne localisons ainsi que les séismes de magnitudes supérieures à 4.2-4.3. Les séismes plus petits sont captés par les stations de Mayotte mais ne permettent pas de localisation fiable. Elles permettent par contre de vérifier la distance épicentrale et s’il y a un rapprochement ou un éloignement des séismes. Pour l’instant, les séismes restent concentrés sur un secteur d’une dizaine de kilomètres de large environ », précise l’antenne locale du BRGM.
La ride de Davie en cause
Contrairement au Japon situé sur une ligne de faille qui provoque une activité tectonique intense, Mayotte n’est pas habituée à des tremblements de terre répétés. Ce qui laisse place à toutes les craintes et interprétations, « des Mahorais ont enterré un zébu vivant ! », nous ont expliqué des habitants, alors que certains fonctionnaires annoncent leur départ.
Beaucoup de réactions irrationnelles, en face desquelles le BRGM explique que si la sismicité dans cette région demeure à ce jour assez mal connue, l’éloignement de Madagascar de la côte est-africaine (d’où elle s’était détachée) se poursuit provoquant l’ouverture du rift Est-Africain qui se poursuit en mer, « en utilisant le système de failles de la ride de Davie ».
Un phénomène qui « semble progresser vers le sud–est, c’est à dire vers les Comores et Madagascar. Il est probable que ce phénomène remette en activité les anciennes failles de ces deux secteurs, et en particulier les failles sub-méridiennes parallèles au rift Est-Africain et à la ride de Davie. »
Le bureau rappelle que « toute personne souhaitant témoigner, qu’elle ait ou non ressenti le séisme, est invitée à déposer son témoignage sur le site du BCSF (Bureau Central Sismologique Français) à l’adresse : www.franceseisme.fr.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
* La magnitude représente l’énergie libérée par une source sismique sous forme d’onde pendant un séisme