Depuis que la délégation de service public a été attribuée à Mayotte Chanel Gateway par le département en 2013 ce n’est pas fluide. Euphémisme de rigueur. Mouvements sociaux, contestation devant les tribunaux, tentative de licenciement abusif, MCG et sa filiale Manu-Port est en permanence en conflit avec une partie de ses salariés, le délégataire (le département) et ses concurrents.
Aujourd’hui l’agrément de l’exercice de l’activité de manutention par Manu-Port a été retiré par le département.
Sans entrer dans les détails du roman portuaire, mais en en tirant les grandes lignes, MCG a obtenu la gestion du port en 2013. Avec une tendance monopolistique, MCG a réussi le tour de force de récupérer la manutention au profit de sa filiale ; et par conséquent évincer la SMART, opérateur historique de cette activité.
La SMART avait alors saisi le tribunal administratif qui l’avait débouté en novembre 2016, invitant le conseil départemental à autoriser MCG à délivrer un agrément à Manu-Port. Cette décision a été cassée en décembre 2017 par le Conseil d’État sur la forme, qui dénonçait une « erreur de droit ». La plus haute juridiction administrative a estimé que la procédure en urgence n’était adaptée, sans se prononcer sur le fond.
Quelques mois ont passé avant que le conseil portuaire ne se prononce le 24 mai 2018, à une large majorité, contre l’agrément de Manu-Port lui octroyant l’activité de manutention, et pour celui de la SMART. Fatima Souffou, première vice-présidente du conseil départemental chargé des infrastructures expliquait alors au JDM être en attente des éléments complémentaires de la part d’Ida Nel sur Manu-Port.
« Absence de toute réponse »
Il s’agissait, entre autres, d’obtenir les mesures prises par MCG pour éviter les conflits d’intérêts, la détermination des surfaces allouées à Manu-Port et la SMART ou encore les documents de qualification professionnels du personnel de Manu-Port.
Or, les éléments ne sont pas parvenus au conseil départemental à en croire un courrier adressé le 17 juillet 2018 à Ida Nel, présidente de Mayotte Channel Gateway (MCG), Johannes Hendrick Nel, gestionnaire de Manu-Port. Une copie a également été adressée au préfet de Mayotte Dominique Sorain. Dans ce courrier, dont le JDM a obtenu une copie, Soibahadine Ibrahim Ramadani, le président du conseil départemental constate « l’absence de toute réponse [d’Ida Nel] et de la société MCG à [sa] demande [et] informe de sa décision de procéder à l’abrogation de l’agrément délivré à la société Manu-Port à compter de la réception de la présente. »
Contacté par le JDM, et en l’absence de réponse Soibahadine Ibrahim Ramadani, Fatima Souffou indique que le « conseil départemental de Mayotte ne communique pas sur le sujet pour le moment ».
Même son de cloche du côté d’Ida Nel qui ne souhaite « pas faire de commentaire à ce moment », tout en précisant que les « choses sont en cours de régularisation. »
Cette nouvelle décision offre une nouvelle voie de recours, et un nouvel épisode à la vie tourmentée du port. Ida Nel a deux mois pour faire appel devant le tribunal administratif de Mayotte.
Axel Lebruman