Entre deux visites de ministres, des commissions, des missions, des délégations… du beau monde au chevet de Mayotte. Cela nous change des visites sporadiques de maigres secrétaires d’Etat il y a 10 ans, mais que va apporter la Commission des Affaires culturelles et de l’Education, dont une délégation est actuellement à Mayotte ? Nous avons posé la question aux deux députés qui la composent, Bruno Studer, président de la Commission, et député LaRem du Bas-Rhin, et Régis Juanico, Député Nouvelle gauche de la Loire.
Bruno Studer : « Lorsque j’ai été élu président de la commission l’année dernière, j’ai décidé d’organiser des déplacements outre-mer, comme nous l’avions annoncé lors de notre campagne, avec comme objectif de s’imprégner des territoires. Nous sommes allés en Guadeloupe et en Martinique, nous passons presque 4 jours à Mayotte, et deux à La Réunion.
D’abord, nous témoignons par notre présence, de l’intérêt porté par l’Assemblée nationale pour ce qui se passe dans les DOM. Ensuite, nous affinons notre connaissance du territoire, et enfin, tout cela nous permet d’assurer notre fonction parlementaire qui est de voter les lois, d’évaluer les politiques publiques, et de contrôle l’action du gouvernement. Par exemple, sur la mise en place des nouvelles mesures de l’Education nationale, comme le dédoublement des CP en REP et REP+, ou le dispositif ‘devoirs faits’. Ou encore l’évolution du vice-rectorat en rectorat, ou la scolarité obligatoire à 3 ans ».
JDM : Jusqu’où peut aller votre action, en modifiant des mesures annoncées comme celle du rectorat, ou sur la scolarisation des 3 ans ?
Bruno Studer : « Oui, pas sur le rectorat, mais nous devons nous assurer que les mesures lancées au national cadrent bien avec les besoins identifiés du territoire. Ce que font déjà remonter les deux députés et les deux sénateurs de Mayotte »
Régis Juanico : « Par exemple, nous nous sommes rendus compte que la scolarité obligatoire dès 3 ans allait être difficile à mettre en place partout, étant donné qu’il faut déjà s’assurer d’une scolarisation en moyenne section de maternelle pour tous, nous n’y sommes pas. Nous en tiendrons compte lorsqu’il faudra légiférer. »
Dommage qu’une telle commission ne soit pas passée au moment où Mayotte devait appliquer les nouveaux rythmes scolaires !
Bruno Studer : « C’est clair ! Nous nous sommes aperçus que la mise en place de cette mesure aurait nécessité une vision plus proche du territoire. Il fallait les adapter en fonction des classes en rotation.
Autre exemple, la loi agriculture et alimentation 2018 invite à mettre en place une agriculture bio et locale pour fournir les cantines, c’est impossible ici où on en est à chercher à mettre en place ne serait ce qu’un repas chaud pour tous les élèves. »
Pouvez-vous faire remonter l’absence de continuité des politiques de l’Etat, avec la fin des emplois aidés qui avaient pourtant permis la mise en place des activités périscolaires ?
Bruno Studer : « Ils sont remplacés par un autre dispositif, le Parcours Emploi Compétence, mais je tiens à souligner que tous les crédits n’ont pas été consommés sur ces postes. »
Vous avez pu noter le nombre important et croissant d’élèves non lecteurs et non scripteurs…
Bruno Studer : « Oui, et une première réponse est apportée avec le dédoublement des CP. Nous avons aussi salué la mise en place de classes d’unités pédagogiques pour élèves allophones arrivants, dites UPE2A, et le dégagement de 350 postes d’Equivalent Temps plein. Mais un problème de langue demeure. »
Les nombreuses notes qu’ils ont prises vont abonder le bilan remis au ministre de l’Education nationale, « le rapport sera inscrit à l’ordre du jour de la commission, dans trois mois environ, et donnera lieu à un débat public. Nous partons avec la conviction que ce territoire nécessite une attention particulière, c’est pourquoi nous y restons plus longtemps qu’à La Réunion. Nous serons les ambassadeurs de Mayotte à l’Assemblée nationale. »
Propos recueillis par Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com