« Je suis désolé pour celui qui a préparé les nombreuses pages de discours du maire, mais je suis venu pour aller sur le terrain et cibler les endroits où l’immigration clandestine vous pose le plus de problème pour y monter des opérations spécifiques ». Julien Kerdoncuf, le sous-préfet en charge de la Lutte contre l’Immigration Clandestine (LIC), est venu en « mission opérationnelle » à Koungou, dans le cadre de son tour des communes, et ne veut pas brader ses minutes.
Le maire Assani Saindou Bamcolo prend malgré tout le temps de retracer « les dégradations et les cambriolages subies par une commune leader en matière d’insécurité, que je relie directement avec l’immigration clandestine ». Un lien qu’approuvait Julien Kerdoncuf, « une grande partie des mis en cause pour des faits de délinquance est d’origine comorienne ».
Dans la grande salle de réunion municipale, les représentants de la brigade de gendarmerie, la police municipale, les élus et agents de la mairie, dont le maire se faisait le porte-parole, « les reconduites à la frontière ont-elles repris ? » Le sous-préfet rappelait le blocage diplomatique depuis le 21 mars « en raison de multiples raisons de politique intérieure aux Comores », et expliquait que si les reconduites avaient bien repris, elles se faisaient avec un nombre encore limité de bateaux, « nous visons les reconduites régulière comme avant la crise, et ça avance dans le bon sens. »
Un accueil, hébergement compris
Et parallèlement aux reconduites, son travail à lui s’est poursuivi : « Crise ou pas, nous sommes au même niveau d’interpellations et de procédures administratives d’Obligations de Quitter le Territoire Français, 12.000, que l’année dernière. La seule différence, c’est qu’au bout de 3 jours au Centre de Rétention Administrative (CRA), nous étions obligés de laisser repartir les personnes », avant la reprise récente des reconduites. La Police aux Frontières et le GAO, le Groupe d’Appui Opérationnel, diversifient leurs horaires d’interventions, « jeudi, c’était en fin d’après-midi à Mtsamboro ». Sur deux mois à Koungou, 170 opérations LIC de police et de gendarmerie ont été menées, « 107 personnes sont parties au CRA ».
Son job, c’est aussi de démanteler des filières bien implantées sur le territoire, créant à elles seule un véritable appel d’air, on parle des marchands de sommeil, des reconnaissance frauduleuses de paternité, du travail illégal : « Il ne faut plus que des habitants aux Comores puissent se dire, ‘je prends le bateau, un taxi va m’attendre, une case, et une attestation frauduleuse d’hébergement’. Si nous arrivons à briser ces ressors, nous serons efficaces ».
« Les enjeux énormes, partout à Mayotte »
Il assure que les services de l’Etat et la justice tapent « fort et vite », avec des condamnations pouvant aller jusqu’à 15.000 euros par travailleur non déclaré et en situation irrégulière : « L’enjeu est la stabilité de l’île et son développement économique. Qui sont impossible si on conçoit des infrastructures qui reçoivent en réalité le double d’utilisateurs. » Rappelons que la commune de Koungou avait bénéficié d’un jugement favorable sur son refus de scolarisation d’enfants, au regard du nombre d’inscriptions dépassant les capacités des écoles, qui aurait impliqué « la construction de 63 classes supplémentaires dans le 1er degré », avait souligné le jugement.
La commune a fourni une liste de quartiers d’habitats insalubre où sont implantées des constructions illégales, « vous allez nous indiquer les trois zones à prioriser, en raison de trafic ou autre. Les enjeux sont tellement énormes partout sur le territoire de Mayotte qu’il faut agir avec méthode. »
Lors des échanges, la DGS de la mairie approuvait le caractère « opérationnel et concret » de la démarche du sous-préfet, « c’est rare ! »
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
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