Mineurs en danger sans famille sur le territoire : un des thèmes clé des 3èmes Rencontres territoriales de la Protection de l’enfance

Combien y a-t-il de mineurs sans adultes référents à Mayotte ? Leur prise en charge est-elle adaptée au territoire ? Comment initier le rapprochement familial ? On attend beaucoup des 3ème Rencontres territoriales de la protection de l’enfance qui réunissent les acteurs territoriaux, régionaux et nationaux.

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Alors qu’en métropole des associations humanitaires s’inquiètent de la création d’un fichier national biométrique des mineurs non accompagnés qui permettrait de remettre en cause la minorité de certains d’entre eux, à Mayotte la question de la protection de l’enfance n’en est encore qu’à ses balbutiements. Ignorée pendant des années par le conseil départemental dont c’est la compétence, « on doit rattraper 10 à 20 ans de retard », rappelait ce vendredi Antoissi Abdou-Lihariti, directeur de l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE), elle se structure peu à peu, notamment grâce aux moyens financiers de rattrapage débloqués par l’Etat.

La priorité à Mayotte, fut la prise en charge des mineurs isolés, désormais appelés mineurs non accompagnés. Le sociologue David Guyot les avait dénombrés à 3.000 en 2012, un chiffre revu à la hausse en 2017, qui portait à 4.000 mineurs avec des différences de gradations de leur isolement. La plupart déclarent un adulte apparenté, « ils sont 300 à être vraiment isolés, et sont donc automatiquement pris en charge par l’Aide sociale à l’Enfance », confirme Antoissi Abdou-Lihariti. Un chiffre « raisonnable », « qui doit permettre de traiter leurs cas », pour le sous-préfet à la Cohésion sociale Dominique Fossat,

Mais les 600 enfants placés, dont bientôt 400 à la récente AEMO ne recouvrent pas toute la problématique. « Nous sommes mauvais en relais d’information préoccupante », réitère Issa Issa Abdou, 4ème vice-président, rappelant aussi qu’un mieux est à attendre avec la nomination d’une directrice dédiée. Mais aussi parce que parmi tous ces enfants, une bonne partie n’est pas isolée, mais en danger pour d’autres raisons, « l’ASE prend en charge tous ceux qui sont victimes de violences dans leur propre famille ».

« La question nous dépasse ! »

Issa Abdou, initiateur des 3è Rencontres, et Dominique Fossat

L’enjeu, ce sont les parents à Mayotte plus encore qu’ailleurs. « Le rôle de l’Aide sociale à l’Enfance, c’est de travailler avec les parents, car l’enfant a besoin de sa famille. Or, à Mayotte, c’est fréquent qu’il n’y en ait pas. Comment fait-on ?! La question nous dépasse », interpelle Antoissi Abdou-Lihariti. Un sujet qui va nourrir les échanges des Rencontres territoriales de la protection de l’enfance proposées par le conseil départemental dès ce mardi. A l’issue des précédentes rencontres il y a 2 ans en Guyane, Mayotte a proposé de les organiser et d’intégrer à l’instar de ce département français d’Amérique du sud, le Conseil National de la Protection de l’Enfance.

Initiateur de ces rencontres, Issa Abdou prenait le relai, « la loi de 2007 parle de l’intérêt supérieur de l’enfant qui doit retrouver sa famille biologique, mais la plupart des familles ne sont pas ici, il faut mettre en place le rapprochement familial. Autre point, la famille d’accueil est sollicitée en métropole quand on a tout essayé, or, ici ça reste la norme et les enfants restent placés sur une longue haleine. » Décalage supplémentaire avec la loi selon eux, quand la famille est présente à Mayotte, mais qu’elle vit dans des conditions précaires, « l’intérêt supérieur de l’enfant commande de le laisser dans la famille d’accueil. »

Pour Dominique Fossat, ce n’est pas la loi qu’il faut adapter, « elle est complète notamment sur le placement par le juges et les modalités de prise en charge », mais son application, « on est confronté ici à des réalités spécifiques, il faut faire évoluer les outils ». Espérons que des solutions émergent de ces rencontres.

Un quart des SDF était des enfants placés

Les principaux acteurs des rencontrent donnaient leur top départ pour ce mardi

Des outils propres au territoire seraient un must, car la prise en charge en métropole doit être considérablement améliorée si l’on en croit une statistique de l’INSEE en 2013, l’Insee, qui dit que « près d’un quart des personnes sans domicile fixe (23?%) étaient d’anciens enfants placés ».

Autre problématique, si la prise en charge se met peu à peu en place au Département, il faut endiguer le phénomène et faire en sorte que lorsqu’ils sont expulsés, les parents ne laissent pas d’enfants sur le territoire, « un dispositif est mis en place pour que de nouveaux cas ne soient créés, avec l’intervention de Mlézi Maoré et Solidarité Mayotte qui s’entretiennent avec les parents lors des reconduites », rapporte Dominique Fossat.

Des pointures sont attendues lors de ces 3èmes Rencontres territoriales de la protection de l’enfance à Mayotte. Notamment Jean-Pierre Rosenczveig, Président du Tribunal pour enfants de Bobigny, ou Pierre Verdier, Avocat du barreau de Paris.

Antoissi Abdou-Lihariti disait toute la difficulté de travailler avec les parents

La journée de mardi 26 novembre sera consacrée à une « Introduction au territoire », au Centre Universitaire de Formation et de Recherche (CUFR), de 8h30 à17h, avec une conférence-débat, 3 ateliers réflexifs, et une session d’échange en plénière. Le mercredi 28 novembre, au « Dispositifs d’accompagnement de l’enfance », et le jeudi 29 novembre, à une journée Outre-mer.

Voir le Programme rencontres territoriales.

Anne Perzo-Lafond

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