Les questions que vous vous posez sur le nouveau volcan

La découverte d'un volcan sous-marin au large de Mayotte pose autant de questions qu'il en résout. Nous avons listé plusieurs points d'interrogation qui émergent (elles !).

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De nouveaux échantillons ont été prélevés. Ici, un bloc de lave remonté de 3.000 m de fond par le Marion Dufresne lors de la mission MAYOBS1

Où en est-on de l’enfoncement de Mayotte ?

A l’heure actuelle, l’île de Mayotte « s’est enfoncée de 13 centimètres depuis juillet » indique Nathalie Feuillet, cheffe de mission à bord du Marion Dufresne et physicienne des observatoires à l’Institut de Physique du globe de Paris. Ce déplacement est « rapide » à l’échelle géologique. « Ces mouvements pourraient être expliqués par la vidange d’un réservoir profond, à environ 40km de profondeur » poursuit la géologue.

L’essaim de séisme a-t-il évolué dans son intensité ? Est-ce que ça semble se calmer ?

Après une accalmie, le phénomène a repris en septembre, sans vraiment évoluer depuis

Plusieurs variations d’intensité ont été observées depuis le début de l’essaim de séismes en mai 2018. Après un début très impressionnant en mai-juin, une accalmie a été observée en juillet et août. Dès septembre, l’activité a repris avec des magnitudes plus modérées et des séismes plus espacées. Depuis, l’activité est globalement stable, avec de courtes périodes d’accalmies suivies de réveils. D’une manière générale, rappelons que ni un séisme, ni un essaim, ne sont prévisibles. Le phénomène peut donc s’arrêter subitement, ou se poursuivre pendant une durée indéterminée. En témoignent les surprises que réserve fréquemment le Piton de la Fournaise, qui prévient quand il se réveille, mais peut se rendormir sans prévenir et se réveiller de nouveau quelques jours plus tard.

Le volcan découvert va-t-il créer une île ?

Nathalie Feuillet, de l’IPGP

La question a été maintes fois posée aux scientifiques, et la réponse a quelque peu évolué dans la forme. Jusqu’à il y a peu, les géologues affirmaient qu’une île était peu probable à l’échelle humaine. Il aurait fallu disaient-ils, une quantité énorme de magma, et surtout, des millions d’années. La découverte du volcan change la donne. En atteignant en un an la taille non négligeable de 800 mètres de haut pour 4km de large, il ne lui faudrait à ce rythme que trois ans supplémentaires pour sortir la tête de l’eau. Sacré bébé !

Toutefois il est aussi possible que ce volcan ait d’ores et déjà arrêté sa croissance. Le Marion-Dufresne a en effet découvert « plusieurs dizaines de cônes volcaniques dans une zone de 10km de diamètre, tous datés de moins d’un million d’années » et « tous environ de la même taille ». Ce nouveau volcan, pour l’heure similaire à ses grands frères, pourrait donc suivre le même chemin et rester sagement au fond avant de se rendormir. Il reste environ 2700m d’eau au dessus du cratère avant d’atteindre la surface.

Que sait-on sur la composition de ce volcan ?

Un bloc de lave remonté par le Marion Dufresne

La drague dont est équipé le Marion Dufresne permet des prélèvements en eaux profondes. Ainsi, les scientifiques ont-ils pu remonter des fragments de lave durcie. Certains, chargés de gaz en dépression, ont explosé en sortant de l’eau. D’autres, noirs et criblés de bulles, ont été présentés à la presse. L’analyse de ces échantillons va permettre de déterminer précisément la nature de l’éruption, la profondeur et l’origine des roches que crache le volcan.

Qu’en est-il des poissons morts, il y a des gaz, de la fumée ?

En naviguant au dessus du volcan, le Marion Dufresne a analysé l’eau à l’aide d’un sonar. Celui-ci a détecté des « fluides » entre le navire et le volcan. Plus précisément, ils ont détecté « une anomalie d’impédance acoustique » (à vos souhaits) qui indique que quelque-chose s’échappe du dôme volcanique. Pour l’heure, ni la hauteur de ce panache, ni sa composition ne sont connues. Ces données font partie des éléments qu’il reste à définir précisément.

En attendant, aucune restriction de navigation n’a été ordonnée, le passage du Marion Dufresne n’a pas établi de risque spécifique en l’état actuel des connaissances. Les pêcheurs sont en revanche invités à signaler d’éventuels nouveaux poissons morts qu’ils pourraient observer.

Qu’ont révélé les sismomètres installés au large ?

Le nouveau volcan de 800m de haut indiqué par une flèche

C’est sans doute un des points les plus intéressants de la mission scientifique menée depuis deux semaines par le Marion Dufresne. Dès son arrivée sur zone, les sismologues ont relevé les 8 appareils disposés au fond de la mer pour en analyser les données. Un travail « 24 heures sur 24 » indique la cheffe de mission, qui a porté ses fruits. Il en ressort que les épicentres ne sont pas situés entre 30 et 60km de Mayotte comme on l’a cru depuis un an, mais à seulement 10km de notre île ! « Les séismes forment un essaim restreint à une dizaine de km de Petite Terre » indique Nathalie Feuillet. Toutefois pas de panique, car s’ils sont plus proches en distance « épicentrale », c’est à dire à l’horizontale, ils sont plus loin que prévu en « distance hypocentrale », c’est à dire en profondeur. Les séismes, qui peuvent être dus à la rupture des roches au passage du magma vers le volcan, sont situés désormais à des profondeurs de 20 à 50km. Une donnée intéressante autant que surprenante. Jusqu’alors « on avait l’habitude de chambres magmatiques situées dans les 20 premiers kilomètres » s’étonne la géologue.

Ces nouvelles données renforcent le caractère fascinant de ce phénomène naturel hors normes. A tel point qu’il ne serait pas étonnant de voir débarquer prochainement des chercheurs du monde entier, attirés par ce cas scientifique majeur. Un tourisme assez inattendu pour Mayotte, mais qui ne ferait pas de mal.

Y.D.

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