Coup de poker sur la formation professionnelle

Un séminaire sur la réforme de la formation professionnelle a lieu pendant deux jours à l'hémicycle Bamana. Les changements devraient favoriser les salariés des petites entreprises, mais le défi est loin d'être gagné.

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La réforme crée un quadripartisme entre Etat, Département, et partenaires sociaux

 C’est une réforme « très complexe » à expliquer de l’aveu de Régis Roussel, juriste expert pour l’organisme de formation Centre Inffo (contraction de « information formation »). Le conférencier est amené à expliquer les tenants et aboutissants du vaste sujet de la formation professionnelle à ceux dont c’est justement le métier : Pôle Emploi, agents du Département ou de la Dieccte, partenaires sociaux… « Puisqu’il y a cette réforme de la formation professionnelle, l’enjeu de ces deux jours est d’expliquer ce qu’elle change » explique le formateur en informations sur la formation qui précise que depuis 2018, la loi a fait l’objet de pas moins de 80 décrets qui la précisent et la développent. Tout un programme.
Au coeur de ce pavé indigeste et peu abordable pour le commun des mortels, un « big bang de la formation professionnelle » selon l’expert. En simple, ce domaine qui était géré par les collectivités locales (région ou collectivité territoriale en outre-mer) ne le sera plus, un quadripartisme est mis en place entre la collectivité, l’Etat, et les partenaires sociaux, patronat et salariés. Le financement de la formation change aussi. Les OPCA comme Opcalia ne sont désormais plus des organismes collecteurs. La réforme complexifie considérablement la gestion de l’argent cotisé par les entreprises, puisque ces sommes seront versées pour Mayotte à la CSSM, qui les reversera à son tour à un organisme ad hoc appelé « France Compétences » qui reversera à son tour l’argent aux organismes de formation, comme les OPCA. Ah non, comme ce ne sont plus des organismes collecteurs, il faut désormais les appeler OPCO. Quant à Opcalia, on s’est demandé si ça allait du coup s’appeler OPCOLIO ? Hé bien non. Quelqu’un a trouvé que ce serait plus simple de changer le nom en ESSFIMO, pour « entreprises et salariés des services à forte intensité de main-d’oeuvre* « . Sisi.

Autre changement de taille, les entreprises de plus de 50 salariés continueront à cotiser à ce système de répartition, mais n’en bénéficieront plus. Ce sera à elles de payer leurs propres formations. Pourquoi ? Pour aider les petites entreprises, de moins de 50 salariés, à offrir des formations à leurs employés. Problème, ce sont précisément les entreprises qui font le moins appel à des organismes de formation, et cette réforme posera un enjeu de taille : pour assurer une formation, il faut remplir une classe. Et s’il n’y a pas de demande, où ira l’argent ? Officiellement « l’objectif majeur de la réforme est de faciliter l’accès à la formation pour les moins qualifiés et développer l’apprentissage qui devient une filière d’excellence pour la formation » poursuit l’expert.

Régis Roussel est juriste expert en formation professionnelle

Si les entreprises sont demandeuses et donnent vie à cette réforme, ce sera un gain pour les 69% de jeunes qui à Mayotte quittent l’école sans aucun diplôme. D’autant que le taux de chômage des 15-24 ans atteint 53%. A Mayotte, seules 43 entreprises ont plus de 50 salariés, et à peine 3 dépassent les 500 salariés. Les quelque 2000 autres sont donc dans le viseur de la réforme et font de Mayotte un des territoires où elle aura le plus de sens.

Y.D.

*  Opcalia précise que « le nom essfimo pour opcalia, c’est un « nom de code », de transition, et pas le nom officiel. Si vous pouviez corriger cette erreur svp. Le nom final sera connu dans les prochaines semaines ».

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