L’hôtel Trévani, le challenge de trop pour Tanchiki Maoré ?

« Je suis fatigué, je ne peux plus supporter cette charge tout seul ! ». Tanchiki Maoré est parti prendre quelques jours de vacances, et tient un discours qu’on a peu l’habitude de lui entendre. A côté de sa florissante société MAP, la reprise de l’hôtel Trévani connaît une gestion plus chaotique, touchée notamment par les évènements sociaux de 2018.

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"Vous avez réussi à décourager le meilleur entrepreneur de Mayotte", affichaient les banderoles

Tanchiki Maoré incarne la pleine réussite Mahoraise, avec une histoire à faire fondre n’importe quel « bouffeur de patrons ». Parti de quasiment rien sous la forme un camion rouillé, qui, repeint en rose, s’est vite trouvé des petits frères flambants neufs au fur et à mesure que la société Maoré Assainissement et Propreté (MAP) grossissait, cet ancien soudeur a peu à peu diversifié son activité. Furent alors créées MIP, Maoré Intervention et Propreté, puis Bling bling, qui pavane avec ses deux limousines de location, et enfin, le rachat de l’hôtel Trévani. C’est ce dernier ainsi que leur patron, que les salariés voulaient défendre en descendant dans la rue ce lundi.

Celui qui a décroché un concours Talents national en 2010, a repris la gérance de l’hôtel Trévani en 2017, un emplacement de rêve sous exploité, avec des bungalows délabrés et une restauration approximative. « Il fallait y effectuer prés d’un million de travaux », nous résume-t-il au téléphone. Fort de ses 400.000 euros de fonds propres, la BFC lui octroie un crédit de 500.000 euros, et le conseil départemental abonde a minima avec 50.000 euros. Il rembourse également les dettes selon un échéancier, « j’y parvenais sans problème. » Mais 2018 passe par là, il nous avait d’ailleurs alerté sur les conséquences que lui faisait peser le conflit social. « Je me suis retrouvé à devoir payer 37 salariés sans aucune activité », il contracte un dernier emprunt de 300.000 euros. « J’ai relancé l’activité, mais les dettes sociales demeurent ».

« C’est à notre tour de lui renvoyer l’ascenseur »

Tanchiki Maoré récompensé par la fondation MMA en 2016, un trophée reçu des mains de Jean-Pierre Raffarin

Des dettes sociales qui sont un effet bloquant inconditionnel à l’obtention du moindre fonds européen ou même national, comme le fond d’urgence débloqué en 2018 pour soutenir le secteur économique. « La Caisse de Sécurité sociale a toujours recherché activement une solution à mon cas, mais en proposant un échéancier sur 3 ans, qui serait encore trop lourd. »

A ces difficultés s’ajoutent celles que pose son extension sur le domaine public maritime en l’occurrence la plage, « la DEAL est en effet passée, avec une démarche plutôt conciliante, puisqu’ils vont régulariser ce qui peut l’être, et annoncent détruire le reste. Mais ils visent notamment le mur qui longe l’établissement, évite les incursions, et surtout l’inondation des bungalows lors des grandes marées hautes. »

Dans la rue ce lundi, il y avait bien sûr les salariés de l’hôtel, et en soutien, une petite partie de MAP, mais aussi des représentants d’associations de la commune de Koungou. « Je suis là parce que Tanchiki est le seul à nous aider, et que c’est à notre tour de lui renvoyer l’ascenseur. Il nous a notamment financé l’achat d’un bus pour les joueurs », explique Djamil Abdallah, responsable du club de football USCJ à Koungou.

La paix sociale contractualisée

A la suite des annulations de réservation, l’hôtel avait dû fermer en avril 2018

La dimension sociale de l’entrepreneur est en effet largement à prendre en compte. Depuis les émeutes sociales de 2011, il se pose comme un grand frère bienveillant pour les jeunes désœuvrés au sein de la commune. Alors que les caillassages sont toujours légion, il décide en 2012 d’organiser le One man show de l’humoriste Gohou sur le stade de Koungou un événement classé à l’époque à très haut risque par les forces de l’ordre. Le service de sécurité de l’événement est assuré notamment par les jeunes désœuvrés de la commune, la soirée est une réussite.

Un modèle qu’il a dupliqué depuis au cours de nombreuses soirées, il reverse environ 200.000 euros par an aux associations sportives ou culturelles de la commune, « j’accompagne, mais en échange, je demande la paix sociale. Il organise notamment des opérations mensuelles de nettoyage avec les jeunes, « je leur donne 20 à 40 euros chacun pour qu’ils survivent, et désormais, au travers d’une association que je viens de créer, nous leur trouvons des formations en collaboration avec le CCAS de la commune. Ces jeunes sont plus nombreux que nous, si nous ne nous en occupons pas, nous aurons des caillassages comme à Doujani ou en Petite Terre il y a 10 jours ! »

Tanchiki Maoré (en polo rouge) participe au partenariat entre les clubs de foot USCJ et Méral-Cossé

Avant même que se déroule cette manifestation de soutien, le chef d’entreprise avait reçu une proposition d’accompagnement de la préfecture, « dès que je rentre de vacances, je dois leur apporter mes bilans pour finaliser une solution. » Mais ce challenge de l’hôtel Trévani l’a déjà usé prématurément, « je veux sauver les emplois, mais ensuite, je réfléchis à m’y investir de manière différente. Pourquoi pas dans le cadre d’une cogestion, je ne peux plus gérer ça tout seul. »

Les salariés sont montés à, la préfecture et au conseil départemental, « sans blocage, ni violences », nous ont-il précisé. L’élu présent leur a expliqué que le dossier serait examiné à la prochaine assemblée.

Anne Perzo-Lafond

8 Commentaires

  1. Au lieu de privatiser la plage avec soit disant un poste de surveillance ou il n y a jamais eu de surveillant.
    Au lieu de faire des salles de concert et de faire venir des « stars », il suffisait juste de proposer une carte et un service correct au resto et de refaire les chambres correctement.
    Au lieu de ça, on préfère le bling bling, voilà le résultat…🤨🤨😓

    • Effectivement, beaucoup de bling-bling et de matuvu par contre les bungalows ont l’air toujours aussi pourris. Faire fonctionner un resto est un peu plus compliqué qu’une entreprise qui dispose d’un quasi monopole de l’assainissement. Quand au « poste de surveillance », qui est en fait une excroissance VIP de la terrasse (encore du bling bling) je me demande comment on a pu laisser faire ça sur une plage publique… ça aurait pu être un endroit sympa et convivial, il en a fait une plage privée barricadée un peu ringarde

    • Toumbou Lissilamou Jaloux de koi? D un échec??😅
      Je souhaite toute la réussite aux bonnes initiatives.
      Mais la, c est du n importe quoi, c est un hotel/restaurant donc commençons par améliorer l existant plutôt que de faire du béton et de la tôle partout et de privatiser l espace public etc😅😅😅

  2. Il faut que les autorités compétentes soutiennent ce jeune mahorais pour son implication de la vie économique mahoraise il a le mérite..!! encourageons nos entreprises mahoraise à fleurir c’est une fierté pour nous tous pour cette île qui a tant besoin de l’entreprenariat..!!!

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