
La réunion aura permis d’exprimer beaucoup de choses, mais aussi de confronter les uns et les autres à de réels motifs de frustration. Face au problème endémique des violences entourant les établissements scolaires, le manque de moyens financiers et humains est rappelé à l’envi. Que ce soit par l’Etat concernant la présence en gendarmes, par le rectorat qui n’a que « trois équipes mobiles de sécurité à partager avec le collège de Mtsangamouji » ou par la commune sur la question de la vidéo-surveillance et des patrouilles de police municipale. Avec seulement 6 policiers municipaux pour un vaste secteur, impossible de patrouiller efficacement aux abords du lycée et du collège de Dzoumonié à chacune des nombreuses heures critiques évoquées par les élèves : à l’aube quand le car arrive, le soir entre la fin des cours et l’arrivée du bus, le vendredi après-midi, souvent propice aux affrontements…
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Pour tenter de remédier à ce premier problème des agressions le matin et le soir, le directeur de cabinet du préfet Jean-Baptiste Constant propose des moyens humains au proviseur Thierry Le Queau. L’idée : ouvrir l’établissement plus tôt le matin, afin de mettre les élèves à l’abri. « Il faut les mettre à l’abri, insiste le sous-préfet. Si c’était mes enfants, je serais le premier à ne pas être content ».
Cette idée rejoint celle prise à Kawéni d’ouvrir la MJC pour y abriter les élèves qui arrivent à l’aube et doivent attendre l’ouverture des grilles du lycée professionnel.
« On est dans le danger »
Mais cette proposition ne règle pas le problème principal, qui réside dans le cercle vicieux de la violence. Premièrement, tous les cours n’ont pas lieu dans l’enceinte du lycée. « Notre classe, c’est dehors, témoigne Vincent Deprés, professeur d’EPS. Quand on sort de l’établissement, on va au devant des problèmes ».
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L’enseignant relate deux agressions survenues en l’espace de 10 jours dont il a été victime ainsi qu’un de ses collègues alors qu’ils se rendaient à la plage de Trévani pour des cours de Kayak. Son collègue a reçu une pierre qui lui a fracturé la machoire explique-t-il. « On a trouvé une parade, on suspend les cours, on ne peut plus y aller. Le problème c’est qu’il y a une épreuve qu’on va bien devoir organiser. Actuellement, on a dépassé le sentiment d’insécurité, on est dans le danger ».
Pour lui, le problème vient notamment de « jeunes désoeuvrés qui n’ont rien à faire de leur journée et ont un ressentiment envers la société et envers les autres jeunes qui étudient, et ils l’expriment en caillassant ». « On est d’accord sur le diagnostic » répond le sous-préfet qui déplore devoir mettre « pansement sur pansement ».
Mais ce dernier fait aussi le lien avec les violences du matin-même à Tsoundzou. « C’est parti d’un bus en panne, et là j’ai 6 policiers et gendarmes blessés, dont un est encore à l’hôpital ». Il s’agissait pourtant de jeunes scolaires, par de l’archétype du gamin désœuvré et sans repère.
« S’il caillasse le bus, ça lui retombera dessus ? »
Un des représentants des élèves du lycée avait d’ailleurs cette question à poser. « Un élève m’a demandé, il a été aspergé de gaz lacrymo depuis la fenêtre d’un bus, mais qu’est ce qu’il peut faire, s’il caillasse le bus, ça lui retombera dessus ? »
Stupéfaction des adultes face à cette logique de violence et de représailles. « On ne répond pas à la violence par la violence » réplique le proviseur. « Il faut porter plainte » martèle à son tour Jean-Baptiste Constant qui exprime sa volonté de « mieux communiquer sur la pré-plainte en ligne ».
Mais beaucoup d’élèves ne portent pas plainte. « Beaucoup de nos élèves sont sans papiers et ont peur de rentrer dans une gendarmerie, on a régulièrement deux ou trois élèves qui sont ramassés par la PAF, y compris aux abords des établissements » indique un agent du lycée.
Alors la réponse la plus spontanée, c’est la vengeance, et tout ce qui va avec.
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« On a de plus en plus d’élèves qui s’arment pour se défendre » confirme un enseignant qui trouve dans les sacs de ses élèves « pierres, ciseaux, lacrymos… on est dans la préparation de la riposte ».
C’est donc tout un écosystème de la violence qui va devoir être pris à bras-le-corps par les différents acteurs, bien au delà d’une seule réponse judiciaire envers les « jeunes désœuvrés ». Un travail qui ne peut se faire qu’en équipe, notamment avec le Département dont l’absence était regrettée à ce rendez-vous.
Y.D.
Il faudrait peut-être penser à faire des routes pour désengorger tout ce monde sur la route.
Comme ça, les bus ne seront pas obligés de partir trop tôt
Le département a été informé ?