C’est chacun dans leur coin de confinement que les signataires de la convention pour la Cellule d’urgence aux entreprises la présentaient ce vendredi aux médias. Une audioconférence réussie, et « inédite » dans sa forme, soulignait le préfet Jean-François Colombet.
En comparaison des 75 millions débloqués à La Réunion conjointement par l’Etat et la Région, la somme qui oscille entre 2 et 7 millions pour Mayotte, paraît ridicule. « J’ai demandé à la ministre des outre-mer une dotation d’un million d’euros, ajouté au même montant débloqué par le Département, nous devrions compter sur 2 millions d’euros », annonce le préfet. Le conseil départemental compte abonder davantage, sans chiffre précis encore. Pour le préfet, ce n’est pas le montant qui compte, mais ce qu’on en fait, « s’il faut davantage que 2 millions d’euros, nous mettrons davantage », nous assurait-il à l’issue de l’audioconférence.
Comme dans tous les départements, le Fonds national de solidarité de l’Etat de un milliard d’euros va octroyer 1.500 euros par entreprise. Le Département qui assume les compétences de la Région à Mayotte, versera une somme équivalente, indiquait Ben Issa Ousseni, vice-président en charge des Finances, « le montant n’est pas encore fixé, mais l’enveloppe globale sera de 3 à 5 millions d’euros en appui pour les Très Petites entreprises. »
Entrera aussi en jeu un fond de garantie de l’Etat, qui se monte à 300 milliards d’euros pour le pays, et qui vient appuyer les mesures que déclinait le préfet. Un guide explicatif a d’ailleurs été distribué aux entreprises. Il s’agit d’un dispositif de soutien « inégalé » mis en place par le gouvernement.
Un guichet d’accueil permanent à la CCI
Une partie des entreprises touchées par l’arrêté de confinement relève du domaine des services, restaurants, bars, etc., « elles représentent 30% du PIB de Mayotte ». Pour tous les secteurs concernés par la baisse voir l’arrêt de l’activité, des mesures de soutien à l’emploi sont prises. Un dispositif d’activité partielle* permettra de faire prendre en charge 70% voire plus (un décret doit sortir dans quelques jours) des indemnisations versées aux salariés par l’Etat. Elles auront 30 jours pour déposer leur demande.
Les entreprises qui ne peuvent plus assurer leurs délais de paiement, pourront bénéficier d’une remise d’impôts directs**, « décidés au cas par cas ».
Des reports de loyers, de factures d’eau ou d’électricité, sont autorisés, et leur paiement facilité par la somme de 1.500 euros de fonds de solidarité.
Les chefs d’entreprises qui ne pourraient pas honorer le remboursement de crédits, pourront bénéficier d’un rééchelonnement, « la Banque de France arrive en soutien », ils doivent prendre contact avec la médiation du crédit***, et un correspondant Très Petites entreprises les réorientera vers les réseaux professionnels compétents.
Car les autres signataires de la convention, et leurs partenaires, mettent en place des accompagnements. Outre le conseil départemental, il s’agit notamment de la Chambre de Commerce et d’Industrie (CCI) de Mayotte. « Nous mettons en place un dispositif proche de la cellule d’urgence de 2018, avec un guichet d’accueil**** tenu de 8h à 16h par trois agents, il s’agit de rompre l’isolement des chefs d’entreprise qui ne doivent pas se retrouver seul au monde dans ce contexte », annonce le président Mohamed Ali Hamid. Une enquête sera également menée par ses services pour connaître l’ampleur de la catastrophe économique. La Chambre des Métiers et de l’Artisanat a créé une sous-cellule dédiée aux artisans. La Chambre de l’Agriculture et de la Pêche n’était pas présente, leurs difficultés financières avant la crise n’y étant pas pour rien.
Le secteur bancaire appelé à la solidarité
La Chambre Régionale de l’Economie Sociale et Solidaire (CRESS) qui rassemble 14% des entreprises privées de l’île, « dont 23% des emplois », rappelait Kadafi Attoumani son président, appelait le secteur bancaires à la solidarité, notamment les banques mutualistes ou coopératives de son réseau.
Un appel pas vain à Mayotte où les établissements bancaires sont des antennes de La Réunion avec une prise de décision très centralisée. En témoigne la difficulté que nous rapportait le gérant de l’hôtel Le Caribou à obtenir un rééchelonnement des crédits bancaires. Si comme le dit « sans démagogie » Jean-François Colombet, «on parle d’argent public, donc de nos impôts, qu’il ne faut pas distribuer sans conditions », il faut rester malgré tout vigilant sur ces blocages que nous avons connus lors de plans de crise passés. La conjoncture mondiale va refroidir des ardeurs déjà ramollies ici. Il faut coller à la réalité, comme le montre le décalage entre la volonté de maintenir la vente à emporter pour les restaurants, rendue impossible par leur fermeture au bout de deux jours, faute de clients, confinés chez eux. Relancer leur activité sous entendrait de trouver des solutions de livraison, ou d’autoriser les déplacements des particuliers.
Le nerf de la guerre reste la trésorerie, les collectivités ne doivent pas l’oublier, et, télétravail ou pas, doivent honorer leurs factures.
« La cellule d’urgence doit simplifier les choses pour l’entrepreneur, notamment dans les démarches », concluait le préfet. Tirons des conclusions des précédents flottements, notamment la lenteur avec laquelle s’était mise en place la coordination entre les acteurs et le traitement des dossiers avaient eu raison de la solidité de beaucoup de TPE.
Anne Perzo-Lafond
* Activité partielle : https://activitepartielle.emploi.gouv.fr, et pour toute question relative à l’activité partielle, 976.activite-partielle@dieccte.gouv.fr ou tel la DIECCTE 02 69 61 93 40 ou 02 69 61 48 49
** DRFIP : pour les particuliers: 06 39 29 29 95 et messagerie sip.mamoudzou@dgfip.finances.gouv.fr
Pour les entreprises: 06 39 29 62 55 et messagerie : sie.mamoudzou@dgfip.finances.gouv.fr
*** Pour la médiation bancaire, http://mediateur-credit.banque-France.fr, et pour le conseil aux TPE, TPE976@iedom-mayotte.fr ou au 0269 61 05 05
**** La guichet d’accueil de la https://www.mayotte.cci.fr/ CCI au 0269 50 23 11 ou covid19@mayotte.cci.fr
Bravo la préfecture, on se rassure comme on peut en voulant prendre des mesures économiques « pour l’après crise », quand les mesures sanitaires « avant la crise » ont été bâclées.
Quel économie…?