Aide alimentaire : comment distribuer sans se faire déborder, l’exemple de Chirongui

La crainte des attroupements et de risquer de voir se propager le virus, a provoqué des annulations de distribution alimentaire prévues à grande échelle notamment cette semaine. Nous avons cherché une méthode à dupliquer. A Chirongui, on a peaufiné l’organisation de distribution de bons alimentaires en individualisant l’action.

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D’annulation en report, la distribution d’aide alimentaire subit des soubresauts. Une grosse opération était notamment prévue sur Koungou mercredi par la préfecture, elle a été annulée, nous rapporte le milieu scolaire, après que les professeurs volontaires aient reçu une note. En cause, l’impréparation face à une situation de manque qui risque de grossir les foules à l’heure de la distribution. La situation est compliquée, et le devient chaque jour un peu plus, surtout pour les nombreuses familles qui ont faim et qui ne parviennent pas à s’en sortir. Craignant que les photos semblables à celle de la distribution alimentaire à Dembéni ne circulent jusqu’à Paris, on annule les opérations en sollicitant les communes. Mais ces dernières ne veulent plus compter que sur leurs propres ressources, « nous avons averti la préfecture que nous ne pouvons pas récupérer des repas au dernier moment comme le 4 avril, et tout mettre en place au dernier moment », nous rapporte un maire. Alors comment faire ?

Aux manettes désormais, les communes, les Centre Communaux d’Action sociale (CCAS) et les associations comme Mlézi Mahore, la Croix Rouge ou Mila Istawi. Sur un territoire où seulement 20% de la population vit au dessus du seuil de pauvreté selon les critères métropolitains, il s’agit de secourir ceux qui n’ont plus d’activité économique pour subvenir à leur besoin, avec une couverture sociale en dessous de la moyenne nationale.

Depuis le début du confinement, la maire de Chirongui, Hanima Ibrahima Jouawou invite à privilégier les bons alimentaires. Histoire d’éviter les débordements et les regroupements.

Des lignes prises d’assaut

Enrafati Djihadi préfère laisser les ménages décider de leurs besoins

C’est cette technique qu’a adoptée l’Union Départementale des Associations Familiales (UDAF), comme nous l’explique sa directrice, Enrafati Djihadi : « Nous allons procéder par bons d’achat pour limiter la propagation de l’épidémie et laisser aussi une certaine autonomie aux familles d’acheter ce qui leur manque à la maison. » Elle détient 428 colis et bons alloués par le conseil départemental, et 437 par la Direction de la Jeunesse et des Sports (DJSCS). « Le conseil départemental nous a fourni une liste de bénéficiaires, nous allons les distribuer jeudi et vendredi, en passant par une des associations mandatées, qui fera du porte à porte. »

A Chirongui, un système a été testé, et, après un week-end de surchauffe, semble tenir la route. La DGS Cécile Hammerer le détaille : « Ce week-end, nous avions mis deux numéros d’astreinte d’urgence sociale à destination de la population, mais nous avons été submergé d’appels, 180 en une seule journée. Nous avons donc du ouvrir une troisième ligne*. » Une enquête sociale téléphonique pour laquelle la mairie a mis en place les moyens : 6 agents ainsi qu’un bénévole ont centralisé les appels, et trois ordinateurs sont dédiés uniquement à cette tâche. « Pour chaque appel, nous demandons le nombre d’enfants, le justificatif de domicile, le revenu, etc. Et dans les jours qui suivent, des bons alimentaires seront distribués au domicile, qu’ils doivent contresigner. »

45.500 euros de bons sur deux commerces

Exemple d’un panier type acheté avec les bons de Chirongui et du CD

Les critères d’attribution ont évolué. Si au départ, la nationalité française ou un titre de séjour de plus de 10 ans étaient exigés, les personnes dont le titre de séjour est périmé sont désormais également concernées par la distribution. « Et nous étudions au cas par cas les dossiers de ceux qui n’ont rien. De leurs côtés, les CCAS ont leur liste habituelle de bénéficiaires qu’ils connaissent bien, ils sont suivis. »

La mairie détient 45.500 euros de bons, répartis en 210 bons de 110 euros chaque, 320 bons de 70 euros, « et nous avons recommandé 260 bons de 70 euros ». L’ensemble est cofinancé par le conseil départemental et les communes. De son côté, la préfecture a également alloué des bons d’achat, « ils arrivent chez Mlézi, et ce sont les CCAS qui centralisent tout », ce qui évite les doublons.

Lors de la distribution des bons à domicile, sont présents à la fois les CCAS et Mlézi, « c’est aussi l’occasion de créer ou de maintenir un lien social. Et nous en profitons pour distribuer à chacun une attestation de déplacement dérogatoire afin qu’ils puissent faire leurs courses sans être inquiétés. » Une aide peut également être proposée aux familles qui n’ont pas de moyens de déplacement pour aller faire les courses, uniquement sur rendez-vous.

Les bons peuvent être dépensés dans deux points de vente de la commune, le Sodicash, et un commerce de Tsimkoura, « avec nos recommandations de ne pas y mettre de chips ou de sodas. » Les magasins devraient être suffisamment achalandés pour éponger ce surcroit d’achat, « nous avons échelonné les distribution de bons pour s’assurer de la capacité des stocks. »

Anne Perzo-Lafond

* 06 39 68 16 52 / 06 39 72 44 44 / 06 39 06 53 99

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