Le bio à Mayotte, c’est une évidence pour la plupart des agriculteurs. S’il existe « des travers » liés au maraîchage qui s’apparente à la production intensive comme on la connaît par ailleurs, l’agriculture mahoraise est traditionnellement proche de la terre. « Tous les agriculteurs vivriers font du bio, le jardin mahorais, par nature c’est du bio » analyse Valérie Ferrier, installée à Combani où elle fait du maraîchage mais vise le bio pour le reste de sa production.
Chacun des producteurs présents à Vahibé ce mardi pour signer cet accord partage avec les autres une profonde aversion pour les produits phytosanitaires. Tous rêvent de s’en émanciper pour de bon. Fatima Daoud a deux exploitations, à Chirongui et sur le mont Bénara. « Je fais du bovin, et en végétal, je fais de tout, vivrier, agroforesterie… Mais aussi du maraîchage depuis trois ans car c’est ce qui rapporte le plus de sous » sourit la productrice.
Outre ce dernier point, « du bio, j’en fais naturellement. Mais il y a des clients qui réclament la certification, c’est un plus » constate l’agricultrice. L’accord, appelé sobrement « passeport bio » engage les agriculteurs à s’orienter vers le label bio et à tout faire pour l’obtenir.
En s’unissant dans un même projet, ces agriculteurs répondent à plusieurs enjeux. D’abord, se démarquer sur un marché où il est difficile de savoir où et comment sont produits les fruits et légumes qu’on mange. Ensuite, s’unir pour gagner en efficacité. Commander des matériels spécifiques, vendre sa production, c’est toujours plus facile ensemble. De même la labellisation coûte cher, car elle implique de faire venir un certificateur à Mayotte. S’il peut labelliser une quinzaine de producteurs d’un coup, on cerne vite l’intérêt financier.
Enfin il y a un enjeu d’échanges entre producteurs et partenaires. Le passeport bio est porté par les producteurs bien sur, mais aussi le lycée de Coconi, la Copac, l’Ucoopam et l’établissement public foncier de Mayotte (Epfam). Le but affiché est de « structurer une filière bio de fruits et légumes de la base à la commercialisation ». De quoi répondre à un des critères souhaités par l’Education nationale notamment pour l’approvisionnement des cantines scolaires, et s’assurer une clientèle et des revenus qui devraient inciter d’autres agriculteurs à les rejoindre rapidement, pour une malavoune (campagne) toujours plus respectueuse de l’environnement.
Y.D.