On remet le couvert. Après des mois difficiles pendant la première vague épidémique sur l’île, un regain d’activité avec l’accalmie qui s’en est suivie, le couvre-feu en vigueur depuis jeudi dernier est venu briser les espoirs de reprise économique pour les restaurateurs de l’île. « C’est très difficile, depuis un an les efforts demandés à la profession sont largement supérieurs à ceux des autres secteurs », se désole Charles-Henri Mandallaz. Mais pour le président de l’Union des Métiers et des Industries de l’Hôtellerie de Mayotte (Umih), pas question de jouer les têtes fortes face aux nouvelles règles sanitaires. « Nous allons bien sûr nous y conformer, les données sanitaires sont de toute façon indéniables. Je salue d’ailleurs le très grand professionnalisme des entrepreneurs de la place, c’est dans ce genre de situations que se révèle leur grand sens des responsabilités ».
Car c’est dur, très dur. « La situation du secteur est extrêmement précaire, il y a beaucoup d’entreprises en danger. Pour les entrepreneurs, il n’y a rien de pire que le « stop and go », ne pas avoir de visibilité et toujours naviguer à vue ». Dans leur détresse, les restaurateurs de l’île auront toutefois pu trouver quelques éléments de secours.
La résilience comme atout
D’abord à travers les différentes aides économiques mises en place par l’État comme le fonds de garantie ou l’activité partielle. « Sans ça, énormément d’entreprises auraient coulé », estime Charles-Henri Mandallaz, qui en profite pour lancer une pique à l’égard des assureurs qui… n’ont pas assuré. « C’est aussi grâce au chômage partiel que nous avons pu limiter la casse sociale, on a évité le drame mais c’était essentiel pour nous de pouvoir garder au maximum nos employés. Ce sont eux qui font les entreprises, c’est notre force et tout le monde l’a bien compris me semble-t-il, tout a été fait pour sauvegarder les emplois », soutient celui qui est également patron de l’Orient Express à Kawéni.
Non sans rappeler l’intérêt stratégique de la manœuvre : « c’est aussi cela qui nous permet de repartir au plus vite en cas de reprise de l’activité après les coups durs ». Voilà qui amène à un deuxième élément de réconfort, bien spécifique à Mayotte : la résilience de l’économie mahoraise. Car ici, on n’a pas attendu la crise sanitaire pour vivre des black-out économique. Avec un climat social aussi incertain que l’essaim de séismes, les entreprises du territoire ont ainsi appris à s’adapter et à rebondir dès le moment venu. « C’est là une des forces du tissu économique de l’île, estime le restaurateur, peut-être que pour une fois, les confrères de métropole sont moins bien lotis que nous de ce point de vue là. »
Un accompagnement pour diviser la note
Leur avantage, jusqu’à présent, aura aussi été de continuer à tourner quand l’Hexagone était complètement à l’arrêt. Une permission de sortie de plats que salue le président de l’Umih et qui l’aide à accepter les restrictions du moment. « Si on joue tous le jeu, on pourra faire en sorte que ça dure le moins de temps possible. » Mais « attention, prévient-il, la crise sanitaire ne doit pas effacer le catastrophe économique potentielle ! » Et c’est avec ce mot d’ordre que les professionnels du secteur doivent rencontrer en milieu de semaine les différents services de l’État pour « trouver des solutions tenables à travers les différents mécanismes d’accompagnement ».
De quoi tenir, « jusqu’aux beaux jours, ils vont bien finir par arriver », veut prédire l’entrepreneur. Un accompagnement qui ne remplacera toutefois pas « cette envie de recevoir du monde, d’avoir une salle qui vit, des gens qui s’expriment, à qui l’on donne un moment de plaisir ». Tout un menu qui ne reste, pour l’heure, pas au goût du jour.