Alors que l’on parle de plus en plus de libérer la parole concernant les violences sexuelles, se pose la question de l’outil qui le permettrait. Twitter est largement utilisé, avec des campagnes comme le hashtag #metoo mais l’absence d’anonymat peut être un frein. L’association Hakiza Wanatsa et environ 60 partenaires ont eu l’idée d’un questionnaire en ligne, anonyme, au cœur d’une vaste campagne sur le sujet à Mayotte.
Pour cette campagne, « la stratégie d’intervention retenue propose un déploiement combinant une première période de sensibilisation d’avril à novembre 2021 à une réflexion de fond quant à la prise en charge des victimes de violences sexuelles sur l’île » indique le collectif.
« En préambule au lancement solennel de la campagne, un questionnaire de sensibilisation sur les violences sexuelles, à la connaissance qu’en a la population et à la connaissance du droit sera mis à disposition de chaque personne. Femmes, hommes et jeunes pourront tester leurs connaissances et prendre conscience de la gravité des faits. Une section de ce questionnaire est ouverte à la libération d’une parole au besoin. Les résultats statistiques en seront publiés régulièrement durant plusieurs mois. »
Trois axes ont été définis. Le premier consiste donc à libérer la parole.
« Le collectif mobilisé souhaite impulser la sensibilisation en s’appuyant d’abord sur la signature solennelle, la promotion et la diffusion d’une Charte de l’engagement qui rappelle le droit et les devoirs de protection des adultes envers les personnes mineures. Elle sera proposée à signature à l’ensemble des personnes en situation de responsabilité, avec le but affiché de contenir au mieux les passages à l’acte par ces personnes (prise de conscience et effet auto-coercitif). En amont, un questionnaire préparatoire sur les violences sexuelles est destiné à toute personne en lien avec Mayotte. Il permettra de libérer la parole et d’initier une prise de conscience des éléments juridiques incontournables comme des bonnes pratiques à observer après une agression sexuelle. Ce questionnaire sera aussi un outil statistique innovant pour recueillir des données sur les violences sexuelles à Mayotte et ainsi contribuer à rendre visible la réalité et l’ampleur de ces violences.
La Charte de l’engagement et le questionnaire sont deux mouvements de sensibilisation complémentaires et croisés, descendant pour la charte (du plus grand responsable au plus petit) et ascendant (depuis l’ensemble de la population) pour le questionnaire. La promotion de la Charte de l’engagement et du questionnaire sera appuyée par une campagne graphique et audiovisuelle dès la rentrée de septembre. »
Cette première étape doit ouvrir la voie à une meilleure prise en charge des victimes.
« Si les parcours de signalement et de dépôt de plainte – quoique peu connus – sont opérationnels, en matière de prise en charge d’urgence sur Mayotte, il existe encore trop peu de structures et de lieux dédiés et réservés à l’accueil des personnes en situation de détresse après une agression sexuelle. Sous l’impulsion de l’Axe 1, le collectif mobilisé se propose de mener un diagnostic sectoriel de la prise en charge de ces victimes sur le territoire qui se voudra le plus exhaustif possible. » Dans le même temps « le collectif souhaite engager dès à présent une réflexion sur la manière de résorber un déficit structurel en offre de prise en charge. A cet effet, des éléments de plaidoyer seront dégagés et portés auprès des décideurs pour que soit engagée une politique de prise en charge ambitieuse à Mayotte. »
Ambitieuse, cette campagne se veut » le double pari d’une main tendue à la libération de la parole des victimes et de la mise en place d’outils de lutte contre les comportements délinquants et criminels ».
Par ailleurs, un appel à projet du rectorat vise à sensibiliser les élèves en classe. Des outils pédagogiques sont à cette fin mis à disposition des enseignants.
« L’ensemble des personnels d’éducation du 1er et 2nd degré sont invités dès à présent à se saisir de la thématique pour sensibiliser les élèves autour de notions clés telles que le consentement, la responsabilité parentale et le droit des enfants à être protégés contre toute forme de violence, notamment sexuelle. (…) Les productions des élèves issus de ces travaux seront valorisées lors d’une journée ou demi-journée dédiée et seront ré-utilisées les années suivantes, afin de pérenniser cette action en inscrivant ce combat sur le long terme. »