[Portrait] Hélène Pollozec, sûre douée

À tout juste 24 ans, Hélène Pollozec prend les rênes du groupe d’opposition au sein du Conseil départemental. Une responsabilité qui ne doit rien au hasard au vu de la détermination sans faille et du parcours pour le moins unique qu’elle affiche

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Benjamine de l'assemblée, Hélène Pollozec veut agir en diplomate sans se laisser impressionner.

“Je suis quelqu’un qui aime aller au bout des choses”. Quitte à aller au bout du monde. Assise sur le canapé de sa petite permanence de Barakani Mamoudzou, Hélène Pollozec entame le récit de sa vie. Lequel ne tient pas compte de l’âge pour garnir nombre de pages. C’est à Barakani, justement, que tout commence. En 1997. Hélène Pollozec voit le jour auprès d’un père breton et d’une mère mahoraise. Deux racines profondément ancrées chez la jeune femme et qui la pousseront à s’étendre toujours plus vers de nouveaux horizons. 

Après des années de scolarité heureuses, l’élève brillante et toujours déléguée de classe quitte son collège de MGombani. “Je devais entrer au lycée Bamana mais un élève s’est fait assassiner, c’était la première fois que ça arrivait”, se souvient-elle tristement. “Alors j’ai décidé de partir”. 

C’est le grand saut. Hélène Pollozec débarque à Bordeaux où elle retrouve son grand frère étudiant. “Il a fallu apprendre à se débrouiller sur tous les plans. En fait, j’ai commencé ma vie d’adulte à 15 ans. C’est peut-être pour ça que je me sens prête…”, glisse-t-elle dans un sourire qui illumine régulièrement son visage. Surtout, “c’était un choc pour la petite mahoraise que j’étais. En intégrant le lycée Montaigne je suis tombée à 14/15 de moyenne alors qu’à Mayotte j’étais plutôt habituée à 19, à être la première de la classe !” Qu’à cela ne tienne, l’élève intègre un groupe de recherche en maths avec des étudiants. Et commence à apprendre le chinois. Pourquoi ? “Pourquoi pas, j’ai toujours aimé les langues”, sourit-encore celle qui est aujourd’hui formatrice en langues à la CCI.

La Chine comme terre d’adoption

Comme d’habitude, Hélène Pollozec ne fait pas les choses à moitié. “J’ai pris une année de césure pour partir à Wuhan, dans un lycée chinois”, raconte-t-elle tout simplement. Et pas n’importe quel établissement évidement, celui des Langues étrangères, soit un des meilleurs de Chine. Mahoraise, métro, voilà que la jeune fille devient aussi chinoise par adoption. Les allers-retours ne cesseront plus, tant pour rendre visite à sa “famille de là-bas” que pour progresser encore dans la langue. Alors locutrice, elle profite d’un séjour pour découvrir le Japon, Hong-Kong. Et la Corée, dont elle apprend l’idiome… 

Entre temps, l’infatigable étudiante suit à distance des études de lettres à La Sorbonne, “histoire d’avoir un diplôme français quand même !”. Et de déléguée de classe, elle passe à vice-présidente de l’association des étudiants francophones à Wuhan. “Il fallait s’occuper de tout, pour des étudiants qui venaient de France, d’Afrique ou encore du Canada”, se rappelle-t-elle, certaine d’avoir à cette occasion forgé son sens de l’engagement. 

Ce n’est d’ailleurs qu’à travers ce mot qu’elle envisage aujourd’hui la politique. “C’est avant tout se mettre au service des autres”, explique celle qui se décrit “plutôt centriste”, soit entre sa mère de gauche – élue première adjointe de Raos à Koungou en 2001 – et son père de droite. Engagement donc, mais aussi diplomatie qui pour elle revient à “représenter, échanger, respecter”. Un triptyque qui doit constituer la ligne directrice de sa mandature. Sans pour autant lâcher quoi que ce soit, rappelle la “jusque-boutiste” marquée par Le Prince de Machiavel et héritière de l’implication politique de sa mère. 

Il y en a donc du bagage, chez celle qui a décidé de poser ses valises à Mayotte. “C’est chez moi ici, je m’y sens bien. Je sens que je peux apporter quelque chose en ayant vu ce qu’il se passe ailleurs”, soutient-elle autour d’une petite pique à l’endroit de ceux qui pointeraient son manque d’expérience sans avoir eux-mêmes fait bouger les lignes. “Ici à Barakani, tout le monde me connaît, ma grand-mère habite au bout de la rue, mon oncle de l’autre, tout le monde sait où me trouver et d’ailleurs j’ai décidé de garder cette permanence pour pouvoir toujours recevoir les habitants ici. Il était temps que des élus ressemblent à la population”, poursuit-elle encore. Cette fois, la pique est destinée à ceux qui forment l’entre-soi politique, éloignés des réalités de terrain… Et qui l’auront attaquée maintes fois sur sa “maorité”. Diplomate, c’est en portant chaque jour de la campagne un salouva qu’Hélène Pollozec leur répondra dans un pied de nez. Un peu vexée mais droite dans ses bottes, c’est en “agissant, en se mettant au travail le plus vite possible”, que l’acharnée souhaite encore rétorquer. Sans prononcer le mot d’incompétence – diplomatie oblige – elle dénonce ainsi “les projets qui n’ont toujours pas avancé alors que j’en entendais déjà parler petite”. 

Au travail, toujours

Le piano, la guitare et le ukulélé attendront donc avant de voir Hélène Pollozec s’en emparer à nouveau. Sa vie personnelle aussi. “Je veux justement profiter de l’énergie de

Désormais présidente du groupe d’opposition, Hélène Pollozec promet de mettre « toute l’énergie de [sa] jeunesse » au profit de la population.

ma jeunesse, de ne pas avoir d’enfants pour y aller à fond”, indique celle qui se rappelle les difficultés rencontrées par sa maman maire adjointe pour concilier “engagement” et vie de famille. Mais la diplomate et jeune ambassadrice de Mayotte sait aussi qu’il faudra composer avec les réalités politiques locales. Et les frustrations comme les surprises qui vont avec, à l’image de ce “troisième tour” départemental qui “dépassait tout ce que je pouvais imaginer”. “Nous n’avons pas été les meilleurs stratèges…”, lance-t-elle dans un rire. 

Quoi qu’il en soit “nous sommes certes de l’opposition mais nous sommes élus exactement au même titre que les autres conseillers, nous avons la même légitimité”, martèle la jeune femme qui compte sur les liens “très forts” qui unissent son groupe et qui la lient avec son binôme Sidi Nadjayedine. Groupe au sein duquel elle promet veiller à ce que les intérêts personnels ne viennent pas prendre le pas sur l’intérêt général et à ce que tout le monde “se mette au travail”. “Nous avons demandé à ce que les membres désignés dans les différentes commissions soient obligés de siéger… Je ne sais pas ce que ça va donner mais on a déjà vu que ce n’était pas la priorité de la majorité”. Un petit écart à la diplomatie, déjà. Oui, mais avec le sourire ! 

G.M

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