L’accueil de mineurs isolés crée un « appel d’air » migratoire, selon la directrice nationale de la PJJ

Où l’on reparle d’appel d’air… mais dans l’autre sens. La représentante du ministère de la Justice met le doigt où ça fait parfois mal d’en parler, mais un sujet sous les feux brûlants de l’actualité à Mayotte.

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PJJ, mineurs isolés, Mayotte
"Il faut mesurer le parcours migratoire de ces enfants"

Alors qu’elle était entendue par la commission d’enquête parlementaire sur les migrations ce mercredi, la directrice de la Protection Judiciaire de la Jeunesse (PJJ) a estimé que « la générosité » de la prise en charge des mineurs isolés étrangers génère un « appel d’air » des flux migratoires vers la France, rapporte LCI. Une déclaration qui résonne avec écho à 10.000 km de là, puisqu’à Mayotte le sujet est central.

« Le ministère de l’Intérieur a raison d’être vigilant sur l’appel d’air que constitue notre dispositif de protection de l’enfance, à la fois dans une logique de flux, mais surtout parce qu’il faut mesurer le parcours migratoire de ces enfants, qui sont envoyés parce qu’on sait que l’Europe protège les enfants », et qui arrivent « fracassés », a déclaré Charlotte Caubel, directrice de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ) du ministère de la Justice.

Une déclaration qui ne pourra que réjouir les élus du Département qui appellent régulièrement à l’aide l’Etat sur la prise en charge des mineurs isolés.

En 2020, 9.500 mineurs ont été confiés à l’Aide Sociale à l’Enfance (ASE) en France, contre 16.700 l’année précédente. Une chute qui s’explique par les coups d’arrêt des flux migratoires lors des fermetures des frontières impulsées par la crise sanitaire.

Ecole, Mayotte
Des enfants non scolarisés pris en charge par une association de quartier à Koungou

Un « appel d’air » à double entrée

Les chiffres à Mayotte datent de 2012 et du rapport du sociologue David Guyot, qui estimait à 4.000 le nombre de mineurs non accompagnés. En supposant que le chiffre n’ait pas trop évolué, Mayotte prendrait en charge la moitié des mineurs comptabilisés sur l’ensemble du pays. Avec une grosse nuance, ils étaient 300 « seulement » à être strictement isolés, sans aucun référent adulte. Depuis, l’ASE Mayotte a considérablement étoffé ses moyens, mais nombre de mineurs sont toujours laissés sur le territoire, confiés à des proches par leurs parents lors de leur expulsion. Avec le risque que cette famille éloignée soit dépassée par cette progéniture supplémentaire dans des foyers déjà très peuplés, et que les jeunes finissent par grossir les bandes de délinquants.

Le pittoresque de la situation tient dans la qualification d’« appel d’air », habituellement utilisé pour priver Mayotte d’un alignement des prestations auxquelles elle a droit, brandissant la crainte de l’immigration clandestine. Nous avions titré qu’à force de craindre l’appel d’air, les rouages s’étaient grippés. L’appel d’air se nicherait donc ailleurs.

Si on a du mal à voir où aboutira la réflexion de la représentante du ministère de la Justice, cela a le mérite de reposer clairement le sujet des capacités d’accueil à Mayotte, notamment scolaires, et du suivi de ces enfants, affectif, éducatif, etc. Et d’inciter ici à poursuivre le travail de rapprochement familial avec les parents repartis aux Comores, dans un territoire qui n’est pas en guerre.

Lancée en mai à l’initiative du groupe Libertés et Territoires (LT), la commission d’enquête parlementaire sur les migrations doit rendre ses travaux en novembre.

Anne Perzo-Lafond

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