C’est un bien grand rôle qu’on demande d’endosser au conseil départemental, lui qui n’est excédentaire que depuis le dernier exécutif. Rappelons qu’il n’a pas encore revêtu les habits de Région, et que certains rêvent de voir Ben Issa Ousseni en super président à la Didier Robert, jonglant avec l’actionnariat d’une compagnie aérienne qui insufflerait de la concurrence sur le territoire. Il est aussi attendu sur la desserte maritime, sur le mode de gestion du port de Longoni, sur le transport en commun interurbain… et sans lâcher le social, sa compétence première.
Le nouveau président ne se dérobe pas pour autant, tout fondateur de l’ADIM* qu’il est. On connaît son enthousiasme, il en montre autant pour le projet Zena Airlines des frères Novou, que pour les deux autres, « nous avons trois dossiers sur le bureau, nous les étudions tous les trois de la même manière », nous confie-t-il. Il avait reçu Régis et Julien Novou sur le projet à 25 millions d’une compagnie 100% mahoraise. Il s’appuie sur une étude de marché d’Airbus consulting, annoncée comme un premier jet à la presse, « nous leur avons demandé des précisions sur certains points, qu’ils nous ont indiqué les retravailler. »
Effeuiller la marguerite avec Amelia, Zena ou Ewa
Deuxième possibilité, l’entrée au capital d’Ewa Air. « La direction nous a rencontrés dans le cadre de leur projet de développement régional. » A partir du mois de décembre, la filiale à 51% d’Air Austral va desservir La Réunion depuis Mayotte. Une concurrence directe donc pour Marie-Joseph Malé, et sur un tronçon où le PDG de la compagnie réunionnaise est régulièrement accusé de plumer les mahorais. « Marie-Joseph Malé est prêt à enclencher le processus de mahorisation de la compagnie, je l’ai rencontré, et les parts locales pourraient monter de 49% à 65 voire 70%, nous rapporte Ben Issa Ousseni, ce ne sera pas forcément le conseil départemental, mais nous pourrons créer un partenariat avec la CCI ou un autre acteur ». L’actionnariat mahorais est partagé entre la Chambre de commerce et d’industrie (CCI) et Ylang Invest (Groupe Issoufali). En 2020, la compagnie affichait un bénéfice pour la 5ème année consécutive.
Le troisième projet est porté par AMELIA. Implantée depuis peu à Mayotte où elle a été choisie pour les EVASAN durant la crise Covid, elle a vu son partenariat pérennisé par l’ARS Mayotte. « Ils proposent aussi de mettre d’autres appareils au service d’une desserte régionale. Le mode d’entrée des mahorais au capital concernerait leur société de commercialisation, et non la société d’exploitation qui resterait telle quelle, l’avantage, c’est qu’ils ont déjà tous les agréments. » Un montage « plus complexe » que les deux autres.
En matière de desserte et de concurrence, seul le premier projet concerne les vols nationaux, mais les projets régionaux peuvent enfler peu à peu, on espère pas comme la grenouille de la fable. « En tout cas, je poursuis la logique d’une compagnie aérienne mahoraise », rassure le président Ousseni.
Anne Perzo-Lafond
* Agence de Développement et d’Investissement de Mayotte