« C’est la première fois de ma carrière que je dois me servir de mon arme » déplore le chef de la police intercommunale du sud. Principalement chargé de missions environnementales, le fonctionnaire de 60 ans venait vendredi en appui à la gendarmerie pour aider à interpeller un groupe d’individus recherchés pour un vol avec violence commis peu avant.
Grâce au signalement transmis par les victimes à la gendarmerie et relayé aux policiers municipaux et intercommunaux, l’équipe en patrouille à Bandrélé a identifié un des agresseurs et procédé à son arrestation qualifiée de « virile mais respectueuse » par le policier qui a même reçu des excuses du jeune qu’il a arrêté. Mais alors qu’il se trouvait agenouillé sur ce dernier pour le menotter, un autre membre du groupe a entrepris de libérer son complice. Armé d’une sacoche lestée, il en a porté un violent coup à la tête du policier, sérieusement blessé à l’œil. Au scanner, son arcade sera qualifiée de « puzzle ».
Alors que ce dernier tentait de se relever, le jeune levait à nouveau sa sacoche comme pour « finir » le fonctionnaire, qui a finalement sorti son arme de service, l’a pointé sur le jeune avant de tirer un coup de feu en l’air. L’agresseur a alors pris la fuite pour se réfugier non loin de chez lui en Petite Terre. Il y est finalement identifié et interpellé dimanche par les militaires du GIGN.
Lui et son comparse, les seuls majeurs interpellés du groupe, étaient convoqués ce lundi au tribunal pour y répondre de vol avec violence et violences sur personne dépositaire de l’autorité publique. Présentés en comparution immédiate, tous deux ont demandé un délai pour préparer leur défense. D’où le renvoi au 19 novembre prochain à 14h. Se posait alors la question de l’éventuelle remise en liberté des deux jeunes, nés respectivement en 2000 et 2001 à Bandrélé et Labattoir.
« Les Mahorais sont admirables mais ils subissent trop »
« Nous sommes tous outrés par ce genre de personnes. J’ai eu peut être le bon reflexe mais je ne comprends pas l’état où je suis, j’ai de multiples fractures, je ne sais pas ce que je vais récupérer, des gens comme ça ne doivent pas retourner en liberté » a témoigné le chef de la police intercommunale Jean-Pierre Cadière.
La procureure Sarah M’Buta a elle aussi « demandé la détention provisoire » pour les deux mis en cause, notant que le policier a dû être « conduit aux urgences dans un état grave, on voit encore sur lui la violence des coups qui ont été portés ». Il doit d’ailleurs être évasané sous peu pour sa blessure à l’oeil.
« Il est à craindre un renouvellement des faits », a poursuivi la parquetière. « Il est aussi à craindre des représailles sur la victime, car c’est bien sa qualité de représentant de l’autorité publique qui était visée, on peut enfin craindre de nouvelles violences sur des représentants de l’autorité publique ».
L’avocat de permanence Me Zoubert a tenté en vain d’obtenir le placement sous contrôle judiciaire de ses deux clients. Soulignant qu’ils sont tous deux « français et nés en France, s’ils ne se présentent pas [à l’audience du 19 novembre NDLR] vous avez la possibilité de les juger par défaut, d’émettre un mandat d’arrêt et de les faire incarcérer. La liberté doit rester la règle ».
La présidente d’audience a finalement prononcé le placement en détention des deux comparses, soulignant à son tour « le caractère extrêmement violent et gratuit [de l’agression] dans un contexte d’augmentation des violences sur les forces de l’ordre ».
Pour la victime, accompagnée à l’audience par des collègues policiers mais aussi par des gendarmes, cette nouvelle affaire de membre des forces de l’ordre blessé à l’œil doit être celle de trop.
« Je suis un des fonctionnaires agressés, mais il y en aura d’autres. Ca aurait pu être un gendarme, un policier municipal, cette fois c’était un policier intercommunal. Mayotte va mal pour qu’on ait des personnes qui viennent à se mêler du travail de la police pour tuer du flic. (…) Aidez la police, aidez la gendarmerie. Il faut remettre dans la république ce territoire qui le mérite. Les Mahorais sont admirables mais ils subissent trop » a déclaré l’intéressé à la sortie du tribunal.
Y.D.