Plusieurs rapports étaient à l’ordre du jour en dehors de l’important dossier de remodelage du marché des transports scolaires. Sur ce dernier, Bichara Bouhari Payet avait déjà critiqué l’absence de prise en compte par la majorité du CD des rapports du Conseil économique et social, « leurs interventions ne sont même pas mentionnées au Procès verbaux (PV) des Assemblées. » Elle invitait d’ailleurs le président Soibahadine à convier l’ensemble des élus pour débattre de leurs avis avant les séances.
Les dysfonctionnements de la maison sont régulièrement dénoncés par ses soins au tribunal administratif, « notamment sur les PV de séances qui n’intègrent pas les interventions des élus lorsqu’elles gênent. »
Sur le marché des transports scolaires, certains élus se sont appropriés justement l’avis du CESEM, la preuve que le but est (parfois) atteint. Ahmed Attoumani Douchina notamment, sur la durée d’amortissement des investissement de 5 ans plutôt que 7 ans. Quelques minutes après, il allait être descendu en flèche par la conseillère de Dembéni, pour avoir été choisi pour incarner le Département dans la mise en place de la coopération entre Mayotte et plusieurs collectivités territoriales de métropole et d’outre-mer : « Il nous faut des élus honnêtes comme à La Réunion, qui parviennent du coup à être écoutés par Paris ! » Un écho du rapport de la CRC, pointant l’attribution d’une subvention dans la commune de Kani Keli à un proche de l’ancien président du CD.
Débats autour du Debaa
Ce dernier se défendait : « Je n’étais pas sur le territoire quand mon fils a obtenu cette subvention. J’ai d’ailleurs tout transmis à la CRC. » « Mais je rêve ! », lui lançait l’élue. Quelques décibels au sein de séances aux débats toujours calmes et vernissés, voulus par le président Soibahadine Ramadani.
Un rapport concernait la mise à disposition d’une partie du personnel de l’Equipement (DEAL) au profit du Département de Mayotte pour l’entretien du réseau routier, « avant de renouveler la convention triennale avec l’Etat, nous voulons lancer une programmation pluriannuelle », indiquait le président.
Les comptes de gestion et administratifs étaient adoptés de concert, « car tout concorde », précisait Ben Issa Ousseni, vice-président en charge des Finances. Le résultat excédentaire d’un montant de 44,6 millions d’euros est réaffecté à la section Investissement du budget principal.
Le Debaa, cette danse chantée et rythmée par les voix de femmes, sera-t-elle inscrite au patrimoine de l’UNESCO ? C’est la demande que font les élus, après que de multiples études aient fait ressortir l’intérêt de conserver cette spécificité de chants reprenant les versets du Coran. « Le plus drôle c’est qu’au Maroc, après avoir entendu ces groupes, les autorités ont voulu échanger en arabe avec nos chanteuses, avant de s’apercevoir qu’elles ne le parlaient pas ! », glissait Ahamed Attoumani Douchina. Si le conseiller Chihabouddine disait préférer inscrire le Shengué, « qui a accompagné Mayotte jusqu’à la départementalisation », tous votaient pour cette inscription, moins une voix, celle de Bichara qui s’abstenait.
200.000 euros pour la presse locale
L’élue parle beaucoup, « vous avez dépassé largement le nombre d’interventions autorisées », lui glissait le président, et elle fustigeait même le groupe Somapresse qui « n’est plus un vrai journal depuis que nous l’avons aidé, il ne fait plus son travail de journalisme ! » Une mise en garde envers les autres médias, car c’est bien d’aide à la presse dont il s’agissait avec un budget de 200.000 euros qui sera alloué aux médias en règle avec leurs charges sociales ou fiscales. Ce qui n’était pas le cas de Somapresse (Mayotte Hebdo, Flash Info) lors du versement de la dotation exceptionnelle de 100.000 euros, « mais c’était justement parce qu’ils étaient en situation de faillite », nous fait-on savoir du côté du Département.
En opposante modèle, elle qui faisait partie de la majorité en tant que conseillère LR, l’élue a le mérite de redonner des couleurs aux débats, jusqu’alors très consensuels, le président Soibahadine fuyant la polémique comme la peste. Elle lui est servie au centuple là, avec un peu trop de systématisme malgré tout. Au moins, Chihabouddine se sent-il moins seul, alors que l’ancien président Zaïdani était absent lors de cette séance plénière.
Ce qu’on attend de Bichara Bouhari Payet c’est un rôle de veille, et de dénonciation. Mais attention à ne pas pérenniser une énergie destructrice guidée par une opposition systématique qui menacerait de la rendre inaudible. Le rapport sur le Debaa en est une illustration.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com