Aujourd’hui, vendredi 21 mars, est la première journée mondiale des forêts. L’occasion de nous pencher sur la déforestation dans l’ensemble de l’archipel des Comores, une question primordiale car les conséquences humaines peuvent être très importantes. Explications avec Guillaume Viscardi, responsable de l’antenne mahoraise du conservatoire botanique de Mascarin (CBNM), en route vers Mohéli avec 14 scientifiques, pour un projet de coopération régionale.
Le JDM : En cette journée mondiale des forêts, les botanistes sont sur la mer ! Vous naviguez en direction de Mohéli. Pour quelles raisons ?
Guillaume Viscardi : Nous sommes en route vers Mohéli et précisément le village d’Itsamia qui est connu pour protéger les tortues. Nous nous y étions déjà rendus en 2008 pour faire un diagnostic sur l’état végétal des plages et les problèmes d’érosion. Cinq ans après, nous y retournons pour initier la production de plantes indigènes destinées à revégétaliser ces plages.
Le JDM : J’imagine que vous ne transporter pas des arbres ?
Guillaume Viscardi : On est parti avec du matériel de pépinières, des pots, de la toile d’ombrière, des arrosoirs et des «itinéraires techniques de production», une sorte de mode d’emploi pour cultiver une espèce, de la graine jusqu’à l’arbre qui va être replanté. C’est coopération entre La Réunion et Mohéli avec, entre autres, Kélonia (l’observatoire des tortues marines) et l’IRD (l’institut de recherche et de développement, université de La Réunion).
Le JDM : Quand on regarde l’ensemble de l’archipel des Comores, est-ce qu’on peut dire que les forêts de Mohéli sont mieux préservées que celles des trois autres îles ?
Guillaume Viscardi : La densité de population y est moins forte qu’ailleurs, donc effectivement on y ressent moins les effets de la déforestation. Mais elle a subi les mêmes dommages que les autres îles, il y a une centaine d’année, au moment des plantations coloniales. Il n’y reste pas plus de végétation primaire qu’ailleurs mais l’île est tout de même bien couverte en forêt malgré les défrichements.
Le JDM : La mise en culture de plantes locales, on le voit actuellement à Mayotte, c’est quelque chose qui se généralise ?
Guillaume Viscardi : C’est vrai qu’on essaie de faire germer ça un peu partout, au deux sens du terme. Et aux Comores, il y a un enjeu particulier. Sur Grande Comore, on a le taux de déforestation le plus important du monde. Ca peut aller très vite, et à Mayotte, on n’est pas à l’abri du phénomène. Pour autant, les choses bougent là-bas aussi, ils réfléchissent à la mise en place d’aires protégées terrestres auxquelles on essaie de participer.
Le JDM : Peut-il y avoir des conséquences à Mayotte sur ce qui se passe dans les forêts des trois autres îles de l’archipel ?
Guillaume Viscardi : Biologiquement non. Mais on sait que les impacts sur l’environnement ont des conséquences humaines, et là, bien entendu l’ensemble de l’archipel est concerné. Qui dit déforestation, dit érosion et diminution de la production agricole ce qui peut entrainer des phénomènes de migration. Ca pose aussi la question de l’accès à l’eau : à Anjouan, le nombre de rivières pérennes s’est effondré en 20 ans. On n’y compte plus actuellement que cinq rivières permanentes. Si on ne fait rien, il est évident que les gens vont aller chercher ailleurs ce dont ils ont besoin.
Entretien réalisé par Rémi Rozié.
Voir aussi :
Patrimoine naturel : ils replantent des arbres de Mayotte
Une mission scientifique sur l’îlot Mtsamboro
Tant que l’aménagement d’une place publique commence par la mise à bas d’un manguier vénérable comme on vient de le voir dans le quartier Bandrani à Sada, les dingues de la gâchette (autochtone qui s’embourgeoise, clandestin qui aménage autour de ses tôles, locataire m’zoungou qui veut voir la mer)peuvent faire hurler les tronçonneuses !
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