Le régime très spécial des retraites de Mayotte

Il y avait deux manifs en une ce mardi matin en réponse au mot d’ordre national contre la réforme des retraites. La CGT Ma et Sud Solidaire avaient appelé au rassemblement sur les régimes spéciaux, mais à Mayotte où un retraité moyen ne gagne que 500 euros, l'ambition est la convergence. Le Medef donne des pistes de solutions.

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Les petites retraites, un combat urgent à mener à Mayotte

Sans trop manier l’humour noir, on peut dire sans hésiter que le mot « régime » s’applique à merveille aux retraités de Mayotte qui touchent en moyenne 500 euros de retraite. Il ne reste plus beaucoup en milieu de mois pour remplir son assiette. Donc si en métropole, certains se bagarrent pour conserver les régimes spéciaux de retraite, Mayotte est fana pour abandonner le sien !

Salim Nahouda dispose d’une double casquette de circonstance ce mardi matin, à la fois secrétaire général de la CGT Ma et président de la Caisse de Sécurité Sociale de Mayotte (CSSM). C’est en effet le plafond annuel de la Sécurité sociale (PASS), qui fixe le montant maximum de la pension de base. Il est de 1.814 euros à Mayotte, contre 3.377 euros en métropole.

Peu avaient répondu présent, mais tous les futurs retraités appelaient à un rattrapage, « Aligner les plafonds retraite », « Aligner l’ASPA », affichaient les pancartes. Pour Salim Nahouda, il y a un paradoxe à soulever : « Les salariés cotisent moins qu’en métropole, 4,77% contre 6,90%, et touchent donc une retraite inférieure. Mais le plus étonnant, c’est la cotisation du patronat, bien supérieure ici, 9,9%, contre 8,55% en métropole ! On pourrait réduire l’un et augmenter l’autre. »

Sur le papier, un salarié qui a effectué une carrière complète en cotisant depuis 1987, année zéro de création de la Sécu à Mayotte, peut espérer toucher 907 euros à la retraite. « Mais il n’y en a quasiment pas. La plupart touchent 45% de cette somme, soit 400 euros, c’est à dire un montant inférieur au 434 euros de l’ASPA, l’allocation de Solidarité aux Personnes âgées. »

Partis en cortège vers la préfecture, une délégation a été reçue à 11h par le directeur de cabinet Etienne Guillet.

Inventer le complément de retraite

Salim Nahouda tente de trouver des solutions pour un rattrapage

Nous avons contacté Carla Baltus, présidente du Medef Mayotte, pour avoir le sentiment du patronat sur la question d’une sur-cotisation : « Si nos taux de cotisation sont supérieurs à Mayotte qu’en métropole, le montant du plafond est bien moindre, 1.814 euros contre 3.377 euros. La loi de 2012 a prévu une augmentation de cotisation de 6,5% par an, pour une convergence en 2036. Nous avons toujours dit que nous sommes d’accord pour en accélérer l’échéance, sous réserve que cela ne déstabilise pas l’économie locale. »

Un concept difficile à percevoir. D’autant qu’il faut prendre en compte les négociations qui se sont tenues l’année dernière entre le patronat et le gouvernement, « nous avons obtenu le maintien du Crédit Impôt pour la Compétitivité et l’emploi contre l’assurance que nous abandonnons toute demande d’exonération », rappelle la chef d’entreprise. Or, si en métropole les cotisations pour les retraites sont plus élevées pour les entreprises, beaucoup bénéficient d’exonérations. Difficile de faire machine arrière. « Sauf, si on invente un dispositif propre à Mayotte », relève Carla Baltus.

Carla Baltus appelle à inventer un modèle propre à Mayotte (Image d’archives)

On sait qu’en raison d’un faible nombre de retraités au regard des cotisants, la caisse de Mayotte est excédentaire, avec des sommes repartant en métropole, qui retombe ensuite sous la forme de solidarité nationale. « Au regard de cet excédent, nous pourrions très bien réclamer un complément de versement, poursuit Carla Baltus, avec comme référence, le montant minimum de 1.000 euros de retraite annoncé par le gouvernement pour 2020. Par exemple, le retraité qui touche 500 euros actuellement, bénéficierait de 500 euros supplémentaires. C’est à négocier. »

Le gouvernement peut rétorquer que cette annonce de 1.000 euros ne concerne pas Mayotte où le code de la sécurité sociale ne s’applique pas, « mais nous sommes malgré tout en régime général », fait observer la chef d’entreprise.

Une piste à étudier rapidement, tant que le sujet est dans l’air du temps.

Anne Perzo-Lafond

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