Malgré leurs questions, les juges n’en sauront pas davantage sur l’évasion spectaculaire de 2016 à Majicavo. Ce jour du 5 juillet, trois détenus, fraîchement incarcérés, s’évadaient avec un culot monstre. Pas d’explosifs, d’hélicoptère ou de bac à linge sale pour ces fuyards, mais juste une agilité hors norme et une « détermination féroce » selon les mots du procureur. Alors qu’ils étaient encore au quartier des nouveaux détenus, à l’heure de la promenade, les trois compères qui se connaissent à peine « profitent d’un défaut de surveillance » explique la présidente Faure du tribunal correctionnel. Un défaut de surveillance difficile à expliquer. Toujours est-il que les trois détenus échappent à la vigilance des gardes. A l’aide d’un drap extrait d’une cellule, ils franchissent une à une les clôtures électrifiées et passent par dessus des obstacles en fil barbelé de 4m de haut, avec une facilité déconcertante. Quelques gouttes de sang sur des murs permettront de retracer leur parcours, suivant « des endroits non couverts par les caméras » jusqu’à un accès au toit de la prison. Enfin un dernier mur à sauter, puis une dernière clôture, rendue vulnérable par la présence d’un luminaire que les évadés ont lui aussi escaladé.
En plus du culot, une série de « dysfonctionnements techniques » est aussi pointée par les magistrats. Les clôtures électriques n’auraient pas fonctionné, ou du moins, pas assez fort pour contraindre les fuyards à lâcher prise dans leur escalade. Des alarmes reliées aux grillages ne se sont pas déclenchées, et les gardes ne les ont pas fouillés en les emmenant en promenade, ce qui a permis d’emporter un drap sans éveiller les soupçons.
« C’est étonnant que vous ayez réussi à partir » s’interroge la présidente. Difficile d’imaginer qu’un tel plan ait pu être monté en quelques jours, par des détenus connaissant pas ou peu la prison, et sans préparation préalable. Sauf à avoir bénéficié… d’une succession de coups de bol hallucinante. « On a vu qu’on n’était pas surveillés alors on y est allés » se bornera à expliquer Nassur, le seul détenu qui a été retrouvé.
C’est l’année dernière qu’a pris fin la cavale de ce dernier, après deux ans d’allers-retours entre Mayotte et Anjouan. Deux ans durant lesquels il a poursuivi ses méfaits, notamment des vols avec arme et en réunion pour lesquels il est aujourd’hui mis en examen en attendant un procès d’assises. Il purge aussi une peine de 4 ans de prison, en vertu d’une condamnation prononcée… Un mois après son évasion. Il était alors en détention provisoire depuis à peine 10 jours.
L’évasion est d’autant plus étonnante qu’un de ses compères était lui détenu depuis 24h à peine, et purgeait une courte peine. Risquer trois ans de prison quand on sort un mois plus tard, ça laisse perplexe.
En effet, l’évasion est un délit récent, réprimé seulement depuis 2015, et passible de trois ans de prison ferme. Le procureur en a requis deux pour chacun des évadés. Le tribunal, plus clément, a prononcé 6 mois ferme pour chacun. La particularité de cette peine est qu’elle ne peut être confondue avec une autre. Ainsi, quelle que soit la peine purgée par l’évadé, celle pour évasion vient forcément rallonger sa détention. Le jeune Nassur n’est donc pas près de sortir de prison. Sauf si les grillages lui sont encore favorables. Les deux autres fugitifs font quant à eux l’objet d’un mandat d’arrêt.
Y.D.
Quelle tristesse
Et quelle peine exemplaire 💩🇫🇷