Narisome, dernière édition ?

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Des lecteurs comme s’il en pleuvait… c’est Narisome, « apprenons » en shimaoré. Un jury de jeunes qui ne passera peut-être pas le cap de cette 11ème année.

Iraya et Amra déléguées du collège de Dembéni
Iraya et Amra déléguées du collège de Dembéni

L’Association des Documentalistes et Bibliothécaires de Mayotte (ADBM) organisait, pour la 11ème année consécutive, un jury littéraire où les jeunes ont la parole, Narisome. Une action qui remporte l’adhésion puisque toutes les classes de 4ème et 3ème de l’île, excepté le collège de Mtsangamouji, avait répondu présent.

Depuis octobre 2013, ces adolescents des 18 collèges de l’île et des lecteurs de 2 bibliothèques sont plongés dans la lecture active des cinq romans de littérature de jeunesse sélectionnés. Groupés au sein de petit comité de lecture, ils se sont rencontrés régulièrement pour échanger, discuter autour de ces livres, « très souvent à midi, en mangeant nos sandwichs, dans une ambiance chaleureuse » souffle Marie-Christine Durfort, coordinatrice Narisome à l’ADBM.

Chaque comité a alors élu son livre préféré. Ayant mis le cap sur Mayotte pour l’occasion, Béatrice Bottet, lauréate du jury 2013 avec Pénélope Green, « La chanson des enfants perdus », a rencontré les jeunes lecteurs pendant deux semaines dans les établissements scolaires et bibliothèques. Et ce vendredi 18 avril, environ 40 lecteurs délégués représentaient leur établissement à M’tsangabeach pour une délibération finale.

Difficile de faire swinguer le nazisme

De jeunes critiques littéraires affutés
De jeunes critiques littéraires affutés

Les 5 ouvrages en lice ont donné lieu à des critiques parfois acerbes, souvent enthousiastes, toujours très argumentés. « Swing à Berlin »* par exemple, qui porte sur la lutte contre le nazisme par la musique, illustrait les différentes approches de lecture, de celle qui colle aux mots « nous n’avons pas aimé, c’est trop injuste un pays qui se retrouve prisonnier d’un homme qui met le monde en guerre » pour une classe, à celle qui prend du recul « nous avons beaucoup aimé cette vision historique par la musique » pour un autre collège.

Témoignages aussi passionnants sur les quatre autres ouvrages « Le cœur n’est pas un genou que l’on peut plier », sur le mariage forcé, « Décollage immédiat » sur l’aventure d’une jeune fille qui se retrouve seule, « Les trois vies d’Antoine Anarchasis » sur l’esclavagisme et l’enfance isolée et « L’attache » sur les liens familiaux

A l’issue des débats, c’est le livre « Décollage » qui raflait les suffrages, par 32 voix contre 6.

Moins d’aides et plus d’obstacles

Affaires culturelles, documentalistes en bibliothécaires qui mènent Narisome (avec le micro, Béatrice Bottet)
Affaires culturelles, documentalistes en bibliothécaires qui mènent Narisome (avec le micro, Béatrice Bottet)

Béatrice Bottet se disait plutôt heureuse des échanges qu’elle avait eus depuis deux semaines, et notait une ambiguïté : « le thème du mariage forcé encore pratiqué à Mayotte rebute les adolescents, alors que je note un féminisme, une indépendance des filles très forte ». Elle se dit impressionnée par la gentillesse des enfants, leur calme, leur écoute. Les petits comités étant souvent constitués des lecteurs les plus intéressés.

Narisomé est organisé grâce à la participation de la Direction des Affaires Culturelles de la préfecture, de son service illettrisme, et du vice-rectorat, « dans une moindre mesure que les autres années pour ce dernier » indiquait une organisatrice. La Maison des Ecrivains et de la Littérature s’étant désengagé, la difficulté de trouver des fonds met Narisome en péril, « surtout que parallèlement, les démarches administratives deviennent de plus en plus compliquées ».

Dans les autre DOM, ce sont les départements ou les Régions qui prennent le relai de cette activité culturelle qui permet à de nombreux enfants de développer leur plaisir pour la littérature. « Il faut une volonté politique de tous, département comme vice rectorat » concluait une

Anne Perzo-Lafond

* Résumé de chaque ouvrage :
– « Le cœur… » de Thierry Magnier : Awa, une jeune adolescente d’origine sénégalaise ayant toujours vécu dans la région parisienne, prépare son bac français. Soudain, son père, en vertu d’un accord conclu avant sa naissance entre deux familles, annonce qu’elle se mariera à un cousin, cet été, au Sénégal. Mais les femmes de la famille vont unir leurs forces et leurs arguments pour convaincre le père de renoncer à son projet.

– « Swing à Berlin » de Christophe Lambert : Berlin, 1942. La guerre s’enlise et le moral des allemands est au plus bas. Joseph Goebbels, ministre de la Propagande, ordonne que l’on crée un groupe de « musique de danse accentuée rythmiquement », un jazz qui valoriserait les thèses aryennes. Le vieux pianiste Wilhelm Dussander n’a jamais aimé les nazis. Pourtant, lorsque Goebbels le sollicite pour monter le groupe, Dussander n’a d’autre choix que d’accepter…

– « Décollage immédiat » de Fabien Clavel : « Lorsque sa mère, hôtesse de l’air, disparaît en lui laissant une consigne et l’ordre de fuir, Lana Blum comprend que sa vie est en danger. Sa fuite va prendre des proportions inattendues, et la faire voyager en Europe ! Aidée par un hacker baptisé Creep, Lana remonte jusqu’à la source d’un incroyable mystère »

– « Les trois vies d’Antoine Anarchasis » d’Alex Cousseau : Tout commence dans une petite île près de Madagascar, en 1831. Le héros, Taan ou Antoine ou Anacharsis orphelin de naissance, fera deux fois le tour du monde, Tout à tour esclave dans une plantation de Caroline du Nord, fugitif dans les Appalaches, voleur de rue à New York, chasseur de baleines au Cap Horn.il nous entraîne à la recherche du trésor de son aïeul, le pirate Olivier Levasseur dit La Buse.

– « L’attache » de François Robert : Igor et Emma sont séparés suite au décès soudain de leurs parents. Ils sont adoptés séparément et arrachés l’un à l’autre. On suit le point de vue d’Igor, sa vie dans une ferme avec sa nouvelle famille, son questionnement sur ses racines, et son lent cheminement pour se reconstruire.

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