Annoncé lors du 1er Atelier du Schéma d’Aménagement régional en octobre 2019, le Data Center aura fait son chemin puisque depuis quelques semaines, les engins pour sa construction ont été acheminés à côté du siège de nos confrères de Kwezi TV.
Porté par Feyçoil Mouhoussoune, directeur de ETIC service et président du GEMTIC, Groupement des Entreprises Mahoraises des Technologies de l’Information et de la Communication, une des meilleures compétences de l’île dans le domaine du numérique. Il était monté en 2018 jusqu’à l’Elysée pour défendre son projet et chercher des financements.
Il s’agit de construire un centre où sont regroupés différents équipements informatiques, comme des serveurs, des sous-systèmes de stockage, des commutateurs de réseau, des routeurs, etc. La puissance du 1er data center de Mayotte sera de 420kW.
Pour investir les 10 millions d’euros de ce projet, la société Information Technology Hosting (ITH) SAS présidée par Feyçoil Mouhoussoune a fait entrer à son capital à hauteur de 44% la Banque des Territoires avant de signer avec l’Agence Française de Développement, le Crédit Agricole Mutuel de La Réunion prêt long terme de 7,5 millions d’euros auprès de l’Agence Française de Développement (AFD) et du Crédit Agricole de La Réunion. Ils ont également consommé du crédit-relais FEDER.
Jusqu’à présent, les données des grosses structures à Mayotte, étaient stockées à La Réunion ou sur d’autres îles de l’océan Indien. Avec des effets négatifs de « coûts d’accès élevés et de latence des réseaux importantes pour faire transiter les données », rapporte Feyçoil Mouhoussoune.
Un calibrage aux normes
Son positionnement à Mayotte a un inconvénient, la consommation d’électricité. Pour le Data center lui-même, et pour son refroidissement avec une méga-climatisation au menu dans une zone tropicale. Or, les capacités d’Electricité de Mayotte (EDM) ne sont pas extensibles, le rythme de croissance de la consommation électrique incite même à l’économie. Feyçoil Mouhoussoune se veut rassurant : « En dépit des contraintes liées au climat tropical, le bâtiment vise un objectif de performance énergétique élevé, avec un PUE (un indicateur d’efficacité énergétique, ndlr) de 1,5, ce qui signifie que pour 1 unité consommée par les équipements informatiques, 1,5 unité d’énergie est consommée au total. Plus le PUE est proche du chiffre 1, plus le datacenter sera performant en consommant moins d’énergie. »
Sis en hauteur, « pour limiter son exposition aux risques sismiques et climatiques », il sera raccordé aux sites d’atterrissement des câbles sous-marins internationaux. En haut de la pente SFR à Kawéni, le datacenter est situé au sein de la principale zone économique de l’île, à proximité du centre hospitalier de Mayotte et des administrations publiques. Le bâtiment sera classifié TIER 3, une norme qui comporte 4 niveaux en fonction des cahiers des charges et certifications.
Nul doute que pour rentabiliser l’investissement les acteurs publics et les entreprises privées dont les données sont actuellement hébergées ailleurs, ont été contactées. Pour Feyçoil Mouhoussoune, il faut même voir plus loin : « Cette offre d’hébergement de proximité en collocation fiable et performante permet d’envisager sans limitation le recours à des solutions digitales innovantes pour traiter les enjeux locaux les plus critiques, ce qui ne manquera pas de faire émerger de nouveaux modèles de services digitaux sur le territoire. »
Un équipement qui colle en tout cas à l’évolution de notre territoire, résolument tourné vers le numérique, on a vu pendant le confinement à quel point ce lien était vital. C’est aussi l’opinion d’Yves Rajat, directeur de l’AFD : « C’est une chance pour Mayotte de rentrer avec ce projet dans l’ère du numérique de manière aussi déterminée et professionnelle. C’est par là, en effet, que se créeront une grande partie des emplois et des richesses de demain. »
Anne Perzo-Lafond