Communauté de communes Communauté d’agglo, un redécoupage à engager
Un vent de « re-périmétrage » pourrait-il secouer les limites intercommunales dessinées en 2015 à Mayotte ? Entre mariage d’amour ou de raison, qui unir avec qui ?
Rappelons-nous, à Mayotte dès l’annonce de la réforme territoriale à savoir la loi MAPTAM certains de nos édiles ont tout de suite flairé l’opportunité de cette réforme territoriale pour encourager la coopération locale en créant à Mayotte de nouvelles intercommunalités. Bien mal leur en a pris puisque, d’aucuns constatent la répartition inéquitable du bâti sur le territoire, des activités économiques tout comme des réserves foncières, autrement dit les fondamentaux des recettes fiscales. Pourtant, en mutualisant leurs compétences et en acquérant de nouvelles, nos communes feront des économies d’échelle, seront en mesure de se doter d’expertises pointues qui leur manquent à ce jour, élaboreront des stratégies à une échelle plus large et pourront apporter des services publics à la hauteur des attentes de nos concitoyens. C’est en tout cas l’esprit de la coopération intercommunale.
Dans cette perspective, « Mayotte 2025, une ambition pour la République » a, dès 2014, annoncé la mise en place de 4 communautés de communes et d’une communauté d’agglomération. C’est ainsi que courant 2015, la carte intercommunale proposée par la Commission départementale intercommunale fût validée par le Préfet, « au regard de la pertinence des regroupements proposés » selon le communiqué officiel. Non sans une pincée de dirigisme dans le découpage retenu, puisque on se rappelle tous des débuts difficiles voire chaotiques respectivement de la communauté des communes du sud et celle du nord.
5 ans après, un nouveau paramètre permet aujourd’hui de muer l’interco nord en communauté d’agglo conformément à l’arrêté préfectoral du 24 décembre 2020. Normal, si on constate qu’à la faveur du recensement 2017, les 4 communes réunies, franchissent le seuil légal des 50.000 habitants, avec désormais 59.042 âmes. De plus, la seule commune de Koungou avec 32.156 habitants permet de s’affranchir de la deuxième condition des 15.000 habitants posée par l’article L. 5216-1 du code général des collectivités territoriales.
Elément nouveau et non des moindres, le nouveau maire de Mamoudzou (71 437 habitants) annonce sa volonté de redessiner ses limites intercommunales. Et si la raison l’emmène à considérer sa destinée avec les communes de la Petite Terre pour former une autre communauté d’agglo (100.710 habitants) ! Un mariage peut-être de raison au regard des enjeux forts qui pèsent sur cette zone : vitrine du territoire et porte d’entrée de Mayotte, qui devra composer entre piste longue, déplacements entre petite et grande terre et continuité urbaine jusqu’aux entrées sud et nord de Mamoudzou… Tout cet aménagement urbain nécessite d’être réfléchi de manière globale, et pourrait utilement faire l’objet de la fameuse Opération d’Intérêt National prônée par Edouard Philippe, Premier ministre lors de sa déclaration du 19 avril 2018 à l’issu de la réunion interministérielle de travail avec les parlementaires de Mayotte, une délégation d’élus et le Préfet, Délégué du Gouvernement.
Enfin, cette dynamique d’évolution pourrait aussi profiter mutuellement aux communes du centre ouest, puisque Dembeni (15.848 habitants) compte tenu de son fort ancrage agricole, pourrait ainsi rejoindre la 3CO et ferait muer cette dernière également en une communauté d’agglo avec 65 868 habitants.
En tout état de cause, et au regard de notre récente histoire communautaire, les velléités soulevées par les uns et les autres sont en somme toutes légitimes, puisque, quand même la loi oblige à ce que certaines compétences communales puissent être remontées au niveau intercommunal, encore faudrait-il que celui-ci soit constitué. Certes la vie intercommunale reste fortement encadrée, mais c’est ainsi qu’elle est emmenée à évoluer.
La Commission départementale intercommunale pourrait judicieusement engager le sujet.
Nabilou Ali Bacar, Observateur de la vie publique