En ces temps de difficultés d’approvisionnement en oxygène, ceux qui n’en manquent pas, ce sont les gardes tortues du conseil départemental. Outre ces reptiles, ils ont comme plus proches voisins les crabes et les pailles en queue, et un air marin dépourvu de virus, comme geste barrière. Ils sont pourtant impactés par le confinement, nous rapportent-ils.
« Alors que le conseil départemental recherche et trouve des solutions pour l’ensemble de ses agents, en proposant du télétravail ou du présentiel aménagé pour ceux qui travaillent dans les bureaux, nous n’avons pas eu d’adaptation à notre condition de travail pour des trajets qui deviennent problématiques ». Ils expliquent que les taxis, fort dépourvus lorsque le confinement fut venu, suspendent leur activité, « ils dépensent plus en essence qu’ils ne récupèrent de passagers ». Les laissant sur le carreau : « Nous devons prendre le taxi en fin d’après-midi pour prendre notre poste à Moya, puis le lendemain vers 7h du matin, nous marchons en sens inverse vers la route, et là, nous attendons parfois jusqu’à 14h qu’un taxi arrive. Et la plupart d’entre nous habitent Grande Terre ». Pour des agents qui n’ont en principe pas dormi de la nuit, ça rallonge… « Nous demandons que soit mis en place un ramassage, mais nous ne sommes pas entendus de notre Direction Environnement et Développement durable », nous explique ce garde qui souhaite conserver l’anonymat.
Ils sont 19 à être impactés, et à tenir malgré tout leur veille. Ils ont d’ailleurs mis en fuite des braconniers, trop tard hélas pour sauver l’animal, comme on peut le voir sur leur photo. Mais ils ont des billes. « Dans la nuit du 13 au 14, nous avons vu arriver un véhicule, qui s’est garé, et a laissé descendre plusieurs personnes, avant de repartir. Vers 4 heures du matin, la voiture est revenue. » L’analyse du garde tortue qui nous détaille la scène est que, bredouille à la 1ère marée haute, les personnes sont restées cachées, sur place. « A la 2ème marée, ils ont repéré une tortue, et l’ont abattue, mais n’ont pas eu le temps de la dépecer car nous sommes intervenus. »
Ils avaient malgré tout relevé la plaque d’immatriculation de la voiture, qu’ils ont livrée à la gendarmerie, « il s’agit d’une voiture de location. Donc, c’est forcément quelqu’un qui a les moyens de faire ça. » Une enquête est en cours, nous indique-t-il.
Anne Perzo-Lafond