Lutte contre l’immigration clandestine : duel aérien au tribunal

Un recours vient d’être introduit par un des perdants du marché de la surveillance aérienne des eaux pour repérer les arrivées de kwassa. Il demande au tribunal administratif d’annuler la décision du préfet favorable à la société Mayotte Fly.

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Immigration, Mayotte
La surveillance aérienne du lagon et des côtes doit être pérennisée, mais par qui ?

En 2020, la crainte d’une importation du coronavirus sur l’île par arrivée de kwassa, incite le préfet Colombet à mettre en place une surveillance aérienne. Alors récemment implantée à Mayotte, la société M’safara dont Mayotte Fly Service (filiale de Réunion Fly Service), à qui nous avions consacrée un article, loue un bimoteur et propose ses services à la préfecture, pour faire de la surveillance notamment dans les domaines de la pêche illégale, du braconnage, de la pollution, et le secours aux personnes. En janvier 2021, la préfecture lui confie à titre d’essai et dans un contexte d’urgence sanitaire, des missions rémunérées, sans procédure de marché public.

Jugeant que le dispositif permet de compléter efficacement la lutte contre l’immigration clandestine – moyen demandé depuis des années par la population mahoraise – les autorités décident de lancer une consultation portant sur « la mise en place d’une surveillance aérienne pour la lutte contre l’immigration clandestine à Mayotte ». Une décision qui reçoit l’aval du gouvernement, le ministre Gérald Darmanin de passage à Mayotte fin août annoncera « 4 millions d’euros pour la surveillance aérienne des frontières dès l’année prochaine ».

Un marché d’une durée de 6 mois est lancé. Etaient notamment notées, la disponibilité, les capacités géographiques et de mobilité, les capacités opérationnelles, etc.

Le bimoteur de Réunion Fly Service à Dzaoudzi

2ème motif de plainte

Sept candidats répondent avec une offre, dont M’safara, Mayotte Fly Services et Récif hélicoptères. C’est le premier qui sera choisi, une sorte de continuité que le second juge peu légale. Estimant avoir été éconduit à tort, Récif hélicoptères dépose un recours en justice. Elle demande notamment les raisons sous-tendant cette décision, ainsi que les notes attribuées. « Eu égard à la proximité des services de la Préfecture avec les dirigeants de la société Mayotte Fly services, la société Récif Hélicoptères a demandé à obtenir des précisions sur les motifs de rejet de son offre », détaille l’avocat Me Camille Manuel Gonzalez dans sa requête en référé. Car lorsque les dirigeants de Récif contactent la préfecture pour obtenir les justificatifs appuyant le jugement, ces derniers se seraient « indignés » d’une telle demande et en « affirmant qu’aucun élément complémentaire ne serait communiqué ».

Ce qui vaudra à la préfecture d’être mise en cause à travers une 2ème plainte, pour une décision avancée comme « contraire au principe de transparence des procédures » (article L.3 du Code de la commande publique) ainsi qu’à l’obligation d’information des candidats évincés (articles R.2181-1 et suivants du Code de la Commande publique). L’avocat avance la jurisprudence pour indiquer que « le refus de l’acheteur public de communiquer le prix, les notes ainsi que les avantages et inconvénients de l’attributaire constitue un manquement aux règles de publicité et de mise en concurrence susceptible de léser le candidat évincé », mais en rajoutant, « sauf à établir qu’une telle communication porterait atteinte au secret des affaires, et, d’autre part, de surseoir à statuer sur les conclusions de la société Aeromécanic tendant à l’annulation de la procédure. » Ce sont les cas en effet où les données techniques des autres sociétés ne peuvent être divulguées.

L’avocat de Récif hélicoptère demande donc au tribunal administratif de Mayotte de suspendre le marché et d’obliger le préfet à « communiquer le prix, les avantages et inconvénients de la société Réunion Fly Services et le rapport d’analyse des offres. »

A.P-L.

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