Lutte contre l’illettrisme : une méthode mauricienne

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Une méthode originale de lutte contre l’illettrisme va être mise en œuvre à Mayotte. Le secours catholique a fait venir un formateur de l’Ile Maurice, avec dans ses bagages, un procédé d’apprentissage du Français conçu dans l’Océan indien.

On ne s’en est pas vraiment rendu compte mais la lutte contre l’illettrisme est bien « grande cause nationale » de l’année 2013. Conscient de l’importance de ce problème à Mayotte, le secours catholique a décidé de passer à l’offensive. Il a demandé à Josian Labonté, le responsable de l’alphabétisation fonctionnelle à Caritas Ile Maurice, de venir expliquer les méthodes qu’il a mises en place chez lui. Depuis le début de la semaine, il dispense sa façon de faire aux bénévoles qui assurent les cours de français au centre Nyamba, mais aussi à ceux d’autres associations comme Solidarité Mayotte.

Partir des besoins des apprenants

« La méthode est très différente des cours classiques de langues, explique Josian Labonté. Notre but n’est pas de faire de la grammaire mais d’apprendre aux gens à se débrouiller dans le quotidien. Nous sommes là pour leur permettre de savoir parler et savoir écrire dans la vie de tous les jours. »
L’idée est de partir des besoins des apprenants ce qui suppose d’adapter la méthode à Mayotte. « A Maurice, par exemple, on apprend les mots et les phrases pour prendre le bus. Ici, ça n’a pas de sens. »
Hier matin, avec ses élèves de la semaine, Josian Labonté cherchait dans quels contextes les non-francophones de Mayotte sont confrontés à l’impossibilité d’échanger : « A la poste pour remplir un recommandé, à l’hôpital pour lire les panneaux indicateurs et trouver les bons services… », les exemples du quotidien s’imposent d’eux-mêmes.
« Quand on demande à nos élèves d’écrire ‘je mange une pomme’, certains y arrivent, poursuit Josian Labonté. Mais quand on leur demande d’écrire ce qu’ils ont mangé, ils ne savent plus. Il faut donc leur permettre de traduire leurs pensées, de leur langue maternelle en français. »

Christophe Vénien du Secours catholique Mayotte a rencontré Josian Labonté l’an dernier, lors d’une réunion des associations Caritas de l’Océan indien. Il a tout de suite été séduit par la méthode.
«Les bénévoles qui donnent des cours de français dans nos structures ont chacun leur façon de faire et ils rencontrent beaucoup de difficultés, explique-t-il. L’idée est de leur donner une méthode commune, qui a fait ses preuves, pour faciliter leur travail. »

« Les gens changent de comportement »

A Maurice, le contexte linguistique est très différent de celui de Mayotte. Là-bas, la langue maternelle est essentiellement le créole, l’administration fonctionne en anglais mais la langue courante est le français « qui représente environ 90% de l’écrit ». Un trilinguisme qui rend le quotidien impossible à ceux qui ne sont que très peu allés à l’école.
Depuis la fin des années 1990, la méthode a donné « d’excellents résultats dans le contexte mauricien », aussi bien chez les jeunes que chez les adultes : « nous constatons de vrais changements et pas seulement lors de l’apprentissage, se félicite Josian Labonté. Les gens changent de comportements, comme s’ils étaient mieux dans leur vie, plus épanouis. »

La session de formation dure une semaine. Elle sera complétée par une deuxième phase au mois de mars. Très rapidement, les 128 jeunes et la quinzaine de femmes qui suivent les cours de français du centre Nyamba, vont donc pouvoir bénéficier de l’expérience mauricienne.
RR