La fin du séjour de Victorin Lurel et Johannes Hahn a été l’occasion de rappeler, devant la presse, les objectifs du département et de la future région ultrapériphérique de l’Union européenne.
« Rome ne s’est pas faite en un jour, Mayotte ne sera pas parfaite en un jour ». Ce sont les mots rassurants du commissaire européen Johannes Hahn pour clore sa visite de deux jours à Mayotte en compagnie du ministre des outremers français Victorin Lurel. Si l’ancien ministre autrichien s’est cantonné à des termes assez policés, Victorin Lurel a réaffirmé après la présentation samedi 19 octobre des projets envisagés pour mobiliser les fonds européens par le conseil général (voir article), le rôle primordial des élus locaux. Un rôle de gestionnaire qu’ils ne maîtrisent pas encore.
« Il y a quelques soucis, il faut être honnête […] J’espère ne pas avoir choqué pour avoir dit quelques vérités : oui, la situation financière mérite d’être améliorée. Il y a un problème de gestion », analyse le ministre, ancien président du conseil régional de Guadeloupe.
Très enthousiaste, sur les projets privés, notamment la centrale électrique photovoltaïque d’EDM visitée dimanche, le locataire de la rue Oudinot a été plus circonspect sur la capacité des élus locaux, notamment ceux du conseil général, a gérer des dossiers européens.
« Nous ne sommes pas là pour vous dire, on vous donne 500, 600 millions et qu’en face il n’y ait pas les dossiers appropriés et correspondants aux normes et règles de la commission. Il faut être réaliste et pragmatique », rétorque le ministre.
Encourager le Conseil général
Les 224 millions d’euros (euro constant) de fonds européens destinés à Mayotte ne sont pour l’instant que virtuels. Des projets aboutis et extrêmement détaillés doivent être présentés à la commission.
« Il est primordial que les élus sachent présenter les projets. Dans la logique européenne, si on veut obtenir des fonds on présente un projet, un projet bien travaillé. On doit connaître par avance le montant de l’investissement dont on a besoin, pour qu’il y ait validation puis approbation par les autorités européennes », a rappelé Johannes Hahn.
Les deux hommes ont rappelé que l’accès au statut de RUP n’est qu’en janvier 2014, une façon d’encourager la collectivité, qui a délégué son autorité de gestion pour les fonds européens à l’État, à poursuivre l’assainissement des comptes. « Je ne suis pas pessimiste parce que des efforts ont été faits. Le président [du conseil général, Daniel Zaïdani] était très optimiste. J’ai mis simplement un petit bémol lorsqu’il dit avoir redressé les comptes […] et bien selon les chiffres en ma possession, il y a 37 millions de déficit en trésorerie. Et puisqu’à la fin de l’année, on a dû répondre aux demandes sociales, 3 000 fonctionnaires indexés, [..] ça coûtera 9 millions euros », résume Victorin Lurel.
Daniel Zaïdani (MDM, centre) disait, lui, ne pas vouloir « entrer dans la polémique » et assurer avoir « stabilisé les dépenses », à l’issu d’une première salve de remontrances samedi dans l’hémicycle de la collectivité (voir article).
L’unité dans la diversité
Les réformes, l’application du droit commun à Mayotte suite à la départementalisation et à la future RUPéisation ne sont pas une simple question de rythme. Le modèle assimilationniste du département d’outremer a fait son temps pour le ministre.
Il se réfère à 65 ans d’expérience des autres départements d’outre-mer. Une départementalisation qui a apporté « des satisfactions, mais aussi des querelles », selon l’expression « satisfaction querelleuse » empruntée par le ministre à Raymond Aron, et de lancer des pistes pour Mayotte.
« Si vous demandez la stricte égalité et l’égalité sur tout, tout de suite, demain peut-être vos enfants vous le reprocheront », avance-t-il avant de reprendre pour le compte de Mayotte, la devise européenne : « L’unité dans la diversité ».
AL