La vive tension entre le président de la CAPAM (Chambre d’Agriculture, de la Pêche et de l’Aquaculture) et son vice président Dominique Marot, a provoqué un blocage de l’institution ce vendredi matin. Des représentativités dans les instances locales sont en jeu.
L’ambiance était digne d’un jour de marché à Brive la Gaillarde ce vendredi matin au premier étage de l’immeuble qui abrite les Chambres consulaires à Mamoudzou. Fort heureusement, les pandores qui sont intervenus n’ont pas subi le sort de ceux de la chanson de Brassens.
Mécontent du report de la séance qui devait voir adopté le budget rectificatif, Dominique Marot, directeur d’Aquamay et vice-président de la CAPAM, avait appelé les pêcheurs de Mtsapéré à la rescousse, histoire d’assurer le boycott de l’assemblée. Le résultat attendu fut à la hauteur, et les décibels dans les couloirs avaient dépassé le seuil habituel, produits par les invectives, les injures et menaces mutuelles.
La Police nationale qui passait par là a bien essayé de raisonner les deux parties… en vain.
Mouslim Payet, de son côté, a tenté de tenir l’assemblée dans différentes salles, aussitôt occupées par les partisans de son vice-président qui demandait une convocation dans les règles, « avec les 8 jours de préavis réglementaires ».
Depuis son élection, Mouslim Payet s’est heurté à Dominique Marot, jadis dans l’opposition, qui décrochait en décembre 2013 le poste de vice président. Ce dernier accuse son président d’organisation de foire fantoche et les relations entre les deux hommes sont particulièrement tendues.
Petit pêcheur deviendra grand…
Pour Mouslim Payet, derrière se joue une lutte pour représenter la CAPAM dans diverses instances. Un point qui, bien qu’inscrit comme déjà acté, était au menu de l’assemblée du jour à l’entendre, « celui du remplacement du pêcheur Issouffi Abdallah par Pierre Baubet en tant que délégué CAPAM au Parc Naturel Marin, et par Dominique Marot à l’Ecole d’Application Maritime ».
Issouffi Abdallah, patron de pêche plus connu sous le surnom de Moussa, confirme que c’est l’objet de la guerre : « nous, les petits pêcheurs, nous n’avons plus le droit de pêcher au filet dans le lagon, et à l’extérieur, il n’y a plus de poissons. Nous sommes obligés d’aller jusqu’au banc de la Zélée bien que n’ayant pas de matériel aux normes. Ce sont des points qui devraient être défendus par Régis Masséaux en tant que président du Syndicat des pêcheurs, mais avec Marot à Bruxelles, ils n’ont travaillé que pour leur intérêt en tachant d’éloigner les thoniers senneurs. C’est dans cette logique qu’ils veulent ma place ».
Le remplacement de Moussa ne passera par pour Mouslim Payet, « d’autant plus que Pierre Baubet est inscrit dans le collège des salariés, et non pas des pêcheurs ».
Régis Masséaux, président du Syndicat des pêcheurs, replace les choses dans leur contexte : « depuis la modification du bureau, il faut réélire les commissions et les représentants externes. C’est le cas de Monsieur Issouffi Abdallah qui n’est plus un représentant légal ». Et sur le sujet des préoccupations des petits pêcheurs, il n’en revient carrément pas: « s’il n’y a plus de poissons à l’extérieur du lagon, c’est bien parce qu’il faut éloigner les thoniers senneurs, d’où mon combat ».
L’enjeu est la structuration de la filière pêche à Mayotte qui n’en est qu’à ses balbutiements, où les petits pêcheurs devront petit à petit abandonner leur barque pour de vrais bateaux de pêche, et pour laquelle un Comité de pêche représentatif devient indispensable pour défendre les problématiques de toutes les catégories de pêcheurs.
La prochaine session risque d’être du même acabit si aucun accord n’est trouvé.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte