Interception de kwassas, jeunesse de la délinquance, problématiques territoriales, le général Bertrand Soubelet, commandant la gendarmerie Outre-mer est venu sur le terrain mahorais. Quelques jours pour comprendre les spécificités de notre département.
«On est au seuil de l’acceptable.» Voilà comment le général de corps d’armée Bertrand Soubelet analyse la situation la situation de la gendarmerie dans notre département. Commandant de l’ensemble des Outre-mer, il poursuivait cette semaine à Mayotte sa tournée des différents territoires dont il a la responsabilité, après s’être rendu en Nouvelle-Calédonie et en Guyane.
Vendredi soir, il recevait la presse avant de repartir, ce dimanche, pour la métropole. Il a confirmé les premières annonces faites dans la semaine à Mtsamboro. Pour une brigade à Koungou, le dossier avance même si aucune date n’est encore arrêtée. Actuellement, la brigade installée à Mamoudzou doit se répartir entre Dembéni et Koungou, 2e ville de Mayotte avec des problématiques de sécurité importantes à gérer. Il a également confirmé les projets «immobiliers visant à rassembler les personnels de Sada sur un même site.
Sécurité et immigration, deux enjeux spécifiques
Le général, dont la parole s’affranchit volontiers d’un certain conformisme, est évidemment revenu sur les deux enjeux auxquels doivent faire face les forces de gendarmeries à Mayotte : tout d’abord, la «sécurité publique générale», même si «on parle de chiffres qui sont sans commune mesure avec la métropole». Le général Soubelet reconnaît une augmentation des vols avec violence, «un indicateur sur lequel on doit agir».
Deuxième enjeu particuliers à Mayotte, la lutte contre l’immigration clandestine. Le général a assisté vendredi matin à l’interception de deux kwassas. «Ca m’a humainement beaucoup touché. C’est très compliqué. J’ai vu les difficultés pour les personnels. Ce n’est facile pour personne, ni pour les personnels, ni pour ceux qui choisissent de quitter leur pays.»
Recrutement locaux et retour au pays
Mayotte, «au seuil de l’acceptable», il va donc falloir «renforcer (le département) avec des gendarmes locaux» qui maitrisent la langue. Il annonce vouloir lancer un recrutement localement pour des gendarmes adjoints volontaires dont certains pourraient ensuite être préparés à différents concours… mais il ne faut pas s’attendre à une vague de création de postes : le général n’annonce, en effet, que «100 personnels nouveaux par an à l’échelle nationale»… «et les Outre-mer ne sont pas toujours la préoccupation de la métropole», reconnaît-il.
En plus de ces recrutements, le général Soubelet indique lancer «sur l’ensemble des Outre-mer», une politique de retour au pays pour les gendarmes qui exercerait en métropole ou ailleurs. Une façon, avec «un budget contraint» de mobiliser de nouvelles énergies dans des territoires qui en ont besoin.
Jeunes délinquants : la gendarmerie «sans interlocuteur»
Si la gendarmerie emploie 4.000 personnes Outre-mer, il semble difficile d’apprendre les uns des autres à l’échelle ultramarine. «La mise en commun de bonnes pratiques» n’a pas toujours de sens tant les formes de délinquances et les réalités sociales sont différentes d’un territoire à l’autre.
Ainsi, dans notre département, la particularité est la jeunesse des délinquants, «souvent âgés entre 10 et 13 ans», des mineurs qui représentent plus de 50% de certains actes délictuels. «Quelle réponse collective apporter à cette situation ? Nous, gendarmes, n’avons pas d’interlocuteurs. En métropole, dans les autres DOM, il y a des structures associatives de prévention et d’accompagnement des mineurs. Ici, ça n’existe pas.»
Pas de formation à la culture locale
Enfin, le général a été interrogé sur l’affaire «de la tête de cochon», qui a secoué la gendarmerie cette année. Il a mis en garde sur la tentation de généralisation. Rappelant que les mise en cause ont été lourdement sanctionné en interne, il indiquait qu’on «ne peut pas faire porter la responsabilité de comportements individuels sur l’ensemble d’une institution.» Quant à l’idée d’une journée de sensibilisation de nouveaux personnels arrivant de l’extérieur aux spécificités de la culture locale, il n’en a «pas ressenti la nécessité.»
RR
Le Journal de Mayotte