La Sim assurait ce lundi la 100e livraison d’une maison construite dans le cadre du dispositif d’accession sociale à la propriété. En positif, quelques communes dynamiques et la joie des familles concernées. En négatif, le faible nombre de livraisons en 7 ans lié aux problèmes fonciers qui paralysent tous projets immobiliers.
Andhuimati et Moussa ne se connaissent pas. Leurs deux familles vont pourtant devenir voisines dans le nouveau quartier qui sort de terre à Poroani. Ce lundi, ils accueillaient dans leur futur jardin, ceux qui sont à l’origine du programme d’accession sociale à la propriété dont ils sont les bénéficiaires.
Au milieu de petites maisons en dur en construction, Roukia Lahadji, la maire de la commune de Chirongui, et Mahamoud Azihary, le président de la SIM, étaient venus assurer, symboliquement, la 100e livraison d’une maison en programme LATS (logement en accession très sociale). Avec eux, des représentants de la DEAL et de la CAF (caisse d’allocation familiale) également partie prenante du dipositif.
LATS : Kezako ?
Les logements en accession sociale permettent aux familles avec peu de ressources de devenir propriétaires. Les dossiers sont gérés par la DEAL qui accorde un montant de subventions qui peut aller jusqu’à 73.000 euros. La CAF peut également prendre en charge une partie de l’achat, le reste étant à la charge de la famille qui peut contracter un prêt bancaire.
Pour en bénéficier, il suffit d’être propriétaire d’un terrain à son nom propre et de remplir les conditions de ressources et de résidence.
A Mayotte, la SIM est chargée de réaliser ces programmes. Elle construit des cases en dur qui sont livrées aux familles achevées à l’extérieur. Les nouveaux propriétaires doivent ensuite réaliser le carrelage et les peintures intérieures et l’ensemble des aménagements.
Le Positif : des maisons pour les habitants de communes dynamiques
Compte tenu de la taille de leur famille, Andhuimati et Moussa disposent d’une maison avec une cuisine, salle de bain et 4 chambres. Ils entrent dans les objectifs du programme qui vise à «rompre le cercle de la pauvreté», selon l’expression de Mahamoud Azihary. Pour lui, permettre à des familles très défavorisées d’accéder à la propriété, c’est offrir un espace à des enfants pour qu’ils étudient dans de bonnes conditions et ainsi changer leur vie. C’est aussi garantir un patrimoine à une famille.
Cette politique sociale semble très adaptée à Mayotte où 80% de la population pourrait prétendre bénéficier du programme. «Nous avons deux communes particulièrement dynamiques : Bandraboua et Chirongui», explique, sans langue de bois, Mahamoud Azihary, une façon de tenter de mobiliser les autres communes qui ont du mal à démarrer leur programme.
A Chirongui, la maire est enthousiaste et après la quartier de Poroani, de nouveaux programmes sont lancés. «Notre objectif est de livrer 700 logements avant 2020. L’an prochain, nous aurons un démarrage de chantier à Tsimkoura. Puis suivront Miréréni et Chirongui Stade… Avant la ZAC de Mramadoudou avec 350 logements. Nous sommes au combat. Le mal-logement n’est pas une fatalité !» martèle Roukia Lahadji, sûre de ses choix.
Négatif : un programme complètement en panne
«Nous célébrons la 100e livraison mais ce n’est pas un succès. Si tout avait bien marché, on fêterait la 2.000e livraison. En 7 ans, nous avons réalisé 333 logements et nous n’avons donc pu en livrer que 100», se désole Mahamoud Azihary.
Le foncier, encore et toujours, est le cœur du problème. La très grande difficulté pour les Mahorais de disposer de titres en nom propre, ce qui est une obligation pour boucler le dossier, paralyse le programme : permis de construire et mise en chantier sont au point mort. Des logements achevés depuis des années n’ont toujours pas pu être livrés aux familles.
Pour la SIM, les conséquences sont lourdes : «Pour que nos comptes soient à l’équilibre, il faudrait sortir 150 logements par an. A l’heure actuelle, l’accession sociale, c’est une activité à perte pour la SIM mais on le fait de façon militante», assure Mahamoud Azihary.
Et le président de la SIM de renouveler sa proposition d’une remise à plat du foncier sur le modèle de l’immense chantier mené par la commission de l’état civil à Mayotte. «Le titre foncier, c’est l’état civil de la terre. Il faut identifier toutes les parcelles et toutes les propriétés pour achever ce qui a été commencé par le cadastre par exemple. Il faut établir une commission dotée de moyens et d’une équipe accompagnée de représentants de l’état et de politiques. Il faut lui donner 2 ou 3 ans pour finir ce chantier. Sinon, la gestion de notre pays restera bloquée au moyen-âge !»
Mahamoud Azihary rêve que Mayotte soit capable de sortir autant de réalisations que les pays voisins, de la Tanzanie à Maurice qui eux, ne bénéficient pas de l’appui d’une nation développée et de fonds européens.
RR
Le Journal de Mayotte