Si les problèmes d’inscription sont récurrents à Mayotte, ils ne portent habituellement pas sur des élèves insérés et volontaires. C’est pourtant le cas à Sada où des Terminales redoublants ont semble-t-il le tort d’avoir l’arabe comme seconde langue.
Sur 16, ils ne sont « plus que » trois à ne pas encore avoir fait leur rentrée scolaire en lycée à Sada. Ils ont pour plus petit dénominateur commun leur langue seconde : l’arabe. « C’est le facteur bloquant. Le cours d’arabe serait, je dis bien serait, saturé » indique Omar Sahimi, secrétaire de l’Association de parents d’élèves et délégué FCPE au lycée de Sada, qui indique que la FCPE a été saisie du dossier.
Tous redoublant de Terminale, ils ont fait l’objet d’une démarche active de la part du délégué, « mais la proviseure refuse de les prendre s’ils ne suivent pas l’intégralité des cours. » Il s’est donc rendu au vice-rectorat, en demandant que leurs cas soient examinés en Commission d’affectation. Il n’a à ce jour aucune nouvelle. Une collégienne de 6ème se trouvait d’ailleurs dans le même cas à Sada.
Et Omar Sahimi est prêt à toute proposition : « prés d’un mois après la rentrée, un élève redoublant vient d’être finalement admis au lycée de Sada sous-contrat, c’est à dire en ayant pris l’engagement de travailler, ce qui est tout à fait normal. »
L’arabe un outil de lutte contre la radicalisation
Nassabia* est une de ces élèves en errance. Pourtant autorisée à redoubler, elle n’a toujours pas pu intégrer son établissement de Sada : « parce qu’on me dit qu’il n’y a plus de place en arabe. Je travaille tous les jours mes cours de l’année dernière pour être prête si je suis prise », témoigne-t-elle au téléphone.
Lasse d’attendre, elle envisage même d’intégrer l’école de la deuxième chance à Mamoudzou, elle qui n’est pour l’instant pas décrocheuse. Tout juste s’est-elle rendue coupable de quelques heures d’absence l’année dernière, mais serait prête à s’engager sous contrat, sa maman étant employée au lycée de Sada comme agent d’entretien.
Les autres élèves en attente sont également des arabisants. Un paradoxe à l’heure où la langue arabe est identifiée comme facteur d’intégration de Mayotte dans sa région, et envisagée comme la meilleure arme pour lutter contre la radicalisation : « Nous avons l’islam en mémoire, mais pas en compréhension », glissait récemment le porte-parole du grand Cadi, El Mamouni Mohamed Nassur
En attendant, Nassabia a l’œil rivé sur son téléphone, en attendant que quelqu’un se souvienne qu’elle a son avenir à construire.
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
* Prénom d’emprunt