Taxe d’habitation : la colère monte à Koungou

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Excédés les habitants de Koungou ! Ou plutôt une petite poignée qu’ils espèrent devenir grosse, à la mesure du mécontentement provoqué par la flambée de la taxe d’habitation. Car elle a variablement selon les cas, doublé, quadruplé, voire décuplé si on prend comme référence les montants 2012.

Exposé des doléances
Exposé des doléances dans la salle de réunion

Le rendez-vous avait été lancé par sms, et répercuté d’onde en onde, pour vendredi dernier à 14h30. Mais, et c’est l’inconvénient du système, tout aussitôt annulé vers 11h ce même jour, avec une plus ou moins bonne réception, laissant une douzaine de personnes seulement prendre le chemin de la mairie.

Ils ont malgré tout fini par être reçus par Mounirou Ahmed, Chargé de l’Aménagement à la mairie de Koungou, une réunion avec les habitants que l’équipe municipale avait prévu de longue date, explique-t-il. Un peu comme si la mairie ne pouvait que s’attendre à une grogne légitime. Mais le maire et le DGS ne sont pas là, « on nous a dit que la réunion était annulée », nous explique le maire Assani Saindou Bamcolo au téléphone.

Assis autour de la table de la salle de réunion, les contribuables n’attendent que le feu vert, et le premier reproche fuse : « Koungou est une commune où seulement 20% de l’adressage est terminé. Vous décidez donc de recouvrer un impôt sur un travail non bouclé, où seule une petite partie de la population répertoriée va payer pour les autres. C’est illégal ! » Il l’a dit, Mounirou Ahmed est là pour noter les récriminations, mais convient malgré tout que l’adressage est loin d’être fait, « j’en ai la charge, le dossier date de 1994 ».

Une commune riche…

Mounirou Ahmed aura fait remonté le jour même aux maire et DGS
Mounirou Ahmed : « Je fais remonter le jour même au maire et au DGS »

Un matraquage qu’ils jugent incompréhensible, « le maire n’a-t-il pas rappelé qu’il était à la tête d’une commune riche ! » C’est bien le problème, car contrairement à Sada ou Dzaoudzi-Labattoir que l’Etat a enjoints d’augmenter les impôts pour rétablir l’équilibre budgétaire, à Koungou, c’est de sa propre initiative que la mairie a appliqué le taux assassin.

Que Mounirou Ahmed justifie, comme le DGS l’avait fait avant lui, en expliquant les informations tardives portées par la DGRFIP (Direction générale des finances publiques) : « En juin 2015, nous n’avions toujours pas les montants exacts, il fallait pourtant voter le budget. » Un montant surévalué par les services fiscaux, ce qui, faute d’avoir tout recouvré, aurait impliqué le vote d’une Décision modificative de budget, et la hausse des taux que l’on connaît.

Ajouté à la charge du SDIS (Service de secours et d’Incendie), jusqu’à présent départemental et qui échoue désormais aux communes, « pour 1,4 millions d’euros chez nous », explique-t-il. Une charge supplémentaire qui a du pourtant obligatoirement leur être compensée, soit par le département, soit l’Etat.

… Et « un trottoir en 13 ans ! »

Surtout que les contreparties de cette fiscalité, les habitants ne les voient pas. On aura remarqué les bornes wifi pour les jeunes, et quelques bancs à Majicavo Dubaï, « je peux dire qu’en 13 ans, je n’aurai vu se construire qu’un trottoir à Majicavo ! » Surtout que certains ne vivent pas dans leur bulle : « Mes enfants sont nés ici, et vont à l’école publique. Quand je vois son état ! Je finance donc chaque année 600 euros de fournitures scolaires, alors même que ma taxe d’habitation devrait y pallier. On a vraiment le sentiment qu’on veut qu’on parte ! »

Un autre a vu son compte bloqué, « interdit bancaire parce qu’il n’était pas suffisamment créditeur ».

Fuir devant l’impôt

Les habitants faisaient valoir une rupture d'égalité des chances devant l'impôt
Les habitants faisaient valoir une rupture d’égalité des chances devant l’impôt

La première conséquence de ce choix est politique, ainsi que l’appuie un habitant, « j’ai voté pour votre maire, je ne recommencerai pas ». Mais au-delà, elle est inquiétante pour la commune, et dramatique pour l’ensemble du département : « Non seulement nous allons déménager, mais les médecins en poste ne vont pas rester, il est plus intéressant de venir comme remplaçant, non assujettis à l’impôt mahorais ! », indique une responsable de la Communauté médicale.

Car une résidente à Mayotte depuis 7 ans expliquait qu’en 30 ans de métropole elle n’avait jamais vu une telle imposition, « je ne me ferai pas racketter comme ça ! »

L’année à venir devrait être sous de meilleurs hospices fiscaux, annonce le cadre, « avec une révision du taux à la baisse. »

Mais les habitants veulent des réponses tout de suite. Et pour cette année, tout ne semble pas perdu, plusieurs d’entre eux ont déjà contesté le montant de leur taxe auprès des Services fiscaux, « cela en bloque la perception », et ils évoquent une action en justice déjà engagée, « et nous demandons les documents comptables et la tenue des finances ».

Ils ont convenu* avec Mounirou Ahmed d’une réunion en janvier, avant que ne se tienne le Conseil municipal, qui, sans résultats concrets, pourrait être perturbé par des éléments extérieurs…

Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

* Pour se joindre à eux : 0639 66 19 47 et la page Facebook « lotissement majikoro »

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