A croire que la malchance poursuit Mouslim Payet qui, dès son élection comme président de la Chambre de l’Agriculture, de la Pêche et de l’Aquaculture, en février 2013, dut essuyer des tirs de boulet, voire des tentatives de renversement. Son principal pourfendeur, Dominique Marot, président de feu Aquamay, avait même déjà demandé une tutelle.
Les choses ne vont pas mieux en 2016, et Mouslim Payet s’en explique : « Si en 2012 et 2013 j’ai touché des dotations du département, elles ont diminué de moitié à partir de 2014, et ont même été nulles en 2015 ». Il met cette évolution sur le compte de la négligence, « on m’a même conseillé de licencier 6 personnes sur les 30 que comptent la structure, en visant les cadres supérieurs. Or, je les ai recrutés pour leur compétence à répondre aux 14 millions d’euros de fonds européens, et pour ouvrir les pistes en zone rurale. De plus, ils sont payés à 75% par l’Etat. »
La Foire agricole de trop
Résultat, la CAPAM s’enfonce, « rien que sur l’année 2014, la Direction de l’alimentation, de l’agriculture et de la Forêt nous reproche une perte de 300.000 euros », mais Mouslim Payet décide malgré tout d’organiser la Foire agricole à Mayotte en 2015, « décision validée par une délibération du conseil départemental ». Un investissement de 250.000 euros, « et ce n’est que la veille de la manifestation que le préfet prend son téléphone pour me reprocher une telle organisation… »
Du côté du conseil départemental, c’est Saïd Salimé, ancien conseiller départemental en charge de l’agriculture, désormais au cabinet du président, qui se fait le porte-parole de la position officielle, sans autre opinion sur la gestion de la Chambre : « Depuis 2006 et la séparation de la Chambre professionnelle en trois chambre consulaires, nous avons alloué des dotations annuelles à la CAPAM. En cumulant la dotation annuelle statutaire, les missions déléguées, et le financement du stand au Salon international de l’Agriculture à Paris, nous avons versé 1,2 million d’euros chaque année. »
Des recettes diminuées de moitié puis du tiers
Mais c’est 2014 et la Rupéisation de Mayotte qui pose problème. Pour Mouslim Payet, le conseil départemental doit continuer à verser sa contribution, quand pour Saïd Salimé, on bascule vers un autre système : « La CAPAM émerge à la Taxe additionnelle sur le foncier non bâti. » Qui aurait dû lui rapporter 532.000 euros en 2014, « mais l’Etat n’en a versé que 400.000 euros », précise Saïd Salimé.
Ce manque de 100.000 euros, le Conseil départemental dit ne pas pouvoir légalement le combler, « mais nous les avons missionné pour 520.000 euros, dont le Salon toujours. Une baisse des recettes, mais encore supportable. Par contre, en 2015, pas de mission, c’est l’année des élections au conseil départemental, « et la CAPAM a voté un budget en fin d’année, trop tard pour nous. » Rien ne sera versé par le département, seul le produit fiscal de 532.000 euros a du abonder les recettes.
La CAPAM, « un vrai sujet » pour Seymour Morsy
Cette année, on se souvient que, audit oblige, la participation au Salon de Paris n’a pas été versée directement à la Chambre, mais au Comité du Tourisme qui a géré le déplacement.
Il y a quelques jours, le département a alloué 260.000 euros, « pour qu’ils puissent consommer les fonds européens. » C’est ce que compte faire Mouslim Payet, « nous allons cibler les actions qui nous rapportent le plus. »
Le Conseil départemental attend impatiemment de connaître le verdict de l’audit, « les préconisations devraient préciser les champs d’action relevant de notre domaine, et ceux impartis à la DAAF. »
D’ailleurs tous, y compris Mouslim Payet, qui essuie toujours des tirs internes, se disent heureux de la demande d’audit du préfet, même si elle débouche sur une tutelle. « La préfecture a des chantiers en cours, en particulier sur la CAPAM, et ça, c’est un vrai sujet », avait glissé l’ancien préfet Seymour Morsy avant de décoller de Mayotte.
Après tout, c’est ce qui est arrivée à la CCI qui ne s’en porte actuellement pas plus mal…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte