A Mayotte, nous produisons 100 tonnes de viande de poulet par an. Problème : nous en importons 12.000 tonnes ! De quoi faire dire aux statisticiens de la DAAF qui publient une étude sur la question que le «marché du poulet de chair est très déséquilibré». Une évidence.
Une quinzaine d’aviculteurs professionnels sont déjà installés et de nouveaux candidats sont issus des formations organisées par le centre de formation agricole (CFPPA). Mais le potentiel de production est clairement sous-exploité. La DAAF note que les 53.671 poussins importés en 2014 ne représentent même pas la moitié de ce que les installations des exploitations agricoles pourraient produire.
Difficile de blâmer les producteurs pour autant car les difficultés s’amoncellent au-dessus de leur tête à tel point que leurs charges de production représentent 2 fois celles des poulets «label» produits en métropole.
Des initiatives pour limiter les coûts
L’amortissement des bâtiments en dur représente 3 fois l’équivalent hexagonal (en moyenne 45€/m2/année d’amortissement), de même que le prix des poussins: ils coûtent 1,5€ chez nous contre 0,45€ en métropole et 0,70€ à La Réunion.
Heureusement, face aux aléas de l’aérien, le secteur a mis en place un couvoir, en mars dernier, qui fonctionne avec des œufs fécondés importés. Le prix de vente aux associés du couvoir est maintenant proposé à 1.05 €.
Autre initiative qui a changé la vie du secteur, la création d’une usine d’aliment. Elle aussi a permis de sécuriser les approvisionnements des élevages et de créer de la valeur ajoutée et des emplois. Les prix de vente des aliments produits localement ont baissé depuis 2013 pour atteindre un niveau proche de celui de la Réunion (environ 470 à 500 €/t), grâce au mécanisme des aides.
Des cages sur pilotis
Et chacun tente de trouver le moyen de produire en limitant les coûts comme les très petits éleveurs, qui se sont dotés de cages de 20 à 30 m2 sur pilotis, à un prix dérisoire et qui, en plus, présentent l’avantage de fertiliser le sol en même temps !
Même si la taille des exploitations conditionne les coûts, au final, le prix de revient (personnel compris) d’un kilo de poulet vif à Mayotte est de 3,51€ à 4,43 €, contre 2,87 € en poulet label ou 0,96€ pour du poulet standard en métropole.
Le besoin d’un abattoir
Du côté de la production, beaucoup reste à faire, pour la transformation aussi : elle est «beaucoup trop limitée», juge la DAAF. «L’atelier relais de Coconi, porté par l’AFICAM rattaché au Lycée Agricole, est le seul abattoir présent à Mayotte. 21 tonnes ont été abattues en 2015, soit 20% des 100 tonnes estimées produites dans l’île». Le reste est abattu à la ferme ou chez le client.
En clair, «un abattoir de capacité suffisante est requis», explique la DAAF, même si, à court terme l’atelier de Coconi pourrait augmenter sa production. La DAAF croit que cette simple mesure pourrait se répercuter sur tout le secteur, avec une productivité plus grande et des coûts qui baisseraient…
Cette «simple optimisation» de la chaîne de production pourrait faire baisser le coût sortie abattoir d’un poulet de 2,45€… sans les aides européennes !
Autant dire, que le secteur attend une vision et un développement industriel qui viendrait s’ajouter au travail des petits producteurs.
RR
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*DAAF: Direction de l’alimentation, l’agriculture et de la forêt