Premier constat, l’agriculture pèse pour 7% du PIB (Produit Intérieur Brut, richesse du territoire), avec une production de 123 millions d’euros. Or, 25% de la population y « travaille », soit 53.000 personnes sur une population de 227.000 habitants en 2015 (INSEE).
Il s’agit donc de très petites exploitations. Un constat difficile à recouper faute d’étude précise. Si le dernier recensement agricole de 2010 faisait état de 7.092 ha de surfaces agricoles sur 20.700 ha, il a été ajusté par « une cartographie sommaire des espaces végétalisés faite à partir d’images satellitaires », que la DAAF a encore recoupé par un comptage des arbres fruitiers pour en déduire leur emprise au sol, « soit prés de 500.000 arbres fruitiers, manguiers, agrumes, letchis, avocatiers, jacquiers, etc. », qui occupent 2.671 ha. « Il faudra attendre le Recensement agricole de 2020 pour obtenir le chiffrage réel et exhaustif ».
Le volume des légumes, féculents et fruits produits, avoisine les 72.600 tonnes pour 110 M€ en valeur en 2015. « C’est sans changement majeur en volume par rapport à 2010 (67 000 tonnes en 2010), si ce n’est quelques productions qu’on estime avoir augmenté comme l’ananas ou la tomate. Le gros de cette production est représenté par la banane verte, le manioc et l’embrevade et par du maraichage.
Décroissance de la vanille et de l’ylang
Avec des rendements faibles au regard des standards internationaux comme l’avait mis en évidence une précédente enquête. La solution serait l’intensification écologique des cultures, qui « permettrait d’améliorer grandement la productivité et limiterait la défriche telle que, malheureusement constatée aujourd’hui avec des abattages d’arbres qui se multiplient. »
A Mayotte, nous sommes en présence d’une agriculture vivrière où 80% de la production agricole est auto-consommée par les familles productrices. Un taux d’autosuffisance qui a un impact sur les importations, de seulement 17.750 tonnes de légumes et fruits.
Un mauvais élève, le riz, importé à 99,9% ! Nous en avons importé 20.718 tonnes en 2015, soit une hausse de 15% par rapport à l’année précédente, ce qui va certainement nourrir des spéculations sur le nombre d’habitants du territoire…
Les productions végétales, dites de « rente », que sont la vanille et l’ylang, continuent leur décroissance avec 26 ha de vanille déclarés en 2015 contre 30 en 2010 et pour l’ylang, 103 ha déclarés en 2015 contre 143 en 2010. « La remontée des cours de la vanille noire en 2016 va permettre de redonner de la vigueur aux producteurs et pour l’ylang, il faudrait un plan de sauvetage efficace, basé sur une nouvelle dynamique de marché auprès des parfumeurs. »
Progression de la production d’œufs
Difficile également d’évaluer le bétail. Depuis 2010, des obligations règlementaires impose d’identifier ses animaux : « Or, seulement 47% de ceux-ci sont « passeporisés » et on constate de nombreuses absences de notification de sortie d’animaux (vente et abattage « sous le manguier »). Le chiffre de 19 514 indiqué dans la BDNI 2015 est sans doute surestimé.
En ovins et caprins, le bouclage des animaux n’en est qu’à ses débuts (moins de 20% d’animaux déclarés), « on restera donc sur le chiffre 2010 de 11 542 caprins et un peu plus de 1000 ovins, malgré les velléités d’un plan de relance de la production ovine qui peine à se mettre en place. »
La production d’œufs par contre progresse avec 76 000 pondeuses estimées en 2015, soit 27 000 de plus qu’en 2010. En poulets de chair, on serait à 60 000 contre 53 000 en 2010. En valeur, la production animale est estimée à 13.4 M€ contre 10 M€ en 2010.
Un comparatif production/importations permet d’évaluer la marge de progrès. Il apparaît que toutes ces productions animales locales sont grandement insuffisantes, « sauf pour l’œuf, qui jusqu’en 2013, ne devait être importé qu’en période de Ramadan. Or, même pour cette production, la demande progresse plus vite que l’offre locale, de 5 à 10% par an. »
On ne produit qu’1% des volailles consommées
En volailles de chair, les importations ne sont couvertes par la production locale qu’à hauteur de 1% ! et le marché progresse fortement, de 10 à 20% par an : « C’est dire que, sur ce secteur de la volaille, les perspectives sont largement ouvertes, avec des taux de marge en principe très attractifs pour les producteurs, compte tenu des aides publiques accordées. »
Sur les secteurs « bovins, caprins, ovins », deux handicaps majeurs pénalisent la production : il manque toujours un abattoir, qui « empêche la mise en place des aides communautaires », et le prix de vente, « à plus de 10€/kg, est calé sur un marché essentiellement festif », comme les grands mariages, « qui ne correspond pas à une consommation quotidienne. » Un réel effort est attendu du côté des propriétaires.
Pour le lait, le marché existe mais est concentré au moment du Ramadan et des grands mariages. « Le prix à 4€/l est là aussi très décalé par rapport au prix d’importation. Une filière de « yaourts pays » se met toutefois en place à l’initiative de la COOPADEM et du lycée agricole. »
En 2015, il a été importé pour prés de 130 M€ de produits alimentaires contre 112 M€ en 2011. En quantités, c’est 104.000 tonnes en 2015 contre 76.000 en 2011 (+37% en 4 ans). Les plus gros volumes (outre l’eau en bouteilles) sont représentés par le riz, la volaille de chair, puis les fruits et légumes. Le déficit sur la balance commerciale se creuse donc.
Photo D Didelot- SISE/DAAF
A.P-L.
Le Journal de Mayotte