Les policiers de Saint-Denis entament une enquête délicate après la mort de deux enfants, d’origine mahoraise, dans l’incendie d’un appartement à Saint-Denis.
Dans la nuit de samedi à dimanche, le feu prend dans l’une des chambres du petit appartement situé au rez-de-chaussée d’un immeuble vétuste de deux étages. Abdou, 31 ans, qui habite l’immeuble voisin, regardait la télé lorsqu’il a entendu des cris: «J’ai d’abord senti la fumée et puis j’ai entendu crier. Je suis descendu, il y avait beaucoup de fumée.»
Dans l’appartement en feu, vit une famille composée d’une femme de 29 ans et ses quatre enfants, une fillette de 7 ans, deux garçons de 4 et 5 ans, et un bébé de 10 mois. «La mère avait pu sortir avec la grande et le bébé, mais les garçons étaient prisonniers à l’intérieur. J’ai essayé de casser la fenêtre pour aller les chercher, mais c’était déjà trop tard. Il y avait trop de fumée», poursuit Abdou.
Les pompiers arrivent rapidement, le centre de secours est à quelques centaines de mètres seulement. Six engins et ambulances sont mobilisés. La mère et les deux enfants sont évacués vers le CHU, intoxiqués par les fumées, tandis que les pompiers tentent de circonscrire le sinistre. Il est déjà trop tard pour les deux petites victimes, Abdelahi et Ahamada.
L’incendie n’est éteint que vers 3 h du matin. Il faudra encore de longues minutes pour extraire les dépouilles des deux enfants. Les corps devraient être autopsiés ce lundi.
«Insalubrité irrémédiable»
Depuis hier, les habitants du quartier sont sous le choc, notamment ceux de la communauté mahoraise à laquelle appartenaient les victimes. Ils sont en colère aussi, alors que ces logements auraient dû être vidés depuis quelques semaines déjà, en raison d’un arrêté préfectoral déclarant l’insalubrité irrémédiable de l’immeuble depuis le mois d’avril dernier.
La préfecture listait alors en détail les raisons d’une telle mesure. L’enquête de l’Agence régionale de Santé (ARS) avait établi que l’état du bâtiment constituait un danger pour la santé des personnes qui l’occupaient: manque de stabilité du bâti, détérioration des matériaux de construction, infiltrations d’eau, installation électrique insuffisamment sécurisée, défaut de ventilation et équipement des pièces sanitaires et de service sommaires et/ou dégradés…
En attente de relogement
Ainsi, les locaux étaient devenus «interdits à l’habitation» six mois après cet arrêté, autrement dit depuis fin octobre. A cette date, tous les habitants auraient dû recevoir une offre de relogement et c’était le cas de la famille frappée par le drame. En juin dernier, des journalistes s’étaient rendus sur place et la mère leur avait en effet expliqué qu’elle devait être relogée dans un autre quartier.
A l’époque, la mère de famille évoquait les cafards, les rats et les loyers pratiqués dans l’immeuble, entre 400 et 650 euros, un montant qui laisse songeur compte tenu de l’état de l’immeuble. Dans ces conditions, six mois plus tard, pourquoi était-elle encore dans ce logement avec ses enfants? L’enquête va chercher à l’établir.
Selon la presse réunionnaise, six familles de l’immeuble comprenant 16 logements avaient déjà été relogées, les autres étaient toujours en attente.
Une bougie, peut-être à l’origine du drame
D’après les témoignages recueillis sur place, la famille, comme le reste des résidents qui partageaient le même compteur, était privée d’électricité depuis près d’un mois en raison d’impayés, et s’éclairait à la bougie. C’est l’une d’elles, laissée allumée dans la chambre des garçons, qui pourrait être à l’origine du drame, même si les circonstances restent encore à déterminer pour les policiers.
Le propriétaire des lieux a été auditionné une première fois hier matin. La mère de famille en revanche très choquée, n’a pas encore été entendue par les policiers.
L’enquête, ouverte par le parquet de Saint-Denis et confiée à la sûreté départementale, devra donc chercher à établir l’enchaînement des circonstances qui ont conduit à la mort de ces deux enfants.
RR, le JDM
Avec le JIR.