Le Conseil de l’Ordre porte-parole des médecins malades

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La délégation du Conseil de l'ordre au Conseil général ©cg976

C’est quasiment à une autopsie que s’est livrée à Mayotte la délégation du Conseil de l’Ordre des médecins. Surpris, ils l’ont été de constater que les alarmes étaient réelles.

Au dispensaire Jacaranda
Au dispensaire Jacaranda

666 médecins pour 200.000 habitants en métropole, à peine 180 à Mayotte… Et le rythme n’est pas prêt de s’inverser. Le Syndicat des médecins libéraux avait lancé un mouvement de grève en octobre dernier pour interpeller le gouvernement sur la situation  dégradée de la santé à Mayotte. Ils avaient été reçus au cabinet de Marisol Touraine.

Et il y a dix jours, une délégation de représentants nationaux et régionaux du Conseil de l’Ordre des Médecins est venue à Mayotte. Un acte qui a d’abord été perçu comme «une prise en compte des difficultés, notamment de la carence de soignants à Mayotte», livre Anne-Marie de Montera, présidente du Conseil de l’Ordre des médecins qui a pris la suite de Patrice Guira parti à La Réunion.

Ils ont visité les dispensaires, dont celui de Koungou, les urgences, la maternité, le service de psychiatrie et les professionnels de terrain… «Une autre voix qui se fera entendre à Paris». Mais pour quel résultat ?

«Pour l’instant, c’est un non catégorique à l’implantation de l’Aide Médicale d’Etat sur l’île, et l’écho sur la Couverture Maladie Universelle Complémentaire n’est guère meilleur», annonce le médecin. La première permet aux étrangers en situation irrégulière de bénéficier d’un accès aux soins, alors que la seconde, la CMU-C, donne droit à la prise en charge gratuite de la part complémentaire des dépenses de santé.

Aucune prise en compte de la précarité donc, sur une île dont c’est la spécificité première, «c’est un gros frein à la santé publique à Mayotte». Et au développement de la médecine libérale qui n’est plus représentée que par «17 généralistes et 5 spécialistes». La seule avancée notable depuis la grève des médicaux d’octobre est la mise en place de la carte Vitale, mais la décision lui était antérieure.

Être épaulé par des partenaires costauds

La délégation du Conseil de l'ordre au Conseil général ©cg976
La délégation du Conseil de l’ordre au Conseil général ©cg976

Ajouté à une fiscalité peu favorable au regard des confrères guyanais par exemple «et au déficit de moyens mis à disposition des spécialistes», on comprend «l’inquiétude de la communauté médicale» : «lors d’un débat avec les professionnels de santé titulaires, les représentants nationaux du Conseil de l’Ordre ont pu entendre parler des agressions, du malaise des conjoints. Le monde médical attend des mesures immédiates».

Au CHM, les soins sont assurés par des remplaçants qui viennent à prix d’or, «le manque de médecins titulaires de longue durée nuit à une politique de santé de moyen terme».

Le président du département Daniel Zaïdani informe avoir également reçu la délégation de médecins, avec lesquels il a abordé l’ensemble de ces thèmes, «ils doivent aussi porter des projets au plus haut niveau», selon Anne-Marie de Montera.

Quant à la stratégie nationale de Santé de Marisol Touraine «qui devrait être publiée d’ici le mois de  juin», le risque est d’aggraver un peu plus le déséquilibre, «les règles ne devront pas s’appliquer à Mayotte du jour au lendemain».

La présidente du Conseil de l’Ordre demande avant tout que soit développés des partenariats «pas seulement avec La Réunion, mais aussi avec des CHU plus étoffés comme Marseille, ou encore dans le paramédical, que certains avantages soient votés, «comme l’assurance de réintégrer son service lors du retour en métropole», et un statut particulier des professionnels de santé sur l’île, «nous sommes dans un département défavorisé sans pouvoir bénéficier des avancées éventuelles d’un département limitrophe».

Ce déplacement est un geste fort pour Anne-Marie de Montera qui fait remarquer que le Conseil de l’Ordre ne se déplace pas dans tous les départements. «Ils se sont faits leur propre opinion»… infléchira-t-elle des décisions qui excluent toujours Mayotte ?

Anne Perzo-Lafond

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