« Ordre-autorité-humanité » sont les trois maîtres mots des directives livrées par le président de la République ce mardi. Ordre et autorité, parce que la « régulation des flux migratoire est une mission régalienne », une compétence de l’Etat. « On ne laissera pas se reconstituer une jungle à Calais », a lancé Emmanuel Macron, précisant « nous ne laisserons pas installer de nouvelles occupations illicites ».
Il donne la ligne de conduite : les migrants devront systématiquement passer par les centres d’hébergements « où la situation de chacun devra être examinée », notamment leur demande d’asile. Actuellement, la durée moyenne d’examen des dossiers oscille autour de 18 mois, « même plus de 2 ans dans certaines régions »… Il ne nommera pas Mayotte, mais l’appel à une permanence de l’OFPRA* a été régulièrement émis par les associations en charge des migrants ici.
« Depuis tant d’années, nous faisons tout à l’envers, en accueillant sans discernement et en maintenant des longueurs d’études des cas (…) il faut amener le délai d’étude de la demande d’asile à 6 mois, car comment reconduire un migrants au bout de 2 ans ? Il s’est installé dans une vie normale ». Emmanuel Macron précise que « nos voisins le font en 6 mois ».
Les motifs du départ
Des « voisins », qui doivent faire l’objet de démarchage pour une « plus grande convergence de nos législations, notamment avec l’Allemagne ». Le cas spécifique de Calais avec des migrants qui souhaitent se rendre en Grande-Bretagne appelle à un accord renouvelé avec ce pays, avec une révision des accords du Touquet, qui a introduit une frontière anglaise en France, pour ceux qui veulent aller en Grande-Bretagne.
Tout va donc se jouer dans l’examen individualisé des dossiers des migrants, et des critères utilisés. Il est appelé à une évolution du système Dublin, qui impose à un migrant de demander l’asile au premier pays européen sur lequel il pose le pied. Mais les motifs des demandeurs d’asile ont également fortement évolués, et si certains pays sont encore en guerre, beaucoup migrent pour des motifs économiques, Mayotte en sait quelque chose… Ce qui mériterait sans doute une évolution de la législation dans un second temps.
Prise en charge de l’aide au repas
En contrepartie d’un encadrement des arrivées, davantage de places seront ouvertes dans les centres d’accueil, avec l’annonce d’un financement de 143.000 en hébergement d’urgence et 90.000 pour les demandeurs d’asile. Nouveauté, l’Etat prendra en charge aussi l’aide aux repas.
Plusieurs annonces qui font écho à l’actualité mahoraise, que l’on évoque les « décasages », qui ont mis plusieurs migrants à la rue qui pouvaient relever de l’hébergement d’urgence en attendant l’examen de leur situation, ou les naufragés de la coulée de boue de Koungou, nourris et logés pendant 5 jours, sans aucun cadre de prise en charge spécifique. Des occupations anarchiques du terrain qui demandent à être régulées.
« Voilà un président qui rentre dans la matière comme aucun ne l’a fait. Il maitrise le sujet », se réjouissait sur les plateaux TV Pierre Henry, le directeur général de France Terre d’Asile, qui demande malgré tout à voir, « le vrai sujet, c’est le dispositif de 1er accueil, il est annoncé comme étant individualisé, mais on ne sait pas comment ce sera décliné sur le terrain. »
Pour Emmanuel Macron, il en va de « l’attractivité de Calais ». Un autre territoire, ultramarin celui-là, en demande autant… Nos parlementaires sauront le souligner.
Anne Perzo-Lafond
Lejournaldemayotte.com
*Office français de Protection des Réfugiés et Appatrides