L’annonce d’une baisse de 9% des chiffres de la délinquance à Mayotte fait grincer trop de dents au vu du faible nombre de dentistes à Mayotte.
Toutefois, si cette baisse peut se lire de plusieurs façons, le tribunal de son côté, enregistre une hausse de 14% de ses décisions sur l’année 2017.
« La baisse de 9% de la délinquance à Mayotte signifie-t-elle que nous avons résolu ce problème ? Qui peut le laisser croire » s’insurge le procureur Camille Miansoni, en réponse aux critiques que suscite ce chiffre. « En revanche cette baisse exprime une tendance. Qu’elle ne corresponde pas à la perception du plus grand nombre est compréhensible » poursuit le représentant du Ministère public.
Il s’exprimait dans le cadre de l’audience solennelle de rentrée du tribunal, qui a vu l’installation d’un nouveau magistrat, le vice-président Charles Beaugendre, fraîchement arrivé de Montpellier.
Parallèlement au chiffre de la délinquance, le procureur affiche un autre chiffre, celui du nombre de décisions juridictionnelles, en hausse donc de 14% avec 2289 jugements sur l’année. « Ce chiffre montre que les femmes et les hommes de la juridiction ont fait encore plus d’efforts dans un contexte difficile » salut-t-il.
Un chiffre qui amène le président Sabatier à saluer un « bilan collectif satisfaisant, la juridiction absorbe la croissance des saisines ».
Alors que se tourne la page d’une année marquée par l’arrivée d’un nouveau logiciel, de la mise en place d’audiences mensuelles de CRPC (procédures de plaidé-coupable) et de stages de citoyenneté, le procureur annonce pour 2018 une année axée sur la lutte contre les fraudes à l’état civil. Dans ce cadre, il prévoit une vaste campagne de sensibilisation, promet d’intensifier la vigilance, et de poursuivre systématiquement en justice les fraudeurs. L’autre grand axe de travail du parquet sera la lutte contre les filières d’immigration clandestine. « Plusieurs dossiers sont en cours » annonce-t-il.
La coutume et la justice, pas toujours bons amis
Enfin, le parquet mettra un effort particulier sur la délinquances des mineurs. » L’annonce de la création d’un centre éducatif fermé en 2018 est une perspective favorable ». Il faut aussi selon lui mieux prendre en charge les mineurs « avant le passage à l’acte délinquant ». « Ce défi requiert des moyens et l’engagement de tous ».
Le procureur a également, sans nommer de médias en particulier, ciblé les « malentendus perçus tout au long de l’année ». « Ne pas comprendre est une chose. Ne pas chercher à comprendre en demandant, est tout aussi incompréhensible ».
A sa suite, le président Laurent Sabatier a plaidé pour « l’accès au droit de chacun ». « La justice est la seule vertu érigée en institution a-t-il répété, rappelant le jeu d’équilibriste qui consiste pour les juges à passer « du sentiment individuel de justice à la réponse institutionnelle ».
Le président a ensuite rappelé la nécessité de porter plainte, en vue d’obtenir justice. « La coutume n’est pas toujours porteuse de progrès, elle n’est pas toujours un bienfait pour sa population. Elle peut même être un recul. Mayotte a depuis 1976 marqué son attachement à la France. » Tout en rappelant que si la coutume ne doit pas primer sur le droit français, « le juge peut prendre en compte les spécificités culturelles locales ».
Y.D.