CARNET DE JUSTICE. Un couple s’est déchiré ce mercredi à l’audience correctionnelle du tribunal de Mamoudzou. A la barre, une mère poursuivie par son ancien compagnon qui lui reproche de l’empêcher de voir son fils, âgé de deux ans. Pour «non présentation d’enfant à personne ayant le droit de le réclamer», elle risque un an de prison et 15.000 euros d’amende.
Le couple s’est séparé un an après la naissance du petit, en janvier 2012. Le 6 mai 2013, le juge des affaires familiales établit l’autorité parentale partagée. La résidence de l’enfant est fixée chez sa mère mais le père peut le voir certains week-ends et pendant la moitié des vacances scolaires. Mais ce jugement ne sera jamais pris en compte par la mère.
Car entre les deux, la haine a tout balayé, il n’arrivent même plus à se parler. A la barre, la juge et la procureure sont obligées d’intervenir plusieurs fois pour ne pas avoir à subir les invectives qui fusent.
La colère de la juge et de la procureure
Depuis le jugement, le père n’a vu son fils que deux petites fois, un week-end et «pendant une heure et demi, le jour de l’Aïd». Pour acter de ce week-end, le couple s’est retrouvé au commissariat, pour poser une main courante prouvant que le père a bel et bien vu son fils. «Vous nous dites madame, que l’enfant pleure quand il voit son père ? s’indigne la juge Peyrot. Mais vous croyez qu’il est heureux votre enfant de ne plus connaître son père ? Cet enfant est au milieu d’un conflit entre ses parents qui l’amènent au commissariat !»
«Au début, elle a même fait croire aux forces de l’ordre que je buvais pour faire douter de ma bonne foi. Je ne bois pas, je suis enseignant», plaide le père.
A la barre, le ton monte face à une mauvaise volonté aussi manifeste, la mère expliquant que son ancien compagnon n’est jamais venu chercher l’enfant. «C’est parole contre parole, s’emporte la juge. Il y a une certitude madame, vous ne respectez pas les termes du jugement des affaires familiales. Est-ce que vous avez fait des démarches pour que son père voit normalement son fils?»
«Les enfants ne nous appartiennent pas, continue la juge. On est leur aiguillon… Et pour une fois qu’on a un père qui veut s’occuper de son fils, c’est pas si courant ici…»
Un enfant qui souffre
«On est là parce qu’il y a un enfant de ans qui souffre.» Ce constat établit, la procureure va tenter, dans son réquisitoire, de trouver une sortie de crise, une sorte de pacte pour que le couple pense, enfin, à l’intérêt de son fils. «Vous allez demander, un jour, à votre enfant de grandir, eh bien vous aussi, vous allez devoir grandir.» La procureure propose d’ajourner la décision de la cour, une demande suivie par la présidente.
Le tribunal rendra donc sa décision le 10 septembre. Durant les quatre mois qui viennent, la justice aura le temps de vérifier que l’exécution du droit de visite du père est effectivement respectée. La mère est également condamnée à un euro de dommages et intérêts, «c’est symbolique mais c’est une condamnation.»
Le père et la mère ont échangé leur numéro de téléphone. Après les foudres de l’audience, peut-être le début d’un nouveau départ.
RR
Le Journal de Mayotte
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