Lynchage de Nose Be: un journaliste propose une nouvelle version du drame

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Intitulé «Une vendetta sur fond de pierres précieuses», l’enquête publiée le Parisien sur les émeutes de Nosy Be (Madagascar) au début du mois d’octobre 2013, offre de nouvelles pistes sur les causes du lynchage de deux hommes. Sa thèse, des jalousies autour de concessions de pierre précieuses et des enjeux politiques.

Le Commissariat de Nosy Be
Le Commissariat de Nosy Be

Le 3 octobre 2013, Nosy Be s’enflamme. D’habitude si bienveillante envers les Vasaha (les étrangers), la petite île malgache s’embrase après la découverte du corps sans vie d’un enfant, rejeté sur la plage par la marée. Le cadavre de l’enfant, abîmé par son séjour dans l’eau, semble mutilé. La rumeur se propage et la foule fantasme un trafic d’organes dont l’enfant aurait été une des victimes.

Deux hommes présents sur l’île, le Français Sébastien Judalet et le franco-italien Roberto Gianfala, sont rapidement désignés responsable par la foule et ses leaders. «Suivent une mise à mort effroyable et une agonie insoutenable», écrit Nicolas Jacquard. Lynchés sur la plage d’Ambatoloaka, les corps sont jetés au bûcher.

L’enquête de Nicolas Jacquard, publiée par nos confrères du Parisien, met en doute cette version qui reste encore ancrée dans les esprits. Le journaliste a reconstitué la vie des deux hommes dans cette région malgache. On apprend ainsi que Roberto Gianfala, avait retrouvé un ami d’enfance, un certain Thierry, qui exploitait sur Grande-Terre, dans la région face à Nosy-Be, une concession de pierres précieuses, particulièrement riche en saphirs étoilés. L’homme aurait même réussi un de ses plus jolis coups quelques mois plus tôt en vendant un saphir de 40.000 dollars à Paul Allen, le cofondateur de Microsoft qui était passé dans les eaux malgaches quelques mois plus tôt. De quoi susciter de nombreuses convoitises.

Les "révélations" du Parisien sur le drame de Nosy Be
Les « révélations » du Parisien sur le drame de Nosy Be

Dessous politiques

Ce 3 octobre 2013, mis en cause par la foule en délire, le fameux Thierry aurait réussi à sauver sa peau en orientant la furie vers les deux hommes mis à mort. Thierry vit aujourd’hui «réfugié dans le nord de Madagascar.»

Pour des témoins interrogés par Nicolas Jacquard, cette affaire a également «des dessous politiques». L’enquête met en cause un sénateur local qui aurait «loué» des manifestants en les faisant venir de Grande-Terre à Nosy Be, pour saboter un meeting de campagne du futur président de la République prévu dans l’île.

"Si c'était à refaire beaucoup le referaient", conclut l'enquête
« Si c’était à refaire beaucoup le referaient », conclut l’enquête

Des sous-fifres en prison ?

Le journaliste conclut son enquête en indiquant que 35 personnes ont été interpellées depuis les événements. Mais avec ses témoins, il semble sceptique sur la suite donnée à l’affaire et à la capacité des autorités malgaches de définir les responsabilités réelles et juger les instigateurs de ce drame. «Dans cette affaire, on nage en eaux troubles. Alors personne ne sera jugé et on laissera crever quelques sous-fifres en prison», affirme un témoin.

De fait, près d’un an et demi après que la fumée des bûchers se soit élevée sur la plage d’Ambatoloaka, l’affaire semble enlisée dans les méandres de l’administration malgache.
RR
Le Journal de Mayotte

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