Ce n’est pas un secret, ce sont les associations qui ont investi le champ du social à Mayotte. Prérogative du conseil général, ce dernier ne s’est véritablement jamais donné les moyens, sans doute par absence de prise de conscience mais aussi en raison du facteur immigration qu’il laisse à l’Etat. Tama et Caritas France nous donnent leur vision d’un conseil départemental idéal.
Tama prend en charge trois catégories de population en exclusion, les jeunes en alternative à l’incarcération, les adultes sortant de prison et les personnes nécessitant des soins thérapeutiques.
Le renforcement de la délinquance, dans une île encore peu touchée il y a encore trois ans, nécessite d’accroître notamment la prise en charge des mineurs.
Dans ce sens, deux avancées nuancées sont à noter du côté du conseil général selon Christophe Vénien, délégué de Caritas France et Philippe Duret, directeur général de Tama : la mise en place d’un Observatoire de l’enfance en danger (OPEMA), « mais qui n’a jamais véritablement trouvé sa vitesse de croisière alors qu’il doit fédérer les acteurs autour des différents types de protection », et celle de l’Aide sociale à l’enfance (ASE), l’outil prioritaire du conseil général qui s’est enfin doté d’une directrice il y a un an.
« Nous suppléons toujours aux missions de l’ASE en nous occupant des enfants de l’île sans aucun contrôle du conseil général », déplore d’ailleurs Tama, qui appelle les futurs élus à donner une vraie impulsion au social.
Une cellule de l’ASE devait d’ailleurs habiliter certaines structures, ce qui était perçu comme un sursaut positif par les associations, mais non suivi d’effet : « l’annonce date de 7 mois. Pendant ce temps, un gamin de 4 ans continue à dormir où il peut, dans une voiture, et en aura bientôt 5 ! Dans trois mois, c’est la fin de l’année scolaire, on aura perdu un an », et, reprenant en la détournant, la maxime mahoraise, « ok, on a la montre, mais les Mahorais n’ont plus le temps, le quotidien nous le rappelle tous les jours ! ».
Arrêter les postures Etat-conseil général
Un manque d’intérêt évident pour le social, « la protection de l’enfance n’est pas un sujet qui fait recette électoralement parlant ». Le conflit actuel au sein de la Direction du social en dit long sur le travail à mener. Mohamed El Amine, son DGA, a longtemps invoqué une population étrangère qu’il ne pourrait gérer à lui tout seul. Les élus demandent d’ailleurs périodiquement à l’Etat d’assurer là sa compétence régalienne.
Les deux têtes du département se renvoient périodiquement la balle en matière de nationalité des mineurs, ce qui nuit à la recherche de solutions : « il faut arrêter les postures et apprendre à travailler ensemble. La préfecture et le conseil général doivent faire abstraction de leurs reproches respectifs et remettre les personnes en difficulté au centre du débat », implore Christophe Vénien.
Ces jeunes qui se débrouillent par eux-mêmes, des « trainards » comme ils se qualifient parfois à la barre du tribunal où ils échouent souvent, sont pour moitié d’origine française. L’idée d’un Plan jeunesse a d’ailleurs été émise par trois associations locales, qui donnerait la parole aux jeunes. Il a été repris par le président de la République.
Car il n’est pas question d’appliquer les mêmes solutions qu’en métropole qui en revient d’ailleurs : « les orphelinats de 500 places ne permettent pas d’accompagner efficacement les enfants. La solution la plus proche de la société mahoraise reste les familles d’accueil. Il y en a 80 environ au conseil général, il en faudrait le triple ».
La femme, l’avenir du social ?
Protéger les enfants et prendre en charge leur éducation sont deux points du Schéma départemental de la jeunesse que devront réécrire les futurs élus. Il existe déjà, « avec des fiches-action qui n’ont jamais été déclinées, en dehors de l’OPEMA et la Cellule « Bas maltraitance », constate Philippe Duret.
Des secteurs entiers du conseil général sont en réalité dédiés au social, comme le rappelait son président Daniel Zaïdani, « mais qui sont remplis d’agents de catégorie C, de chauffeurs, certains même sans voiture ! », témoigne encore le directeur de Tama qui souhaite avant tout que quelqu’un tienne la barre, recrute des techniciens diplômés. Et évalue le coût de fonctionnement de l’ASE.
Car tout s’accélère, même dans ce secteur où les fonds européens appellent des projets sur des thématiques définies par l’Europe. Et l’Economie sociale et solidaire en est une, qui invite à repenser à la fois la solidarité et les gaspillages de l’économie : « nous montons un projet d’une entreprise dans ce domaine, mais sans le conseil général, alors que la population bénéficiaire du RSA peut l’intégrer». Des fonds qui risquent de repartir à l’envoyeur.
Philippe Duret mise sur les femmes qui entrent à parité égale dans l’hémicycle, d’ailleurs trois de ses salariées se présentent, dont Zarianti Nourdine-Abdallah à Ouangani, qui prévoit un centre médico-social à Chiconi, « pour centraliser les PMI et UTAS qui sont dispersées ». On pourrait presque penser que les femmes et les jeunes élus seront plus clairvoyants que leurs aînés une fois au pouvoir…
Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte
Bravo aux associations qui s’engagent chaque jour pour pallier au manque de réponses des pouvoirs publics. Que l’Etat et la département s’entendent enfin sur le sujet, il y a urgence. L’Etat apporte déjà 3 millions d’euros aux projets associatifs de protection de l’enfance, mais n’est plus pressé aujourd’hui de mettre autour de la table le conseil général, pourtant seule autorité pouvant autoriser ces actions. C’est que les élus ont par le passé trop de fois refusé de s’asseoir à cette même table… La préparation d’un nouveau schéma Enfance Famille par le département doit être l’occasion de reprendre les discussions, tout comme la gestion de fonds européens qui nécessite une coordination des acteurs. Quant au coût de l’ASE, la chambre régionale des comptes a récemment procédé à ce travail d’évaluation et arrêté ce coût à 4,7 millions d’euros. Je rejoins M. Vénien, il faudra trois fois cette somme pour commencer à parler de prise en charge des mineurs à Mayotte. Enfin, s’agissant de l’observatoire de la protection de l’enfance, n’est-ce pas à tous ses membres, associations et institutions, de donner la vitesse de croisière ?
J’ajouterai à l’attention de la candidate que la création de centre médico sociaux sur chaque territoire d’action sociale du conseil général est un projet déjà arrêté par l’assemblée actuelle sous condition d’éligibilité aux fonds européens. Les PMI doivent dans la même dynamique être rénovées. Mais on ne peut réunir 22 points de PMI sur 5 centres médico sociaux, donc l’offre restera éparpillée, ce qui peut aussi être qualifié de maillage du territoire.
421322 528144Vi ringrazio, ho trovato che quanto scritto non sia completamente corretto 25219