Mickaël Guez, de la communication au service du public

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Mickaël Guez est un des maillons de la chaîne de transmission de l’idée du service public. Il aurait fait malheur comme fonctionnaire, mais c’est à travers sa petite société Clap Production qu’il œuvre sans compter, en faveur d’une meilleure harmonie sociale. Le Foundi du lagon, une de ses réussites, c’est un peu lui.

Mickael Guez « Mika », comme il se fait appeler, est né sous le soleil du sud de la France un 22 février 1976. Son père pied noir qui travaillait à l’ORTF en Algérie, retrouve à Vézénobres, prés d’Alès, les couleurs et la chaleur de la Méditerranée, de retour forcé des événements d’Alger.

Il suivra sa scolarité à Bulles, un petit village de l’Oise, puis passe un bac A2 à Uzès dans le Gard. Le tout, au sein d’une famille nombreuse. Très nombreuse même, puisque les enfants sont la passion de ses parents, qui sont famille d’accueil avec une maman assistante maternelle.

La maison est toujours pleine, même d’enfants non placés officiellement. Il considère d’ailleurs comme ses frères et sœurs ceux qui sont parfois restés 20 ans dans le foyer. Tout le monde participe, même ceux qui souffrent de handicap, « ma sœur paraplégique m’envoyait des mails avec son coude ».

Mickaël Guez obtient un DEUG de Lettres modernes mais s’aperçoit qu’il n’est pas fait pour les études et a des envies d’ailleurs. Ce sera le Brésil, 4 mois en baroudeur.

Le service militaire l’appelle au 72ème RIMA à Marseille, la mixité sociale et régionale, avec des Corses, des Antillais, il y œuvre contre l’illettrisme.

Il part ensuite dans les kibboutz à Israël, au bord du lac Tiberiade, ces fermes communautaires où il choisit d’œuvrer dans l’agriculture à mi-temps pendant 5 mois. Affecté à la nurserie d’autruches, « très bêtes et puissantes », puis aux palmiers-dattiers qu’il apprendra à féconder. Avec des amis québécois, il visite le Sinaï, Le Caire, Israël.

C’est de retour chez lui qu’il fait ses premières armes dans la vidéo, une petite équipe, il y apprend le cadrage.

Egalement passionné de voile, il embarque sur un voilier en acier de 11,50m, pour un tour de la Méditerranée, la Turquie, le Liban, Beyrouth, Tripoli et Israël de nouveau. Il découvre que la plupart des habitants du pays veut la paix, « mais ils sont cernés par la guerre ».

Ses premiers pas de réalisateur, ce sera à Madagascar, avec un documentaire sur le canal des Pangalanes, qui relie sur 654 km les lacs côtiers de l’est de l’île, grâce à une bourse d’Etat du Défi jeunes. France 5 est preneur, et le suivra d’ailleurs sur ses films successifs. Il apprend le malgache.

Puis il part découvrir plusieurs pays d’Afrique dont le Sénégal, la Côte-d’Ivoire ou le Togo. Sa femme postule alors en 2005 pour un poste d’infirmière à Mayotte.

Le JDM : Vos premières impressions ?

On a tous dans la tête, "non, papi, SMAE"
On a tous dans la tête, « non, papi, pas Sogea mais SMAE »

Mickaël Guez : « Mayotte m’a plu tout de suite, surtout la convivialité. J’habitais Sohoa, un village shibushi. Je deviens cadreur chez « Mise au point », que je reprends rapidement avec Clap, pour en faire une seule et même entité. C’est là que je lance Tam Tam jeunes, en collaboration avec l’Etat et le Conseil général. Des reportages réalisés pour et avec les jeunes, et diffusés deux fois par mois sur Mayotte 1ère.
De 2008 à 2012, tous les sujets forts auront été abordés, les grossesses précoces, la génération SMS, la violence dans le sport, les enfants du juge, les « je viens de » ou « Après la rue » pour lequel les jeunes de Dembéni remportent un prix au Festival « Oroleis-Regard des jeunes sur la cité » de Paris… des sujets qui sont le ressort d’une chaîne de service public. Nous avons été jusqu’à 10 salariés pour Clap production. »

Et malgré ce rôle social, Tam-tam jeunes s’est arrêté ?

Mickaël Guez : « Nous assurions la moitié de notre chiffre d’affaires par ces commandes de l’Etat. On peut sans doute expliquer l’arrêt de notre collaboration par le turn-over et le changement d’équipe à la tête de la préfecture. C’est pourtant un concept qui aurait dû se pérenniser avec un principe participatif des jeunes. C’est souvent très compliqué, et il fallait parfois une semaine pour sortir un ‘13 minutes’ parce qu’il faut les guider, voire les former, mais le résultat est aussi le fruit de leur travail. Nous avons participé à l’éclosion d’animatrice comme Youmna qui travaille chez Mayotte 1ère.
Lors de l’arrêt de l’émission, nous avons dû licencier 3 personnes, mais je peux dire que ces 100 émissions de Tam Tam sont la réalisation dont le suis je plus fier.

Que devient Clap maintenant ?

Les écogestes d'Hawa pour EDM
Les écogestes d’Hawa pour EDM

Mickaël Guez : « Nous gardons nos fidèles clients, Colas, SFR, la Laiterie de Mayotte, la SMAE, le Sieam, EDM pour lequel nous avons réalisé les petits films ‘les Ecogestes d’Hawa’, le Parc Naturel Marin et son ‘Foundi du lagon’. Nous restons dans l’éducatif, je reste attaché à l’idée de faire passer les messages par le service public, et la nécessité d’œuvrer pour Mayotte et sa société.
Nous avons travaillé sur un sujet d’actualité, l’absence des papas dans les foyers, mais toujours selon notre méthode : nous filmons des exemples de réussite familiale au lieu de stigmatiser.
Les émissions « cocos-bacocos » pour Rédiab Ylang, revisitent notamment les plats traditionnels mahorais, où l’eau remplaçait l’huile, et dont la diététique prémunissait contre le diabète.

Et en prévision ?

Mickaël Guez : « Nous venons de boucler un tournage test d’une série documentaire ‘Mémoire des quartiers’. Des mini-films de 13 minutes que nous proposons toujours au service public, Mayotte 1ère et France Télévisions. Nous donnons la parole aux gens, ils ont un grand besoin de la prendre. Après ça, ils sont moins véhéments, les jeunes n’ont plus envie d’utiliser leurs poings. Nos quartiers sont riches de jeunes qui veulent parler de leur réussite et non plus être montrés du doigt.
De la même manière, nous devons capter la parole des vieux bacocos et cocos avant qu’ils ne disparaissent.
De mon côté, je vais me partager entre la métropole, Madagascar et Mayotte pour trouver de nouveaux marchés. Najat Annouch, notre nouvelle directrice commerciale prendra alors le relai.

Trois petites questions plus personnelles. Avez-vous ou avez-vous eu un mentor ?Mickael Guez

Mickaël Guez : « Oui, Mandela, le guide suprême, pour sa capacité à ressortir de ses années d’enfermement, non pas plein de haine, mais de sagesse. Et on peut constater l’amnésie des peuples avec les agressions actuelles en Afrique du Sud…
A Mayotte, c’est l’ancien patron de Colas, Serge Cavasino, qui m’a tiré vers le haut par son exigence.

Un livre ?

Mickaël Guez : « ‘Rouge Brésil’ de Jean-Christophe Rufin, ambassadeur de France au Sénégal, qui a reçu le Prix Goncourt pour ce roman. »

Un morceau de musique ?

Mickaël Guez : « ‘Gymnopédies et les Gnossiennes », d’Erik Satie. »

10 ans de films et de ‘docu’ n’auront pas entamé la pugnacité de Mika. Accompagné par son fidèle Franck à la direction artistique, la petite Clap devrait encore avoir de beaux jours devant elle.

Propos recueillis par Anne Perzo-Lafond
Le Journal de Mayotte

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