Aussi étonnant que cela puisse paraître, voici une maladie dont on ne connaît quasiment rien à Mayotte : la grippe. A La Réunion, le climat plus frais et la présence d’un nombre de personnes âgées et fragiles bien plus important que chez nous, a permis aux autorités sanitaires de disposer d’études fouillées et anciennes. Actuellement, rien de tout cela à Mayotte mais les choses vont changer très vite. La grippe est désormais observée de près.
La CIRE, la cellule de l’Institut national de la veille sanitaire dans l’océan Indien, met en place une véritable surveillance épidémiologique. «La grippe, c’est un virus de pays froid qu’on trouve principalement en hiver dans l’hémisphère nord. Mais en réalité, il peut circuler n’importe où, y compris à Mayotte où il n’y a pas de période fraîche», explique Elise Brottet, épidémiologiste à la CIRE. «On veut essayer de comprendre si, à Mayotte, il y a une saisonnalité de la grippe et si les souches sont en rapport avec celles qui circulent en métropole et qui arriveraient à Mayotte avec les voyageurs.»
Des médecins sentinelles
Si on sait que cette période de l’année correspond à une recrudescence des consultations avec des symptômes de fièvres et de toux, on ne sait pas précisément s’il s’agit de la grippe… plus pour longtemps.
«On a noué un partenariat avec le CHM pour une véritable surveillance virologique», précise Elise Brottet. Le laboratoire du centre hospitalier procède donc à des recherches plus poussées que d’habitude et un réseau de médecins sentinelles, répartis dans une dizaine de dispensaires a été mis en place. Il s’agit de médecins généralistes qui vont faire remonter les informations pour permettre une vision globale de la situation.
Ce réseau va se focaliser sur 3 pathologies précises : les diarrhées aigües (pour les épidémies de gastroentérites), les syndromes de dengue et donc la grippe. «Chaque semaine, ces médecins sentinelles nous rapportent le nombre de consultations en lien avec ces pathologies, ce qui va nous permettre de suivre leur évolution», précise Elise Brottet.
Et grâce au laboratoire, on saura maintenant s’il s’agit effectivement de grippe et mieux encore. «L’intérêt, c’est aussi de connaître les souches qui circulent. Pour les médecins, cela ne change pas grand-chose, les traitements sont les mêmes. Mais en surveillance épidémiologique, c’est très important, en particulier pour tout ce qui concerne le vaccin».
Des consultations en augmentation
Ce réseau a été mis en place au mois de janvier. On ne dispose donc que de quelques semaines de recul. La semaine dernière, le nombre de consultations pour la grippe était en augmentation et les analyses du laboratoire confirmait la présence de grippe A et de grippe B. C’est cette dernière qui circule principalement actuellement en métropole. Pour autant, même si les signaux alertent, il est trop tôt pour parler d’épidémie. Il faudra encore attendre les prochains retours des médecins et résultats du laboratoire du CHM pour savoir. Quoi qu’il en soit, on peut désormais savoir quand une épidémie se déclenchera.
Pour les patients enfin, l’information peut revêtir une certaine importance. Car à Mayotte, on ne sait pas si on peut trouver des formes graves comme cela existe en métropole ou à La Réunion avec, parfois, des surmortalités de personnes fragiles liées au virus. Disposer de cette information, «c’est aussi un des objectifs du dispositif de surveillance», confirme Elise Brottet.
RR
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